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#76 Actualité de l'aéronautique » [Réel] GéopAéro - Le point des nouveautés aériennes en Ukraine » 09/03/2023 16:20

philouplaine
Réponses : 15

Géop’Aéro … Qu’est-ce donc ? Dénicher (et traduire pour vous) dans les revues internationales, surtout américaines, des articles qui montrent bien l’importance de l’élément aéronautique dans les grands problèmes de géopolitique actuels, pour dénicher des choses intéressantes (j'espère) à raconter ...

Bonjour chers amis,

Je vous ai traduits deux articles assez courts et très récents, publiés dans la littérature spécialisée américaine, que je tenais à partager avec vous sur les forces aériennes ukrainiennes et ses besoins.
D’abord, d’après les propos d’un général de l’USAF lundi dernier 6 mars, les USA ont commencé à livrer, apparemment en petites quantités pour le moment, des kits Boeing d’équipement JDAM-ER de bombes et, tenez-vous bien, y compris pour des bombes d’une tonne ! En fait pas de vraies bombes à la base puisque ce seraient des kits Quickstrike-ER prévu à l’origine pour des mines marines de l’US Navy. Les Ukrainiens, qui n’ont pas deux mains gauches (contrairement à moi), les auraient adaptées pour que le kit JDAM-ER puissent être installé sur des bombes air-sol d’une tonne … Les Ukrainiens auraient également réussi à installer des nacelles de tirs adaptées à ces munitions sur leurs Mig et autres Soukhoï. Des bombes de très grande précision d’une tonne, larguées à environ 80 km de leur cible … de quoi inquiéter sérieusement le commandement russe.
Le second article reprend les propos récents du ministre ukrainien de la défense, M. Reznikov, sur les besoins désormais urgents de l’Ukraine en avions de combat occidentaux. Vous lirez avec intérêt qu’il n’a jamais été sérieusement question de demander des A-10.
J’ai pensé que ces informations pourraient vous intéresser. Les illustrations sont celles des articles originaux. Il y en a une ou deux qu’on a déjà vues ailleurs, je les ai laissées.

Bonne lecture !
Philippe




PREMIER ARTICLE

DES BOMBES INTELLIGENTES JDAM A AILETTES SONT DESORMAIS OPERATIONNELLES EN UKRAINE
Le plus haut gradé de l’USAF en Europe a récemment indiqué que des bombes JDAM-ER sont désormais entre les mains des Ukrainiens, ce qui menace fortement de nouvelles cibles russes.

Par Joseph Trevithick, The War Zone, 6 mars 2023



Article original en Anglais


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Une bombe JDAM sur sa nacelle. © Australian Air Force


L'armée de l'air ukrainienne peut désormais utiliser des bombes à guidage de précision de type Joint Direct Attack Munition-Extended Range (JDAM-ER) contre les forces russes, a déclaré le général James Hecker, un officier supérieur de l'armée de l'air américaine en Europe. Le stock ukrainien de ces bombes, qui peuvent atteindre des cibles à une distance de 75 km grâce à leur kit d'ailes amovibles, est actuellement relativement faible. Toutefois, elles pourraient déjà poser de réels problèmes à l'armée russe.

Le général James Hecker, qui commande les forces aériennes américaines en Europe (USAFE) et en Afrique (USAFAFRICA), ainsi que le commandement aérien interallié de l'OTAN, a fourni des détails sur l'utilisation du JDAM-ER par l'Ukraine lors d'une table ronde organisée avec les médias hier lundi 6 mars en marge du 2023 Air and Space Forces Association's Warfare Symposium, qui s'est ouvert hier à Aurora, dans le Colorado.


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Le général James Hecker, de l'armée de l'air américaine. © USAF


"Récemment, nous avons fourni à l'Ukraine des munitions de précision à très grande portée, qui vont bien plus loin que les bombes à gravité et qui sont guidées avec précision", a déclaré le général Hecker. "Il s'agit d'une capacité récente que nous avons été en mesure de leur fournir, depuis ces trois dernières semaines".

Le général Hecker a confirmé qu'il parlait spécifiquement des bombes JDAM-ER. Son commentaire sur l'arrivée de ces armes en Ukraine il y a environ trois semaines concorde avec une information données par Bloomberg le 21 février, selon laquelle l'armée américaine travaillait à la livraison de telles armes.

Les kits JDAM standard sont conçus pour être montés sur divers types de bombes à gravité de la série Mk 80 et sur d'autres munitions dont la forme est compatible avec le kit JDAM. Ce kit, une fois associé à la bombe à gravité, la transforme en une arme guidée avec précision par la technologie GPS. Le kit JDAM complet se compose d'un nouvel empennage, qui contient un système de guidage inertiel assisté par GPS, et des ailettes qui s'étendent depuis le corps de la bombe, ce qui lui confère une capacité de planer avec un guidage GPS jusqu'à sa cible désignée au moment de son lancement.


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Graphique montrant les différents niveaux de bombes JDAM standard (de gauche à droite, deux variantes de classe de 2 000 livres (une tonne), un exemple de 1 000 livres et un type de classe de 500 livres), ainsi qu'un gros plan de l'une des sections de queue en haut à droite. © USAF

Un JDAM standard peut, en fonction de l'altitude à laquelle il est largué, atteindre des cibles situées à 25 km de distance. L'ajout du kit JDAM-ER (ER pour Extended Range) permet d'étendre la portée de l'arme à environ 70 km.


Vidéo YouTube sur l’arme JDAM-ER développée en Australie par Boeing-Australia (en Anglais)
Durée : 1min35


La configuration exacte des JDAM-ER que l'Ukraine a reçus jusqu'à présent n'est pas claire. Le général Hecker les a désignés sous le nom de GBU-62. Cependant, la seule variante JDAM connue de la GBU-62 semble être l’armeGBU-62-V-1-B, également connue sous le nom de Quickstrike-ER. Cette arme combine le kit JDAM-ER avec la mine navale Mk 64 Quickstrike d’une tonne et elle n’est pas à proprement parler une bombe. Bien que basées sur des bombes de la série Mk 80, les mines Quickstrike ne sont pas destinées à être utilisées comme armes de frappe polyvalente. Il semble plus probable que les JDAM-ER destinés à l'Ukraine contiennent des bombes plus traditionnelles. Il est possible que les "ogives" soient des mines Quickstrike reconverties en bombes standard.


Vidéo YouTube sur le lancement d’une mine navale Quickstrike-ER à partir d’un B-52.
Durée : 4min25


On ne sait pas non plus quels appareils les forces ukrainiennes vont utiliser pour lancer ces armes JDAM-ER. Le général Hecker a évoqué le JDAM-ER immédiatement après avoir souligné l’adaptation réussie des missiles américains antiradar à grande vitesse (HARM) AGM-88 sur des chasseurs MiG-29 Fulcrum et Su-27 Flanker de l'armée de l'air ukrainienne. Compte tenu du travail déjà réalisé et de l’expertise obtenue pour adapter les missiles US livrés ces derniers mois sur des chasseurs de conception soviétique, il est vraisemblable, que ce soient ces mêmes avions qui vont larguer dans les jours qui viennent des bombes JDAM-ER sur les positions russes. Les MiG-29 et les Su-27 représentent également l'essentiel des flottes d'aviation tactique de l'Ukraine. Un nombre limité de Su-24 Fencers pourraient également être transformés en vecteurs de JDAM-ER et même des Su-25 Frogfoots, dans une moindre mesure.

M. Hecker a également souligné que le nombre total de JDAM-ER dont dispose actuellement l'Ukraine est limité. "Ils en ont juste assez pour effectuer quelques frappes", a-t-il déclaré. La confirmation par le général Hecker que les forces ukrainiennes disposent de JDAM-ER intervient de manière intéressante alors que les spéculations vont bon train sur les médias sociaux ces derniers jours et qui semblent bien montrer des exemples d'utilisation de ces armes.


Vidéo sur Twitter – Une frappe massive sur les forces russes retranchées. On peut même voir l'onde de choc. Apparemment ce serait une bombe de grande puissance de type JDAM larguée par les ukrainiens.
© Internarium 24
Durée 12sec


Même un petit nombre de JDAM-ER posera de nouveaux défis aux forces russes. Une arme JDAM standard est une arme à guidage de précision, de type "je tire et j’oublie", qu'un avion peut lancer sur des cibles fixes par n'importe quel temps, puis aussitôt, bien avant que la bombe ne touche sa cible, l’avion fait demi-tour pour mettre le plus de distance entre lui et les défenses ennemies. La partie inertielle du système de guidage signifie que la bombe devrait conserver un degré important de précision même si le signal GPS est brouillé ou perdu. Le kit de voilure typique des JDAM-ER élargit la portée de l'arme et contribue à améliorer encore la capacité de survie.

Lors de la table ronde organisée aujourd'hui à l'intention des médias, le général Hecker a souligné que le JDAM-ER donne aux forces ukrainiennes la possibilité d'atteindre des cibles entièrement nouvelles qui pourraient être hors de portée des armes aériennes et des systèmes terrestres existants, notamment les systèmes HIMARS de roquettes d'artillerie à haute mobilité fournis par les États-Unis et les variantes et dérivés du système de roquettes à lancement multiple (MLRS) M270 fournis par d'autres pays.

Les HIMARS et les MLRS font partie des armes de frappe de précision à la plus grande portée de l'Ukraine, mais la portée maximale de leurs roquettes est d'environ 60 km. De plus, ces roquettes contiennent des ogives de 90 kg (200 livres). Les JDAM-ER aux mains des Ukrainiens pourraient potentiellement porter des ogives d’une tonne, ce qui leur conférerait une capacité de destruction beaucoup plus importante et élargirait considérablement les ensembles de cibles qu'ils pourraient détruire de manière fiable.

Le général Hecker a reconnu cependant que les circonstances auxquelles l'armée de l'air ukrainienne est actuellement confrontée pourraient l’empêcher d’utiliser les JDAM-ER à tout leur potentiel. "Je ne veux pas entrer dans les détails de la tactique, mais il est évident que plus on est bas et plus on est éloigné des missiles sol-air qui peuvent nous détecter en raison de la courbure de la terre, mais cela influe sur la distance que peut parcourir la bombe, a expliqué le général Hecker. "Il y a des tactiques qui permettent de descendre bas, de faire des choses … et de revenir".

Les pilotes ukrainiens pourraient encore être en mesure d'utiliser ces bombes JDAM-ER à leur pleine capacité ER en la libérant par une manœuvre pop-up. Cela permettrait à l'avion transportant l'arme de rester à des altitudes basses jusqu’au moment du tir de la bombe JDAM, ce qui contribuerait à la dissimuler aux défenses aériennes ennemies pendant la majeure partie de son vol.

Quoi qu'il en soit, les forces ukrainiennes ont désormais les moyens de mettre en péril des ensembles entiers de nouvelles cibles - y compris des ponts, de grandes structures, des emplacements de défense aérienne dispersés et des fortifications renforcées - à l'aide de JDAM-ER, et c'est peut-être déjà ce qu'elles font.




SECOND ARTICLE

LE COMMANDANT DE LA DEFENSE UKRAINIENNE PLAIDE POUR LA LIVRAISON D’AVIONS OCCIDENTAUX MAIS PAS DES A-10
Le dernier appel de l'Ukraine pour des avions comme le F-16 fait suite à des rapports pas confirmés officiellement selon lesquels l’Ukraine aurait déjà envoyé des pilotes aux États-Unis pour faire évaluer leurs compétences.

Par Joseph Trevithick, The War Zone, 7 mars 2023


Article original en Anglais


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Un vol de A-10 Thunderbolt II et de F-16 Viper au-dessus des Rocheuses. © USAF

Le ministre ukrainien de la défense, M. Oleksii Reznikov, a réitéré son appel aux partenaires internationaux du pays pour qu'ils lui fournissent au plus vite des avions de combat occidentaux plus modernes, tels que le F-16 Viper américain. Lors de cet appel, M. Reznikov a cependant annoncé que les appels lancés en Ukraine pour inciter les autorités américaines à livrer des avions d'attaque au sol A-10 Warthog n’étaient pas à l’ordre du jour.

Ces propos font suite à des informations selon lesquelles des pilotes ukrainiens se trouveraient actuellement aux États-Unis dans le cadre d'un échange d’évaluation de compétences, une appellation suffisamment vague pour laisser ouverte la possibilité de futurs transferts de F-16 Viper et/ou d'autres avions de combat occidentaux.

M. Reznikov a fait ces commentaires dans une interview accordée au média ukrainien Liga et publiée aujourd'hui, lundi 6 mars. Les remarques du ministre de la défense concernant le Warthog sont une réponse directe à un récent appel au transfert de ces appareils, ainsi que des hélicoptères d'attaque AH-64 Apache, lancé par M. Kyrylo Budanov, le commandant de la direction du renseignement de défense du pays. Le mois dernier, des informations officieuses fortement relayées indiquaient que M. Budanov était sur les rangs pour succéder à M. Reznikov en tant que ministre de la défense, ce qui en fait ne s'est pas produit.


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Une paire d'avions de combat F-16 Viper affectés au 56ème groupe de chasse de l'armée de l'air américaine affectés à la base aérienne de Luke en Arizona. © USAF

"Un avion est un engin qui est avant tout un élément de la défense aérienne", a déclaré M. Reznikov. "Par conséquent, nous avons besoin d'avions qui, en tant qu'éléments de la défense aérienne, sont capables de voir un avion ennemi dans les airs et de l'endommager, d'abattre un missile de croisière ou balistique et, si nécessaire, de frapper des cibles au sol (entrepôts, postes de commandement, accumulation d'équipements".

On notera que si les avions de combat, d'une manière générale, peuvent certainement jouer un rôle dans la lutte contre les missiles de croisière, leur utilisation pour abattre des missiles balistiques est une proposition beaucoup plus compliquée qui dépend d'un grand nombre de facteurs. Les forces armées ukrainiennes ont clairement intérêt à disposer d'une capacité supplémentaire pour contrer les missiles russes envoyés sur leur pays. L'armée ukrainienne dispose actuellement de capacités très limitées à cet égard et des inquiétudes persistent quant à la livraison potentielle de types de missiles de fabrication iranienne pour renforcer l'arsenal de la Russie. Les États-Unis et d'autres pays travaillent à la livraison de systèmes de missiles sol-air Patriot, qui contribueront plus directement à renforcer les capacités de l'Ukraine en matière de lutte anti-missiles balistiques.

En parlant du A-10, M. Reznikov ajoute : "Cet autre avion ne voit pas loin et est très lent. Il y en a beaucoup aux États-Unis, mais ils ne combattent plus. Ils sont vieux, ils n'ont pas de pièces de rechange et il est quasi-impossible de les entretenir. J'ai amplement discuté de ces avions A-10 avec les responsables américains en mars de l'année dernière".

M. Reznikov avait déjà indiqué au Washington Post dans une interview fin 2022, qu’il avait directement interrogé le secrétaire américain à la défense, M. Lloyd Austin, sur les A-10 américains disponibles. Il a indiqué qu'il avait rapidement laissé tomber l'affaire après que M. Austin eut exprimé ses inquiétudes quant à la vulnérabilité des Warthogs face aux défenses aériennes russes et qu'il lui eut fait part de l'état général des exemplaires actuellement stockés à la base aérienne de Davis-Monthan, en Arizona. Bien que l'armée de l'air américaine dispose officiellement d'un peu plus d’une centaine d'A-10, un mélange de modèles A et C, en stock, un grand nombre d'entre eux, en particulier les versions A (les plus anciennes, mises en service dans les années 1970), ne peuvent pas voler et sont utilisés comme sources de pièces détachées pour les Warthogs encore en service.


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Un exemple de l'état de nombreux A-10 stockés sur la base aérienne de Davis-Monthan en Arizona. © USAF


La possibilité de fournir des avions de combat supplémentaires, en particulier des chasseurs, qu'il s'agisse de nouveaux types occidentaux ou d'anciens modèles soviétiques que l'armée de l'air ukrainienne connaît déjà, est une véritable saga depuis des mois. De nombreuses propositions émanant de différents pays, dont certaines ont été faites très publiquement, ont été proposées et sont restées lettre morte sans qu'aucun progrès réel n'ait été réalisé en ce qui concerne l'envoi d'avions à l'Ukraine.

Toutefois, l'arrivée de pilotes ukrainiens aux États-Unis, et l'annonce que dix autres devraient les suivre, pourraient être le signe d'une avancée réelle dans ce domaine. La chaîne NBC a annoncé pour la première fois au cours du week-end qu'il était prévu d'évaluer les compétences de ces aviateurs ukrainiens afin de déterminer le temps qu'il leur faudrait pour apprendre à piloter le F-16.

"Le programme vise à évaluer leurs compétences en tant que pilotes afin que nous puissions mieux les conseiller sur la manière d'utiliser leurs capacités avec ce que nous pourrions leur ", a déclaré un fonctionnaire souhaitant rester anonyme de l'administration du président Joe Biden, selon NBC.

"Cette étape de familiarisation est essentiellement une discussion entre le personnel de nos deux armées de l'air et une familiarisation des pilotes ukrainiens au fonctionnement de l'armée de l'air américaine", a ajouté un fonctionnaire anonyme de la défense, selon NBC. "Cette étape nous permettra de mieux aider les pilotes ukrainiens à devenir des pilotes plus efficaces et de mieux les conseiller sur la manière de développer leurs propres capacités".

Les fonctionnaires interviewés par NBC ont souligné que cet échange, qui comprendra apparemment un passage des pilotes ukrainiens dans "un simulateur de vol qui peut imiter le pilotage de différents types d'aéronefs utilisés par l’USAF", n'est pas un programme formel d'entraînement au vol. M. Colin Kahl, sous-secrétaire à la défense chargé de la politique, avait parlé lors d'une audition au Congrès la semaine dernière, des estimations du Pentagone sur le temps nécessaire pour former un aviateur militaire ukrainien au pilotage d'un appareil tel qu'un F-16, à savoir plus d’un an.

M. Kahl avait déclaré aux législateurs que, selon l'évaluation actuelle du Pentagone, une telle formation prendrait environ 18 mois, ce qui est en bonne adéquation avec le temps qui serait nécessaire pour effectuer la livraison d'un lot de Vipers aux Ukrainiens, une fois la décision de le faire prise.

"Selon notre évaluation, on ne gagne donc pas de temps en commençant l'entraînement trop tôt", a déclaré M. Kahl. "Et comme nous n'avons pas pris la décision de fournir des F-16 et que nos alliés et partenaires ne l'ont pas fait non plus, il n'est pas logique de commencer à former aujourd’hui des pilotes ukrainiens sur un système qu'ils n'obtiendront peut-être jamais".

M. Kahl a également indiqué, lors de cette audition, que les ukrainiens avaient demandé 128 avions de combat - un mélange de F-15 Eagles, de F-16 Vipers et de F/A-18 Hornets - à laquelle le gouvernement américain n'a manifestement toujours pas donné son accord. "Notre armée de l'air estime qu'à long terme, l'Ukraine aurait probablement besoin de 50 à 80 F-16 pour remplacer sa force aérienne actuelle", a-t-il ajouté.


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Un pilote du 56ème groupe de chasse de l'armée de l'air américaine présente à un civil le simulateur du chasseur F-16. © USAF

Dans le même temps, une évaluation réelle des compétences générales existantes des pilotes ukrainiens est exactement le genre de chose que l'on voudrait faire pour avoir une meilleure idée du temps qu'il faudra réellement pour les former à un nouveau type d'aéronef comme le F-16. En février, le gouvernement britannique a également confirmé son intention de contribuer à la formation des pilotes ukrainiens, mais on ne sait toujours pas exactement en quoi consiste cet effort particulier.

L'été dernier, le colonel Yuri Ignat, principal porte-parole de l'armée de l'air ukrainienne, a déclaré à Air Force Magazine que l'Ukraine disposait d'une trentaine de pilotes maîtrisant l'anglais, ainsi que de personnel de maintenance, qui pourraient facilement être envoyés aux États-Unis pour y suivre une formation. Mais il existe de nombreux obstacles, essentiellement politiques, à cette démarche.

La position actuelle du gouvernement américain, telle qu'elle est défendue par des responsables comme M. Kahl et même par le président Biden lui-même, est qu'un transfert de F-16, ou de quelque chose de similaire, n'est pas du tout à l'ordre du jour actuellement et n'est pas considéré comme une priorité absolue dans l’aide à apporter à l’Ukraine dans sa lutte contre l’agresseur russe. Dans le même temps, les autorités américaines n’ont jamais refusé d'exclure complètement la possibilité que cette politique change du tout au tout à l'avenir.

Depuis le début de l'année, un certain nombre d'informations font état de divers pays européens envisageant d'envoyer des avions de combat occidentaux plus modernes dans le cadre d'un effort plus large de la coalition. Cette position nouvelle de livraison d’avions occidentaux à l’Ukraine pourrait bien être la conséquence de l’accord de livrer des chars lourds occidentaux à l’Ukraine, accord qui a résulté des échanges prolongés de l'année dernière entre les partenaires internationaux de l'Ukraine. Les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Allemagne et d'autres pays sont en train d'envoyer différents types de chars lourds occidentaux à l'armée ukrainienne dans le cadre d'un effort coordonné.

Il reste à voir ce qu'il adviendra des évaluations en cours de ces pilotes ukrainiens aux Etats-Unis. Comme le note NBC dans son reportage, ce type d'échanges s'était déjà produit avec une certaine régularité avant l'invasion de la Russie en février 2022 et n'avait débouché sur aucun projet d'acquisition d’avions occidentaux par l'armée de l'air. Bien entendu, ces échanges ont eu lieu dans des circonstances très différentes.
En conclusion, les commentaires très clairs du ministre de la défense ukrainien M. Reznikov aujourd'hui montrent bien que le gouvernement ukrainien considère toujours l'acquisition d’avions de combat occidentaux comme l'une de ses principales priorités, mais pas l'A-10 !

FIN

#77 Re : Actualité de l'aéronautique » [Réel] GéopAéro - Un avion radar russe frappé en Biélorussie ? » 08/03/2023 09:18

Rebonjour,
Juste un petit passage en coup de vent ... une première (très rapide et très succincte) réponse à l'ami Brice qui écrivait:

   

bricedesmaures a écrit :

On peut même suggérer à Philou un sujet sur les AWACS chinois sur une base de Tupolev 4, avion conçu par un brillant rétro-engineering de B 29...

Voili voilou:

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#78 Re : Actualité de l'aéronautique » [Réel] GéopAéro - Un avion radar russe frappé en Biélorussie ? » 08/03/2023 09:13

Bonjour chers amis pilotevirtuelistes,
Il y a du nouveau sur cette attaque de l'avion radar russe en février dernier.
Le président de la Biélorussie A. Loukachenko a reconnu l'attaque et le fait que l'A-50 russe a bien été endommagé.
Je vous ai traduit un article assez court du New York Times d'aujourd'hui 8 mars.
Bonne lecture,
Philippe



LE DIRIGEANT BIELORUSSE ACCUSE LES SERVICES DE RENSEIGNEMENT UKRAINIENS D'AVOIR ATTAQUE UN AVION RADAR RUSSE

Par Andrew Higgins (du NYT) et Tomas Dapkus (de Vilnius, Lithuanie), The New York Times, 8 mars 2023

Le président Alexandre G. Loukachenko, l'imprévisible homme fort de la Biélorussie, a accusé hier mardi 7 mars les services de renseignement ukrainiens d'avoir tenté de saboter le mois dernier un avion russe sur une base aérienne proche de sa capitale.

Le ministère ukrainien des affaires étrangères a immédiatement nié tout rôle de l'Ukraine dans l'opération de sabotage et a accusé le Belarus d'avoir "une nouvelle fois tenté de créer une menace artificielle à partir de l'Ukraine afin de justifier son soutien à l'agression russe".

L'attaque de drone menée en février sur la base aérienne de Machoulishchi, près de Minsk, la capitale de la Biélorussie, est restée entourée de mystère et a suscité la crainte que M. Loukachenko, un dictateur très imprévisible et excentrique, ne l'utilise comme prétexte pour se joindre à la guerre menée par la Russie en Ukraine. La cible était un avion de surveillance russe Beriev A-50 stationné sur un point de stationnement éloigné.

Les autorités biélorusses avaient d’abord affirmé que la tentative de sabotage, revendiqué par un groupe biélorusse anti Loukachenko, n'avait en fait jamais eu lieu, tandis que des militants de l'opposition biélorusse en exil affirmaient qu'ils avaient bien eu lieu.

Mais hier mardi, M. Loukachenko a déclaré qu'un des "terroristes" responsables de cet attentat avait été arrêté en Biélorussie avec "plus de 20 complices". Il a fait ces remarques lors d'un discours prononcé devant le personnel de sécurité et parsemé d'insultes à l'égard du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, qu'il a notamment traité de "nigaud".

M. Loukachenko a déclaré que l'auteur de l'attaque était un informaticien de la ville natale de M. Zelensky, M. Kryvyi Rih, qui avait été recruté par l'agence de renseignement ukrainienne, connue sous le nom de Service de sécurité de l'Ukraine (S.B.U.), en 2014. Il a accusé l'Ukraine d'essayer de "nous entraîner dans la guerre sur ordre des Américains".
Au pouvoir depuis 1994 et dépendant de Moscou pour l'argent, l'approvisionnement en énergie et l'aide à la sécurité, M. Loukachenko imite souvent les affirmations du président russe Vladimir V. Poutine selon lesquelles toutes les actions de l'Ukraine sont dictées par les États-Unis.

Le ministère biélorusse de l'intérieur a ensuite publié une vidéo de ce qu'il a déclaré être des aveux du suspect de 29 ans, qui a donné son nom comme étant Nikolai V. Shvets et a déclaré qu'il avait utilisé deux drones pour perpétrer l'attaque. Une autre vidéo publiée sur la chaîne du ministère sur Telegram montre des agents de sécurité biélorusses armés faisant irruption dans une maison en briques et saisissant M. Shvets torse nu.

M. Loukachenko a semblé désireux de calmer les inquiétudes selon lesquelles il pourrait utiliser l'attaque de drone de février comme prétexte pour entrer directement en guerre ou que la Russie pourrait l'utiliser pour forcer la Biélorussie à envoyer ses troupes dans la guerre. L'Ukraine et les États-Unis, a-t-il déclaré, veulent pousser la Biélorussie dans le conflit, mais ceux qui pensent que cela se produira "se trompent".

L'Ukraine reconnaît rarement son rôle dans les actions armées menées au-delà de ses frontières. Elle a été quelque peu protégée des accusations d'implication dans l'opération biélorusse par les déclarations d'activistes biélorusses en exil qui affirment avoir mené l'attaque seuls.

Dans un article d'opinion paru mardi dans The Guardian, la dirigeante de l'opposition biélorusse Svetlana Tikhanovskaya a insisté sur le fait que "nos partisans anti-guerre" étaient à l'origine de l'attaque. Son mouvement d'opposition ne dispose toutefois d'aucune capacité militaire connue en Biélorussie.

Les experts ont écarté la possibilité que les partisans de Mme Tikhanovskaya aient perpétré l'attentat, tout en estimant qu'il était possible qu'une opération ukrainienne ait reçu l'aide de militants antigouvernementaux au Belarus.

L'incertitude règne également quant à l'ampleur des dégâts causés par l'attaque. Les exilés biélorusses ont déclaré que les drones avaient causé de graves dommages, mais une analyse des images satellite réalisée par le New York Times a montré que la structure de l'avion était intacte, même si une tache sombre sur le radar de l'avion indiquait qu'il avait été endommagé.


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Images satellite de l’avion russe A-50 sur la base aérienne biélorusse de Machoulishchi prise l'une le 23 février (avant l'attaque) et l'autre le 28 février, donc après l’attaque par des drones. © Maxar Technologies, USA

#79 Actualité de l'aéronautique » [Réel] GéopAéro - Un avion radar russe frappé en Biélorussie ? » 27/02/2023 13:01

philouplaine
Réponses : 13

Géop’Aéro … Qu’est-ce donc ? Dénicher (et traduire pour vous) dans les revues internationales, surtout américaines, des articles qui montrent bien l’importance de l’élément aéronautique dans les grands problèmes de géopolitique actuels, pour dénicher des choses intéressantes (j'espère) à raconter ...


Bonjour chers amis,

Je vous ai traduits, dans l’urgence car l’information est très importante à mon sens et lourde de conséquences, deux articles tout chauds sur une attaque par drones d’une base aérienne biélorusse … attaque menée par, selon les informations fragmentaires disponibles, des saboteurs biélorusses et pas ukrainiens !
Cette attaque aurait causé la destruction d’un A-50 de détection radar et de commandement qui, entre deux missions contre l’Ukraine, y était parqué ... apparemment toujours au même endroit.
J’ai pensé que cette information pourrait vous intéresser
Une réflexion personnelle qui explique pourquoi je range ce post dans la rubrique de géopolitique. Je ne peux m’empêcher de penser ici à l’opération Himmler qui mena à l’incident de Gleiwitz le 31 août 1939. Cette opération commando, montée de toutes pièces par les nazis, était une attaque menée par des soldats SS habillés d’uniformes polonais et équipés d’armes polonaises contre un émetteur radio situé à Gleiwitz alors en territoire allemand. Cette opération servit de prétexte pour déclencher l'invasion de la Pologne le lendemain. Et si ces saboteurs « biélorusse » étaient en fait des russes pour forcer/excuser l’entrée en guerre de la Biélorussie contre l’Ukraine ? Chaud devant semble-t-il …

Bonne lecture !
Philippe





PREMIER ARTICLE

UN AVION RADAR A-50 RUSSE ENDOMMAGE EN BIELORUSSIE
L'un des avions militaires les plus prisés de la Russie, l’A-50 Mainstay, aurait été frappé par des actes de sabotage sur sa base avancée en Biélorussie.
Par Tyler Rogoway, The War Zone, 26 février 2023[


Article original en Anglais


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Vue satellite de la base aérienne biélorusse de Minsk-Machoulishchy prise le 19 février dernier avec sur le tarmac un A-50 russe. ©2023, Planet Labs Inc.


Ce dimanche, les réseaux sociaux ont fait grand bruit à propos d'une attaque contre un avion russe A-50 Mainstay de détection précoce et de contrôle alors qu’il était parqué sur la base aérienne de Machoulishchy, située à 5 km au sud de Minsk, en Biélorussie. Nous ne pouvons pas encore confirmer que cette attaque s'est réellement produite ni la nature des dommages qui auraient été causés à l'A-50. Ce type d'appareil est un visiteur régulier de cette base biélorusse depuis le début de la guerre entre la Russie et l’Ukraine.

Si cette action s'est réellement produite et si l’A-50 visé a été endommagé, alors ce serait une perte importante pour l'armée de l'air russe et, selon la manière dont elle a été menée, cela pourrait être le signe d'un nouveau front dans cette guerre qui dure depuis maintenant un an.

L'image satellite présentée en introduction de cet article a été prise le 19 février dernier. Elle montre l'A-50 à son emplacement habituel sur la base aérienne biélorusse. Selon diverses affirmations, l'avion, une variante du quadriréacteur de transport de marchandises Il-76, a été attaqué par un plusieurs drones et endommagé, voire même détruit. Certains réseaux indépendants biélorusses et ukrainiens affirment que cette attaque a été menée par un groupe de partisans biélorusses à l'intérieur de la Biélorussie, ce qui serait un développement important de cette guerre si cela s'avérait vrai.


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Le Beriev-Iliouchine A-50U (code OTAN Mainstay) mis en service en 1884 toujours en service. Les forces aériennes russe disposent entre 15 et 30 de ces avions. L’équipage complet est de 15 hommes. © Ministère russe de la Défense


La cible ici est très importante, quoi qu'il en soit. Les A-50 sont des appareils à très faible densité et à forte demande et constituent l'un des principaux avantages de la Russie sur l'Ukraine en termes de guerre aérienne. L'A-50 fournit une surveillance aérienne générale à grande échelle et des capacités de commandement et de contrôle aéroportées. En outre, et c'est sans doute le plus important, il fournit une capacité critique de surveillance radar fournissant une alerte précoce à haute résolution et des informations vectorielles sur les avions ukrainiens volant à basse altitude que les radars terrestres éloignés ne peuvent pas voir. Il s'agit là du principal souci actuel pour les avions ukrainiens se trouvant à proximité de la "superposition" de l’espace aérien contrôlé par un A-50 et des capacités anti-aériennes à longue portée S-400 de la Russie, un dispositif qui s'étend profondément dans le territoire contrôlé par l'Ukraine.

Cette capacité d'observation vers le bas pourrait devenir encore plus importante pour les Russes qu'elle ne l'est déjà, notamment dans des applications défensives, si l'Ukraine acquiert davantage de capacités de frappe à distance sous la forme de missiles de croisière et de drones à longue portée, ce qui semble de plus en plus probable.


Vidéo YouTube : Un A-50U effectue un exercice d'interception aérienne avec des chasseurs russes.
Durée 1min


Les capacités en A-50 sont très limitées pour la Russie. On pense que seulement une dizaine d'entre eux (Les forces aériennes russes disposeraient de 20 à 30 appareils au total) sont opérationnels à tout moment, certaines sources militaires américaines affirment même que ce nombre est en réalité très nettement inférieur. Mais même un petit nombre de ces A-50 de détection et de commandement est capable d'effectuer des missions importantes à un moment donné. Par exemple, les Russes n’ont déployé en Syrie qu’un seul A-50.

Le remplacement de la flotte des A-50 par le nouvel avion radar Beriev-A-100, très ressemblant mais bien plus performant, est fortement retardé. Ce programme a été particulièrement impacté par les sanctions des Occidentaux suite à cette guerre.


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Le prototype du Beriev A-100 en vol. Il a effectué son premier vol le 18 novembre 2017. © United Aircraft Corporation of Russia


Ainsi, la mise hors service d'un seul A-50, même si ce n'est que pour un temps limité, serait une perte significative pour l'armée de l'air russe. Si cela s'est effectivement produit, la façon dont cela s'est produit est peut-être plus importante encore. Certains affirment que cette attaque aurait été menée par des groupes de partisans biélorusses. Il convient également de noter que l'Ukraine dispose de ses propres agents qui travaillent dans les coulisses en plein territoire biélorusse.

La défense contre une telle attaque au cœur de la Biélorussie, dans les faubourgs de Minsk, est extrêmement faible, des drones commerciaux modifiés étant capables d'exécuter une telle opération avec facilité pourvu que l’opérateur soit sur place. Une attaque localisée comme celle qui est décrite ici est très difficile à détecter et encore plus difficile à contrer, et la Russie n'est pas connue pour être un leader en matière de capacités de lutte contre les drones. En fait, le commandement russe a décidé de commencer à se protéger des attaques ukrainiennes par drones qu'après des pertes importantes d'avions.
L'Ukraine étant susceptible d'acquérir de nouvelles capacités de frappe à longue portée, la puissance aérienne russe pourrait bientôt être davantage menacée au sol dans toute la région, mais le fait que des groupes d'opposition infiltrés opèrent à proximité des bases russes en Biélorussie constitue une toute nouvelle menace bien plus grande.

Il n'est absolument pas surprenant que l'A-50 soit en tête de liste des cibles. Sa valeur au combat, sa rareté et la capacité qu'il fournit à la Russie dans sa guerre contre l'Ukraine, sans parler de sa taille et de son emplacement une fois parqué (qui était toujours le même sur la base biélorusse de Machoulishchy), auraient motivé son ciblage comme prioritaire.

Maintenant, si cette attaque s'avère réelle - et il pourrait très bien que ce ne soit pas réel ou que l’A-50 ait bien été attaqué mais pas atteint), alors la grande question est de savoir s'il s'agit d'un événement isolé, ou si ce n’est que le début d’autres actions du même genre à venir ? La grande question est de savoir s'il s'agissait d'un événement isolé ou non.

Il y a aussi la question des retombées géopolitiques potentielles. L'homme fort de la Biélorussie, son dirigeant Alexandre Loukachenko, a permis dès le 24 février à la Russie, dont son pays est plus ou moins un État client, de lancer son opération contre l'Ukraine depuis le territoire biélorusse. Il a également autorisé depuis le sol biélorusse les opérations aériennes russes à se poursuivre depuis des bases de son pays y compris des missions de surveillance menées par les A-50, des frappes de missiles à distance, et des opérations anti-aériennes à longue portée contre les avions ukrainiens. Mais même si la Russie arme le Belarus en échange d'un accès et d'une obéissance, Loukachenko a déclaré à plusieurs reprises qu'il n'enverrait pas de troupes en Ukraine à moins que la Biélorussie ne soit attaquée. Il n'est pas certain qu'une frappe comme celle d'aujourd'hui puisse être considérée comme un tel acte d’agression.

Mise à jour à 2h30 du matin le 27 février : c’est confirmé !

Nous avons voulu faire un point récent sur certaines des affirmations qui circulent au sujet de cette supposée attaque. On sait désormais, depuis quelques minutes, queL'A-50 russe a été "détruit totalement sur la base aérienne de Machoulishchy" par des drones opérés par des partisans biélorusses opposés au gouvernement actuel de Loukachenko, selon le canal Telegram de BYPOL, une organisation de dissidents militaires biélorusses opposés au gouvernement actuel de Loukachenko.
"À la suite de deux explosions (les lieux sont indiqués sur la photo), les parties avant et centrale de l'avion ont été atteintes, l'avionique et l'antenne radar a été endommagée", a BYPOL. "Les dégâts sont sérieux, l'avion ne volera certainement plus nulle part".

L'incident "s'est produit alors que des chasse-neiges travaillaient près de l'avion. Probablement, comme cela s'est produit à plusieurs reprises dans des installations militaires russes, quelqu'un n'a pas respecté les mesures de sécurité incendie et a fumé près de l'avion et y aura mis le feu, non ? Les partisans biélorusses ont toujours expulsé les russes nazis de leur terre. Il s'agissait en fait d’une attaque de plusieurs drones. Les participants à l'opération sont tous Biélorusses, des membres du groupe antirusse 'Victoire', ils sont maintenant en sécurité en dehors du pays".

Le directeur de l'association "ByPol", Alexandre Azarov, a déclaré que : "l'opération était préparée depuis plusieurs mois, et a exprimé l'opinion que les autorités actuelles de Minsk ne feront pas de cette attaque une excuse pour la participation directe de l'armée biélorusse à la guerre en Ukraine",

Les canaux Telegram des ministères de la Défense russe, biélorusse et ukrainien n'ont pas encore fait état de ces attaques.
"Une information urgente concernant des explosions près de Minsk est confirmée", a rapporté le canal Telegram WarGonzo, un réseau pro-russe. "L'information est confirmée à l’instant. Très probablement, il s'agit d'attaques de drones sur des infrastructures militaires de la base, y compris peut-être des avions russes qui s’y trouvaient. Nous ne disposons pas de données plus précises. Nous attendons une confirmation officielle."





SECOND ARTICLE


SABOTAGES BIELORUSSES A MACHOULISHCHY/b]

[b]Par Kateryna Tyshchenko, Ukraina Pravda, 26 février 2023, édition du soir

Sources : Le réseau Telegram biélorusse d’opposition BYPOL d’Alexander Azarov, et le média biélorusse indépendant Belaruski Hajun [un média indépendant d’information militaire biélorusse].

Des partisans biélorusses ont effectué un sabotage sur la base aérienne de Machoulishchy en Biélorussie, à la suite duquel un avion militaire russe a été fortement endommagé. M. Azarov a déclaré dans un commentaire à Belaruski Hajun qu’un avion russe A-50 parqué à Machoulishchy a été attaqué depuis les airs. L'attaque a été menée à l'aide de drones par les membres du groupe "Victoire" qui sont maintenant en sécurité en-dehors de la Biélorussie. Selon M. Azarov, l'opération était préparée depuis plusieurs mois.

Selon BYPOL, les parties avant et centrale de l'appareil, l'avionique et l'antenne radar de l'A-50U russe ont été endommagées à la suite de deux explosions. Belaruski Hajun indique que cet A-50U modernisé porte le numéro d'immatriculation RF-50608 (Le "43 rouge" numéro d'usine 0093479377, numéro de série 60-05). Cet avion était arrivé en Biélorussie le 3 janvier dernier et opère donc depuis la Biélorussie depuis 54 jours. Il a déjà effectué 12 missions. Ce même appareil avait déjà été déployé en Biélorussie auparavant, dès le 24 février 2022.

Selon le média Belaruski Hajun, les forces aériennes et spatiales de la Fédération de Russie ne comptent actuellement que neuf appareils de ce type en service, et seulement six appareils améliorés (avec la modification "U"). L’A-50U a un équipage de 19 personnes (cinq pour le vol, 11 pour la radio et trois pour l'ingénierie de détection). Selon le Belaruski Hajun, un A-50U coute environ 330 millions de dollar.

#80 Vos expériences et vos récits aéronautiques » [Réel] Récit d’un pilote de chasse ukrainien » 18/02/2023 17:45

philouplaine
Réponses : 0

Bonjour chers amis,

Suite à mes posts sur les avions américains que pourrait recevoir l’Ukraine,

ici pour des F-16  et là pour des A-10

Je vous ai traduit le récit sur la guerre russo-ukrainienne d’un pilote de chasse ukrainien en décembre dernier …
J’ai pensé que ce qu’il avait à dire pourrait vous intéresser.

Et dans ce récit, Fuchs pourra même voir avec plaisir que ce qu’il proposait :

Fuchs a écrit :

Si le but est de leur fournir un moyen défensif afin de repousser et détruire les Russes pourquoi ne pas leur donner des AH-64?

… est aussi dans les tuyaux du côté ukrainien … car la modernisation de l’équipement de l’aviation de l’armée de terre ukrainienne et surtout de son équipement en hélicoptères de combat même si on en parle que très peu dans les médias occidentaux est quelque chose qui est très vif dans l’esprit des responsables ukrainiens.

Les illustrations sont, pour la grande majorité, celles de l’article original.

Bonne lecture
Philippe




LE RECIT D'UN PILOTE DE MIG29 SUR LA GUERRE AERIENNE AU-DESSUS DE L'UKRAINE

Le pilote ukrainien de MiG-29 "Juice" détaille la guerre aérienne qui se déroule au-dessus de son pays, une guerre en rapide mutation où les tactiques et les capacités changent rapidement.

Par Thomas Newdick, 15 décembre 2022


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Le pilote de chasse "Juice" aux commandes de son MiG-29. © Force Aérienne Ukrainienne


Dans cette interview exclusive, neuf mois après le début de la guerre russo-ukrainienne, le pilote de chasse MiG-29 Fulcrum de l'armée de l'air ukrainienne, dont l'indicatif d'appel est "Juice", nous fait un point détaillé sur la guerre aérienne en cours au-dessus de son pays.

Depuis les combats aériens frénétiques des premières semaines de la guerre, la nature de la menace russe a évolué, tandis que la partie ukrainienne a introduit de nouveaux systèmes de défense aérienne basés au sol et que l'armée de l'air a assumé de nouvelles missions, principalement la suppression des défenses aériennes ennemies. Au cours d'un large débat, Juice a également fait part de ses réflexions sur les perspectives de voir l'armée de l'air ukrainienne obtenir enfin les nouveaux avions de combat et autres armements dont elle a cruellement besoin.


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Un vol d'entraînement impliquant des MiG-29 monoplaces et biplaces. Juice vole en tête, avec le drapeau ukrainien dans le cockpit. © Yurii Kysil


Missions actuelles des MiG-29 ukrainiens

Pour Juice, la majorité de ses sorties concernent l'interception locale d'une menace. Cependant, en fonction des besoins, il est parfois envoyé dans des zones plus éloignées où la puissance aérienne est particulièrement demandée, notamment dans les régions de Mykolaiv et de Kherson, dans le sud du pays.

Les missions d'escorte font également partie de son travail, afin de protéger les ressources air-sol lorsqu'elles travaillent plus près des lignes de front. Une vidéo récente montrait une paire d’avions d'appui rapproché Su-25 Frogfoot accompagnés à basse altitude par un MiG-29. Juice explique qu'il ne s'agissait pas d'une mission réelle, mais d'une formation de "parade" mise en place au retour des lignes de front. "Il n'est absolument pas efficace de voler comme cela sur le champ de bataille", nous indique Juice. "Bien sûr, je ne suis pas autorisé à vous dire quelles sont les vraies tactiques que nous mettons en oeuvre, mais c’est absolument différent".

En ce qui concerne l'état de la flotte de MiG-29, les principaux problèmes sont d'ordre logistique et de maintenance. Il s'agit de maintenir les avions prêts au combat en permanence sur des sites répartis dans tout le pays, y compris des aérodromes "de fortune" très camouflés. Juice nous dit qu'il n'y a pas pour l’instant de "problèmes vraiment critiques" et que les pièces de rechange fournies par les alliés occidentaux à partir de leurs stocks ont été d'une grande aide. "Parfois, c'est même du matériel de meilleure qualité que celui que nous avions auparavant quand il s'agit de systèmes modernisés, mais malheureusement, bien sûr, nous avons encore des pertes." La flotte globale d'avions de chasse ukrainiens diminuant, les responsables de la maintenance et les ateliers de réparation de l'État sont contraints de remettre à neuf un nombre croissant de vieux avions à réaction qui étaient hors service depuis longtemps.

Les tueurs de radars

Outre la chasse aux drones et aux missiles russes, une autre nouvelle mission pour les MiG-29 (et les Su-27) ukrainiens consiste à utiliser le missile antiradar américain à grande vitesse AGM- 88. Juice n'a pas encore effectué de mission où il aurait eu à lancer des missiles HARM (NdT - HARM pour High-speed Anti-Radiation Missile), mais il ne tarit pas d'éloges sur cette arme et les nouvelles capacités qu'elle apporte aux combats récents sur le terrain.

"Après la livraison des HARM, la maintenance et la remise en état d'un plus grand nombre d’avions pour ces missions sont devenues une nouvelle priorité pour notre armée de l'air, parce que cela fonctionne vraiment et que c'est très utile pour nos opérations conjointes", explique Juice. "Après cela, notre force aérienne est devenue beaucoup plus performante".
Juice considère également que la formation des pilotes à la maîtrise du missile tueur de radar n'est "absolument pas un problème... Je peux le faire ici et maintenant, il suffit de me les donner".

En fait, la disponibilité de l’armement américain HARM implique que l'armée de l'air ukrainienne peut commencer à imiter les opérations tactiques occidentales, avec des séries de missions de type SEAD de suppression des défenses anti-aériennes ennemies (NdT – Une  mission SEAD  pour Suppression of Enemy Air Defenses, vise à supprimer les défenses aériennes ennemies basées en surface, y compris non seulement les missiles sol-air (SAM) et l'artillerie anti-aérienne, mais aussi les systèmes connexes tels que les radars d'alerte précoce et les centres de commandement tout en marquant d'autres cibles à détruire par une frappe aérienne. Dans les récentes campagnes de l’armée américaine, les missions SEAD ont représenté jusqu'à 30 % de toutes les sorties lancées au cours de la première semaine de combat. Bien qu'elles soient principalement menées par des missions aériennes, les missions SEAD peuvent être aussi exécutées en combinaison avec des forces terrestres).

Bien entendu, les capacités de combat aérien de l’armée ukrainienne sont encore fortement limitées. Juice nous a expliqué les principales pièces manquantes du puzzle : les munitions air-sol guidées avec précision, les missiles air-air à radar actif et les radars de combat avancés. "Nous essayons de faire de notre mieux avec ce que nous avons et, dans l'ensemble, la situation semble bien meilleure qu’au début de la guerre", nous dit Juice. Il a notamment observé avec intérêt comment les blogueurs militaires russes ont réagi au HARM. Il nous dit dans un sourire : "Ils sont très, très en colère à cause de nos succès. Et surtout leurs civils qui croyaient vraiment qu'il n'y avait pas de force aérienne digne de ce nom en Ukraine et pas de défense aérienne du tout."


Vidéo YouTube – Un MiG-29 ukrainien tire un missile américain AGM-88 antiradar à grande vitesse (HARM)
Durée 1min40


Évolution des GBADS ukrainiens

Disposer de missiles antiradars était ce que Juice avait déclarées comme prioritaire lors de notre entretien de mars dernier. À l'époque, il avait également indiqué que l’armée ukrainienne avait un besoin urgent de systèmes de défense aérienne basés au sol (NdT - Les fameux GBADS pour Ground-Based Air Defence Systems) plus avancés, ce qui a commencé à être fait avec la livraison par les Occidentaux d’armements de type de NASAMS norvégiens, IRIS-T allemands, Crotale français et autres.


Une note de l’OTAN sur l’évolution prévue pour 2020-2024 des GBADS (en Anglais)


Selon Juice, le fait que des systèmes occidentaux comme ceux-ci soient maintenant entre les mains des Ukrainiens est le reflet du succès des campagnes de plaidoyer et de communication publique que l’Ukraine a conduites récemment, qui ont amené Juice à se rendre au Capitole et au Pentagone pour expliquer exactement le type d'armes dont l'Ukraine avait besoin pour continuer à inverser le cours de la guerre.


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Le pilote de chasse ukrainien Juice à Washington en juillet dernier pour demander des avions modernes aux Etats-Unis. © Nancy Cole


"Heureusement, nous avons prouvé que nous avions vraiment, vraiment besoin de ces systèmes et nous avons donc obtenu les systèmes NASAMS, IRIS-T, HAWK, Avenger et Crotale." Si le NASAMS et l'IRIS-T SLM ont "déjà prouvé leur efficacité", l'obtention de l'Avenger, en particulier, est une victoire pour Juice, en raison de sa flexibilité et de sa capacité à abattre des drones comme le Shahed. Il en va de même pour la livraison de mitrailleuses lourdes avec viseur à imagerie thermique que les États-Unis ont approuvée pour l'Ukraine le mois dernier.

Pour ce qui est de l'avenir, M. Juice note que la livraison par la France du système de missiles sol-air SAMP/T Mamba qui a, outre sa capacité à abattre des missiles de croisière, une capacité anti-missiles balistiques, est potentiellement prévue et que de nouveaux lots de NASAMS et d'IRIS-T SLM sont attendus avec impatience.
"Nous sommes reconnaissants à tous les alliés qui nous ont fourni ces outils qui nous étaient indispensables", ajoute Juice. "Mais malgré tout, le nombre optimal de ces systèmes est trop important. C'est pourquoi nous espérons toujours que les pays occidentaux nous aideront en fournissant quelques lots supplémentaires. Et j'espère qu'à partir de ce petit lot de quatre Avengers, nous en recevrons beaucoup plus par la suite. J'espère que vous les verrez aussi bien protéger nos centrales électriques que notre ligne de front."

Le visage changeant de l'ennemi

En mars, Juice nous avait dit qu’il constatait que les forces aériennes russes étaient peu disposées à s'engager avec l’ennemi ukrainien, à moins que les chances ne soient très nettement en leur faveur comme dans des dogfights à 5 contre 1. Il semble que, sept mois après, peu de choses aient changé à cet égard, selon notre pilote de MiG.

Néanmoins, l'Ukrainien admet que l'ennemi russe est devenu beaucoup plus rusé, tirant les leçons de ses lourdes pertes au cours des premières semaines de la campagne. Les Russes maintiennent toujours des patrouilles aériennes de combat 24 heures sur 24 avec des avions de chasse, qui sont soutenus par des avions d'alerte avancée Beryev A-50 Mainstay et des avions de renseignement électromagnétique Iliouchine Il-20 CootA. Les Il-20, très utilisés par les Russes, sont également utilisés par les Ukrainiens.

Outre l'Il-20, capable d'espionner les émissions électroniques et radio ukrainiennes, son dérivé l’Iliouchine Il-22PP Mute a également été régulièrement utilisé. L'Il-22PP ajoute une capacité de brouillage à distance et vise principalement les radars de défense aérienne. Il fait partie d'une vaste flotte russe de guerre électronique qui comprend également des hélicoptères de brouillage, ainsi que des avions Su-24MR Fencer-E et Su-34 Fullback équipés de nacelles de collecte de renseignements et de brouillage radio.


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Le prototype de l’Iliouchine Il-22PP, connu sous le nom de Prorubshik (signifiant voleur de bois), avion de renseignement électronique et de brouillage à distance.  © Alex Snow

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Un des quatre Iliouchine Il-20 de l’armée de l’air russe. © Aleksey Simanovich


"Ils font cela presque 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, ce qui est très dangereux pour notre défense aérienne", déclare Juice. "Le principal danger est qu'un Soukhoï Su-35 peut transporter non seulement des missiles air-air, mais en même temps des missiles air-sol Kh-31P et aussi des missiles antiradar AS-17 Krypton, de sorte qu'il peut effectuer en une seule sortie des missions d’appui au sol et de destruction de nos défenses anti-aériennes. Ces Su-35 disposent également de leurs propres nacelles de contre-mesures électroniques de type Khibiny. Avec tout cet armement, cet avion est un grand danger pour nous, mais heureusement, il s’avère en fait ne pas être aussi efficace que nous l'avions craint."


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Une photo non datée d'un Su-35S armé de deux missiles à longue portée R-37M (un sous chaque entrée de moteur). Le chasseur est également armé d'un missile à longue portée Kh-31PM et de missiles à courte portée de la série R-73. © Guy Plopsky


Une autre nouvelle arme russe préoccupante est le missile air-air à très longue portée Vympel R-37M (Code OTAN AA-13 Axehead), porté par le Su-35S et le MiG-31BM Foxhound-C. Cette arme n'a pas été utilisée au cours des premiers mois de la guerre, mais elle est apparue pendant l'été et, selon les mots de Juice, elle est "sacrément dangereuse". La très longue portée du R-37M - qui pourrait atteindre de400 km – est une réelle menace pour les avions ukrainiens car ce missile peut être tiré depuis une zone située loin à l'intérieur de l'espace aérien russe.

Il semble toutefois que les Ukrainiens aient trouvé un moyen de réduire la menace posée par le R-37M. Juice nous l’explique : "Heureusement, comme nous avons compris leurs tactiques lors des premiers tirs de ce missile, nous avons pu créer nos propres techniques tactiques pour les éviter tant faire que se peut. Mais malgré tout, ces missiles depuis leur apparition sur le théâtre des opérations limitent nos capacités à mener toutes les missions que l’on souhaiterait. Car lorsque vous êtes en train de manœuvrer pour éviter un Vympel, vous n’êtes plus en mesure de fournir une frappe aérienne ou autre chose, donc le jeu de pilotage tactique reste très, très, très dur dans les airs et très, très risqué désormais. Plus qu’au début de la guerre. C’est bien simple, si vous n'êtes pas averti du lancement d'un tel missile, vous êtes un pilote mort."


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Un missile air-air R-37M de la société Vympel sous l'aile d'un Soukhoï Su-35S. © Vympel


Une autre caractéristique de la menace aérienne russe, qui n'était pas évidente du tout dans les premiers mois de la guerre, est l'utilisation de pilotes mercenaires, notamment du tristement célèbre groupe Wagner.

Si les pilotes de chasse russes volent généralement en privilégiant plus que tout "ma sécurité d'abord ", évitant de pénétrer dans les zones de défense aérienne ukrainiennes, ce n'est plus toujours le cas d’autres pilotes russes, comme le souligne Juice. "Par exemple, pendant l'opération de notre contre-offensive dans la région de Kharkiv en septembre, les russes ont recommencé leur tactique chaotique. Ils envoyaient des bombardiers, des Su-25 Frogfoots, et même des chasseurs, au-dessus de la ligne de front, avec les habituelles bombes non guidées. Et bien sûr, nos gars en ont abattu beaucoup sur place.


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Le pilote de chasse Juice lève trois doigts pour représenter le trident, le symbole national de l'Ukraine. © Force Aérienne Ukrainienne


Dans le concept de ce que doit être la mentalité du combattant de Juice, une condition préalable indispensable est de garder la tête froide à tout instant et quelle que soit la situation. "Peu importe ce qui se passe, il faut toujours avoir la tête froide pour réaliser les opérations de manière efficace et sûre." Lors de la contre-offensive de Kharkiv, cependant, les adversaires russes se sont dit : " Hé, merde, ils sont sur la contre-offensive, que faire ? Je vais envoyer tout ce que j'ai. C'est absolument stupide. Heureusement pour eux et malheureusement pour nous, ils ont maintenant des escadrons Wagner pour ces stupides missions suicides. Mais même pour les pilotes de Wagner et pour les autres, ces missions suicide ce sont des ressources, des avions, et de l'argent, et c'est toujours des putains de vies sacrifiées. Mais les russes s'en foutent de ça."

Dans le cas des Su-24 et des Su-25 exploités par Wagner, "je peux vous dire que ce sont de vieux grands-pères qui pilotent ces appareils Wagner, mais malgré leur âge ils sont quand même une menace. Surtout parce qu'ils sont fous. Ils n'ont en fait aucune règle d'engagement car ils ne sont pas des combattants officiels. Ils ne se soucient pas des gens. Ils ne se soucient pas des civils. Ce sont juste des mercenaires - ils sont juste là pour tuer un maximum de types et c'est tout. "


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Un Su-25 avec les insignes du groupe Wagner au-dessus de Bakhmut en novembre dernier. © Rob Lee


L'apparition du HARM aux mains des Ukrainiens a eu l'effet escompté sur les défenses aériennes russes basées au sol, même si elles restent un adversaire redoutable. "Ils ont peur, bien sûr, parce que maintenant chaque MiG, chaque Flanker dans les airs est une menace possible pour eux", explique Juice. "Et bien sûr, ils sont obligés d'éteindre les radars. Mais vous devez comprendre qu'ils ont vraiment beaucoup de systèmes et de multiples échelons. Ils peuvent simplement éteindre quelque chose dans cette direction, mais d'autres systèmes resteront opérationnels. Par exemple, leurs systèmes sol-air Pantsir (Code OTAN SA-22 Greyhound) disposent également d'une station électro-optique, donc il reste une menace pour nous."

Dans l'ensemble, les défenses aériennes russes restent un énorme obstacle, bien que le HARM rende clairement les missions dans leur voisinage beaucoup plus sûres désormais. Juice affirme que les russes "ont été obligés d'utiliser des systèmes supplémentaires" ainsi que d'introduire "des systèmes plus anciens pour remplacer les systèmes modernes endommagés. Mais, malgré tout, ça reste très dangereux de voler autour des lignes de front, il y a toujours beaucoup de MANPADS et d'autres choses".

Il apparaît également que la Russie est en train de renforcer sa puissance aérienne en Crimée occupée, qui est un bastion de la puissance de combat de Moscou. Bien que la perte de Kherson ait éliminé un grand nombre de bons sites de défense aérienne qui protégeaient autrefois la Crimée, et malgré le temps hivernal qui entrave certaines opérations, les renseignements dont disposent les forces armées ukrainiennes indiquent que deux lots de Su-35, un lot de Su-30 et un lot de Su-34 ont récemment envoyés en renfort en Crimée.

Il y a aussi le spectre d'une implication croissante de la Biélorussie dans la guerre, un scénario que Juice craint et qui conduirait à davantage de frappes aériennes lancées depuis ce pays. Cela pourrait bien impliquer des très gros missiles de croisière supersoniques Kh-22 Bouria (code OTAN : AS-4 Kitchen) tirés depuis des Tu-22M3 Backfire-C ou des missiles de la série Kh-59M à guidage TV (code OTAN : AS-13 Kingbolt) lancés depuis des Flankers. Actuellement, les armes de ce type sont principalement capables de frapper des cibles dans l'est et le sud de l'Ukraine, mais une nouvelle campagne aérienne menée depuis le Belarus mettrait également en danger une grande partie de l'Ukraine occidentale.

La capacité de la Russie à reconstituer ses unités pour compenser les pertes est une autre préoccupation constante, bien que Juice note également que le processus ne se faire pas aussi rapidement que les Ukrainiens le craignaient. Dans le même temps, Juice nous apprend que la Russie a commencé à aligner sur le front des vieux Soukhoï Su-24, ce qui suggèrerait que l'approvisionnement en avions de combat modernes ne répond plus vraiment aux besoins actuels des russes.

Le besoin des forces ukrainiens en nouveaux armements

"Bien sûr, nous avons également besoin de beaucoup plus d’avions" poursuit Juice. "Mais ce n'est pas tant une question de nombre que de qualité. Nous pourrions avoir des centaines de Frogfoots et de Su-24 équipés de vieilles bombes muettes et des roquettes des années soixante-dix, nous ne serions pas plus efficaces sur ce terrain de combat pour autant. Nous avons besoin de quelque chose de plus avancé, avec une capacité de combat face-à-face de haute précision."

Cela a conduit Juice à nous entreprendre sur la question de nouveaux avions de chasse pour l'Ukraine, une question lancinante depuis le début de cette guerre … quelque chose pour lequel Juice et ses collègues pilotes mènent une campagne auprès de l’Occident depuis longtemps.

En ce qui concerne ces possibles futurs chasseurs, ce qui est important pour Juice, c'est un appareil qui soit aussi bien capable de réaliser des missions air-air que des missions air-sol. Dans cette optique, la livraison promise de MiG-29 d'occasion par la Slovaquie ne sera qu'une solution partielle, mais elle sera très utile pour compenser les pertes déjà subies par l’armée de l’air ukrainienne. Des discussions similaires sur le transfert de MiG-29 polonais ou bulgares n'ont pas abouti.
La nécessité de disposer d'une certaine capacité air-sol de précision a été mise en évidence lors des combats autour de la région de Kherson en septembre dernier. Dans cette région, les avions ukrainiens d’attaque au sol Soukhoï Su-25 ont été largement utilisés tirant sur les forces russes des roquettes non guidées, avec une efficacité bien moindre que celle qui pourrait être obtenue avec un avion plus moderne équipé d'armes guidées.

"Ces pilotes sont incroyablement courageux et ce sont de véritables héros, mais malheureusement, ce n'est pas suffisant pour gagner dans cette guerre", déclare Juice à propos de ses collègues pilotes de Su-25. Cependant, la situation actuelle des défenses aériennes russe dans la région de Kherson est telle que tout avion ukrainien qui survole le Dniepr, qui sépare les forces russes et ukrainiennes, sera tout simplement abattu à coup sûr, nous explique Juice. En attendant, la portée des roquettes équipant actuellement les Su-25 ukrainiens n'est pas suffisante pour apporter un feu efficace sur l'ennemi retranché de l’autre côté du Dniepr.

Par conséquent, un nouvel avion de combat multirôle est "une priorité essentielle pour notre force aérienne et pour l'ensemble de nos forces armées", affirme Juice. "Un tel avion multirôle nous permettrait de sauver beaucoup de vies civiles dans les régions attaquées par les missiles de croisière et les drones russes, d'effectuer des interceptions plus efficaces et, bien sûr, d'assurer les opérations de contre-offensives sur les lignes de front".

A côté de ce besoin en avion, une nouvelle arme air-sol de précision pourrait potentiellement être intégrée sur les avions de combat ukrainiens existants, en suivant l'exemple établi avec le missile HARM. Juice considère que, théoriquement, une telle modification pourrait être une proposition bien plus réaliste que l'introduction de l'autre nouvelle arme demandée récemment par l’Ukraine auprès des Occidentaux, un missile air-air à radar actif.

Juice : "C'est trop long, trop cher et trop compliqué d'intégrer un système air-air sur un vieil avion de l’ère soviétique comme le MiG-29". Une telle arme offensive pourrait hypothétiquement fonctionner sur un MiG-29 ou même sur un Su-27, mais il est vrai qu'elle serait globalement moins performante que la même arme sur un appareil occidental récent. Il en va de même pour les missiles antiradar HARM, qui ont été monté récemment sur des MiG-29 ukrainiens mais avec une capacité assez limitée.

Juice pense que des progrès sont enfin réalisés en ce qui concerne un nouveau combattant. "Je crois que quelque chose est en train de se passer. Il semble que le Pentagone soit sur la même longueur d'onde que nous et qu'il comprenne parfaitement nos besoins. Mais la question de savoir comment y répondre est assez compliquée."

Outre un nouvel avion de combat et la fourniture de systèmes avancés de défense aérienne basés au sol, Juice insiste également pour que de nouveaux équipements parviennent à l'armée ukrainienne y compris à l’armée de terre pour ses besoins aériens propres. "Malheureusement, note-t-il, ce besoin en matériel aérien de notre armée de terre n'est pas très discuté dans les médias internationaux ; ce n'est pas connu." Le plus souvent, les équipages de l'aviation de l'armée de terre ne sont tout simplement pas en mesure de faire valoir leurs besoins - ils sont tout simplement trop occupés. Juice nous explique ce que vivent les combattants ukrainiens de l’aviation de l’armée de terre : "Ils se battent tous les jours dans la campagne. Ils dorment très près de la ligne de front quelque part près de quelques vaches ou de chevaux, dans des petits villages, même dans des fermes avec les habitants". Juice participe à une fondation caritative ukrainienne qui fournit aux équipages de l'aviation de l'armée de terre certains équipements de survie essentiels. "Mais nous devons les aider non seulement à survivre, mais aussi à être efficaces et à aider nos unités terrestres à mettre les Russes dehors."

Plus important encore, Juice affirme que l'aviation de l'armée de terre ukrainienne a besoin d'hélicoptères d'attaque modernes. Des Mi-24 d'occasion ont été fournis par la République tchèque, vingt Mi-17 que les États-Unis avaient acquis au départ pour l’armée et quelques autres hélicoptères par d'autres pays. Mais ce que les Ukrainiens souhaitent vraiment, c'est un hélicoptère de la classe des Bell AH-1W Super Cobra et AH-1Z Viper.


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Chargement d’un Mil Mi-17 américain dans un C-17 Globemaster III sur la base aérienne de Davis-Monthan (Arizona) en juin dernier pour être livré à l’Ukraine. Un C-17 peut transporter un seul hélicoptère de ce type. © USAF


"J'espère vraiment que les gouvernements occidentaux nous aideront dans ce domaine", déclare Juice, notant que tout hélicoptère d'attaque moderne pourrait être mis à contribution, qu'il s'agisse d'un AH-1, d'un Tigre d'Airbus Helicopters ou même d'un AH-64 Apache. "L'Apache serait vraiment la meilleure solution pour nous. Ce type d’hélicoptères d’attaque c’est de la science-fiction pour nous. Nous le voulons vraiment, mais même des Super Cobra seraient très, très important pour nous sur les lignes de front car ils sont capables d'engager des cibles avec des armes à distance de haute précision, de jour comme de nuit."

Le commandement de l'armée de l'air ukrainienne travaille actuellement à l'obtention d'un nouveau chasseur en collaboration avec ses partenaires américains et d'autres nations occidentales. Comme l'observe Juice, il n'y a pas malheureusement de solution dans l’immédiat, surtout sans le soutien politique nécessaire.

"Il y a beaucoup de questions techniques, de questions de formation, de questions d'infrastructure, mais avant tout, c'est une question politique", estime Juice. "Tous nos alliés occidentaux sont prêts à nous aider - je veux dire les militaires, les responsables militaires. Mais il n'y a toujours pas assez de soutien politique pour le faire. Nous continuons à faire passer le message à tout le monde, au monde occidental, que la livraison d’un avion de chasse occidental moderne est un besoin absolument critique pour l'Ukraine."

Pour Juice, fournir à l'Ukraine un nouveau chasseur serait également une bonne chose pour l'Occident. Non seulement un avion à réaction serait en mesure de couvrir un plus grand espace aérien plus rapidement et en toute sécurité, sauvant ainsi plus de vies, mais il s'agirait d'un bon investissement dans l'avenir des forces armées ukrainiennes et de l'Ukraine elle-même. "Et ce serait une bonne affaire pour tout le monde", ajoute Juice. "Une bonne affaire pour le fournisseur, car nous en avons besoin de beaucoup et ce serait un contrat sur de nombreuses années". Enfin, "Ce serait quand même beaucoup mieux d'intercepter toute la merde volante que les russes nous envoient ici sur le front et pas à la frontière polonaise !".

Juice considère que presque tous les types d'avions de combat occidentaux de quatrième génération pourraient être utilisés par l'Ukraine. Il nous mentionne, comme tout le monde ici en Occident le sait déjà, le F-16 Viper bien évidemment car sa disponibilité actuelle avec près de 5000 F-16 construits et le fait qu’on le retrouve dans plusieurs forces aériennes occidentales en font un premier choix logique. Puis Juice nous mentionne aussi le F/A-18 Hornet, et le JAS 39 Gripen suédois.

Quant à l'argument selon lequel le Gripen serait le mieux adapté, en raison de sa capacité éprouvée à opérer à partir de pistes d'atterrissage rustiques avec une maintenance minimale et de son efficacité avérée lors des exercices de combat aérien même contre le F-16 (NdT - En 2006, des Gripen suédois ont participé à l’exercice Red Flag – Alaska organisé par l'armée de l'air américaine. À cette occasion, les Gripen ont effectué des sorties de combat simulées contre des F-16 Block 50, des Eurofighter Typhoon et des F-15C. Dès le premier jour de cet exercice, les Gripen ont enregistrés dix kills dont cinq F-16 Block 50 sans aucune perte). Juice cependant n'est pas entièrement convaincu. "J'ai déjà décollé dans cette guerre depuis une autoroute avec mon MiG-29, mes camarades l’ont aussi fait avec leur Su-27. Ce n'est pas l'aspect le plus important des performances qu’on attend. En outre, même si le Gripen est un bon avion, nous comprenons parfaitement que les suédois le gardent pour eux car ils n’en ont pas beaucoup (NDT – l’armée d el’air suédoise dispose de 204 Gripen)."

En revanche, le F-16, plus largement utilisé dans le monde, présente des avantages en termes de disponibilité immédiate d’avions et de pièces détachées. En outre, il permet de nombreuses options en termes d'équipement et d’armement embarqué, comme le souligne Juice. "Dans le cas du F-16, vous avez beaucoup d'options pour différents programmes de formation, différentes contre-mesures électroniques, différents moteurs, différents tout - c'est comme un Lego ! En général, je ne dis pas que le F-16 est meilleur en tant qu'avion lui-même, mais il est peut-être le choix le plus réaliste pour l'Ukraine, compte tenu des capacités, de la disponibilité, de l'accessibilité financière et, surtout, de la durabilité de cet appareil."


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Un F-16C de l'US Air Force roule devant des avions de chasse ukrainiens Su-27 et MiG-29, sur la base aérienne de Mirgorod, en Ukraine en 2011. Le Viper était en Ukraine pour l'exercice Safe Skies. © USAF


Une possibilité du Gripen que Juice considère avec une certaine envie est le fameux puissant missile air-air Meteor à très longue portée de la société européenne MBDA qui est tiré hors contact visuel avec la cible (NdT - Missile de type BVRAAM pour Beyond Visual Range Air-to-Air Missile. Ce missile équipe les avions Rafale, Typhoon, Gripen, et F-35 de nombreuses forces aériennes européennes). Ce missile air-air à longue portée équipée d'un statoréacteur comblerait l'écart actuel qui existe entre les armes ukrainiennes et le missile air-air russe R-37M, et mettrait en danger les avions russes même lorsqu'ils opèrent assez profondément dans leur propre espace aérien.

Pour Juice, cependant, "notre priorité, tout d'abord, est d'abattre leurs avions d'attaque directement au-dessus de la ligne de front, et pas seulement de détruire leurs avions de chasse, car il faut beaucoup de plus de ressources pour cela. Tout d'abord, nous devons couvrir nos régions, ensuite couvrir nos forces terrestres, et après cela, bien sûr, nous pouvons essayer de nous amuser avec leurs avions de chasse. Ce sera un grand défi. Mais malgré tout, un nouveau matériel signifie de nouvelles tactiques, une nouvelle doctrine tactique, et j'espère que tout cela nous aidera à réussir et que les Russes ne se sentiront plus autant à l'aise même dans leur propre espace aérien."

Il reste à savoir d'où viendraient ces missiles Meteor, si la Suède les remettrait volontiers ou s'il faudrait en construire de nouveaux lots, et si cela serait politiquement acceptable. Entre-temps, Juice considère le missile air-air de moyenne portée AIM-120 AMRAAM comme une arme beaucoup plus probable, d'autant plus qu'un certain nombre est déjà entre les mains des Ukrainiens dans le cadre du système NASAMS sol-air qui leur a été livré par les Norvégiens. En effet, les missiles qui équipent les batteries de tir NASAMS sont des missiles américains AIM-120. L'Ukraine est donc maintenant familiarisée avec l’AIM-120 AMRAAM, et les dispositions logistiques pour en fournir plus seraient beaucoup plus simples à mettre en œuvre.
Avant tout, Juice et ses collègues pilotes de chasse ukrainiens ont besoin de nouveaux avions modernes le plus tôt possible, "… avant qu'il ne soit trop tard, parce que dans certaines régions, la situation sur le terrain est très critique, les combats y sont très durs. Et malheureusement, nous ne sommes pas en mesure d'aider là-bas. Nous ne sommes pas en mesure d'aider valablement nos gars au sol".

Un nouvel avion de combat serait merveilleux pour soulager la pression sur nos troupes au sol. La manière dont Juice et ses collègues ont continué à mener le combat contre les Russes, en introduisant dans l’armée de l’air ukrainienne de nouvelles armes et de nouvelles tactiques de combat en un temps très limité, suggère qu'un chasseur moderne de quatrième génération pourrait véritablement changer la donne une fois entre leurs mains. Entre-temps, l'armée de l'air ukrainienne continuera à faire ce pour quoi elle est connue, c'est-à-dire déjouer les pronostics et continuer avec succès de tenir en échec une armée de l'air ennemie bien mieux équipée.


FIN

#81 Actualité de l'aéronautique » [Réel] Des A-10 ukrainiens ? ... vu des USA » 15/02/2023 14:16

philouplaine
Réponses : 3

Bonjour chers amis,

Vos désirs sont des ordres … Suite à mon précédent post sur des F-16 ukrainiens, et suite au commentaire très intéressant de Brice :

bricedesmaures a écrit :

... des A 10 seraient plus adaptés à la situation tactique...

J'ai accéléré la traduction de l'article américain sur lequel je planchais et je lui ai adjoint un second : ces deux articles montrant correctement l'état actuel de l'attitude des USA pour livrer des A-10 aux ukrainiens ... Le premier article date du 20 juillet dernier, 5 mois après le début de la guerre russo-ukrainienne, et le second beaucoup plus récent date du 23 décembre dernier. La conclusion de ce plus récent article est claire: la possibilité de livrer des A-10 du surplus de l'USAF aux ukrainiens s'éloigne de jour en jour … mais ne serait-ce pas une sorte de "brouillard de guerre" destiné aux russes ? L'avenir nous le dira. Les illustrations (sauf une) sont celles des articles originaux.

Bonne lecture !
Philippe




PREMIER ARTICLE - Juillet 2022


DONNER DES A-10 WARTHOG AUX UKRAINIENS N’EST PAS EXCLU

De hauts responsables de l'armée de l'air américaine ont laissé la porte ouverte à la possibilité de transférer certains de nos emblématiques Warthogs à l'Ukraine.

Par Joseph Trevithick, The War Zone, 20 juillet 2022


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Un A-10 Thunderbolt II après un ravitaillement en vol. © Sgt. Daniel Snider, USAF


Article original en Anglais


Le secrétaire d’état à l'US Air Force M. Frank Kendall n'a pas rejeté catégoriquement l'idée de transférer des avions d'attaque au sol A-10 Warthog à l'Ukraine lorsqu'il a été interrogé sur cette possibilité plus tôt dans la journée. Ses commentaires sont intervenus après que le chef d'état-major de l'armée de l'air, le général Charles Q. Brown, ait déclaré séparément que l'armée de l'air ukrainienne devra éventuellement commencer à se séparer de ses jets de combat de l'ère soviétique et que la prochaine étape sera "quelque chose de non-russe".

M. Kendall et M. Brown ont tous deux fait leurs commentaires aujourd'hui lors du forum annuel d'Aspen sur la sécurité (NdT - Le 13ème Forum annuel d'Aspen sur la sécurité a eu lieu du 19au 22 juillet 2022 à Aspen, Colorado. C’est un forum public non partisan qui permet de discuter des défis les plus urgents en matière de sécurité nationale et de politique étrangère). Jusqu'à présent, seule l'armée de l'air américaine a exploité des A-10, un avion d'appui-sol rapproché emblématique connu principalement pour son énorme canon automatique General Electric de style Gatling à sept tubes de 30 mm GAU-8/A Avenger et son fort blindage.


Vidéo sur YouTube : Le son typique du A-10 à l’entrainement avec ses canons General Electric au Nevada Test and Training Range.
Durée : 2min40


M. David Ignatius, du Washington Post, qui était le modérateur pour la conférence du secrétaire Kendall à Aspen, a demandé au secrétaire de l'Air Force : "Qu'est-ce que l'armée de l'air pourrait donner ?".

"Le vénérable A-10 … n'est pas un système dont nous aurons un grand besoin face aux possibles adversaires qui nous préoccupent le plus actuellement", a répondu Kendall. Dans sa plus récente demande de budget, l'US Air Force a demandé l'autorisation de retirer du service actif 21 Warthogs durant l’année 2023. Ces avions se sont avérés très utiles au cours des deux dernières décennies lorsqu'ils ont soutenu des opérations de combat de faible intensité dans des environnements permissifs, mais on s'interroge de plus en plus sur leur utilité dans tout futur conflit de plus grande envergure dans un espace aérien très contesté.

Quand M. Kendall a terminé sa présentation, M. Ignatius a alors posé une question toute simple qui a beaucoup intéressé l’audience : "Une pensée me vient, pourquoi ne pas donner ces A-10 à l'Ukraine ?"

M. Kendall a alors dit ceci :"Le général Brown a déjà répondu à cette question ce matin en indiquant quels chasseurs pourraient intéresser l'Ukraine. En fait, c'est en grande partie à l'Ukraine de décider. … Les appareils américains que l’USAF va retirer du service actif sont une possibilité (…) Nous serons totalement ouverts aux discussions avec nos collèges ukrainiens sur leurs besoins et sur la manière dont nous pourrions les satisfaire."

Vous pouvez regarder ci-dessous l'intégralité de la discussion entre M. David Ignatius, du Washington Post, et M ; Frank Kendall, secrétaire d'État à l'armée de l'air, lors du Forum Aspen sur la sécurité 2022.


Vidéo sur YouTube : Discussion entre M. Frank Kendall, secrétaire d’état à l’USAF, et M. David Ignatius du Washington Post (en Anglais).
Durée : 36min15


"Je ne peux pas spéculer sur l'avion qu’ils pourraient décider de choisir", avait dit le général Brown lorsqu'on lui avait posé une question sur l’éventualité de la formation aux États-Unis de pilotes ukrainiens à l’issue de sa conférence du matin. "En tout cas, ce sera un appareil non-russe". M. Brown a fait remarquer que des offres européennes, ainsi que des offres américaines, pourraient être des possibilités.

La semaine dernière, les membres de la Chambre des représentants des États-Unis ont voté pour inclure l'approbation du financement de la formation de pilotes de chasse ukrainiens dans un projet de loi sur la politique de défense annuelle, ou National Defense Authorization Act (NDAA), pour l'année fiscale 2023. Cette législation doit encore être finalisée, puis réconciliée avec une version distincte actuellement étudiée par le Sénat, avant que le Congrès ne puisse la soumettre à un vote final, après quoi elle pourrait aller sur le bureau du président Joe Biden pour être finalement promulguée.

Les remarques de Kendall et Brown aujourd'hui sont sensiblement différentes des réponses qu'ils ont données à des questions sur l'envoi d'A-10 en Ukraine en mars dernier, où ils avaient tous deux souligné très clairement qu'il n'y avait aucun plan ou même aucune discussion sur la possibilité d'un transfert d’avions de combat américains aux ukrainiens.
"Je ne suis pas au courant d'un tel plan, ni même d'une discussion sur un plan pour envoyer ou fournir des A-10 aux Ukrainiens", avait déclaré Kendall aux journalistes lors du symposium sur la guerre aérienne de l'Association des forces aériennes, selon la newsletter Breaking Defense du 3 mars 2022.


Lien pour l'article de Breaking Defense du 3 mars 2022 (en Anglais)


"Je ne suis pas au courant de discussions ou de plans au sein de l'armée de l'air des États-Unis pour fournir des A-10 à l'Ukraine", a déclaré Brown lors du même événement.

La question de l'envoi de A-10, ainsi que d'autres avions de combat occidentaux, en Ukraine a certainement été soulevée à de multiples reprises depuis que la Russie a lancé son invasion totale en février. Jusqu'à présent, l'administration Biden a résisté à ces appels, qui émanaient notamment de membres du Congrès, de responsables ukrainiens et de membres de l'armée de ce pays, ainsi que du grand public. Les autorités américaines ont généralement invoqué des inquiétudes quant à la manière dont de telles livraisons pourraient aggraver le conflit et augmenter le risque de débordement de la guerre en dehors de l'Ukraine.

Cette attitude n'a cessé de changer ces dernières semaines, notamment avec le transfert de systèmes de roquettes d'artillerie à haute mobilité (HIMARS) et de munitions à guidage de précision, ainsi qu'avec les projets d'envoi de systèmes nationaux avancés de missiles sol-air (NASAMS) de moyenne portée. Il y a quelques mois encore, la livraison potentielle de tels systèmes aux forces ukrainiennes était encore considérée comme totalement exclue.

Ce lundi (NdT – le 18 juillet 2022), le ministre ukrainien de la Défense, Oleksii Reznikov (NdT – M. Reznikov a été ministre de la Défense jusqu’en février 2023 et a remplacé par le général Kyrylo Boudanov), a indiqué sur Twitter qu'il s'était entretenu avec le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, et que son homologue américain avait "de très bonnes nouvelles, mais les détails seront communiqués un peu plus tard." Bien entendu, il pourrait s'agir d'une simple référence à la nouvelle promesse faite aujourd'hui par le gouvernement américain d'envoyer davantage de HIMARS, qui ont déjà eu un impact notable sur le conflit, sans que cela ne concerne des avions.

Il n'y a pas si longtemps, l'idée même d'envoyer des A-10 en Ukraine, ou ailleurs, aurait été une proposition largement contredite. Pendant des années, le Congrès a empêché l’USAF de se séparer de ses A-10, les législateurs exigeant continuellement l'assurance que notre armée bénéficie continuellement d’un puissant appui aérien rapproché. Cette position de longue date est en train de s'assouplir. La version actuelle du NDAA (NdT – NDAA = National Defense Authorization Act, ou Loi d'Autorisation de la Défense Nationale) actuellement discutée à la Chambre des Représentants accepte la proposition de l'USAF de retirer 21 A-10 au cours de la prochaine année fiscale. La commission des services armés du Sénat a annoncé lundi que sa version permettra aussi ce retrait de 21 A-10.

D'autres obstacles politiques intérieurs semblent également avoir disparu. En 2003, l'armée de l'air s'était opposée à une location potentielle de certains de ses A-10 à l'armée de l'air colombienne. Notre Département d'Etat (NdT- Le Département d’Etat américain est l’équivalent du Ministère des Affaires Etrangères), qui avait demandé l'acquisition d'une flotte de Warthogs pour les convertir en avions blindés pour pulvériser des herbicides sur les cultures de coca en soutien aux opérations anti-narcotiques en Amérique latine.

Selon toutes les indications, l'Air Wing du Département d'État (NdT - L'Air Wing du département d'État (le DoSAW), s’appelait avant le Bureau of International Narcotics and Law Enforcement Affairs Office of Aviation. Ce bureau du département d'État des États-Unis met à disposition des services diplomatiques des USA une flotte de 200 avions et hélicoptères qui répond aux besoins en matière de diplomatie ne relevant pas de l'autorité légale et qui exclue l’USAF), une organisation importante mais assez secrète et obscure, ne semble plus avoir de réel intérêt pour utiliser des A-10 à cette fin d’épandage. L’Air Wing avait entretemps acquis un certain nombre d'anciens OV-10 Broncos de l'USAF et les avait convertis en avions blindés d’épandage avant de les remplacer plus récemment par des avions d’épandage commerciaux modifiés.


Vidéo sur Youtube : Des OV10D Bronco de l’US Air Wing en Colombie en 2008
Durée : 4min10


Bien entendu, il reste encore à voir si l'Ukraine recevra ou non ces possibles A-10. Les inquiétudes de l’USAF concernent d’abord la réelle vulnérabilité du Warthog dans un environnement aérien rempli de défenses aériennes haut de gamme tel que celui du conflit actuel en Ukraine, où les avions des deux camps font face en permanence à des menaces importantes sol-air. En même temps, l'USAF reconnait que l’A-10 a été construit pour survivre à de lourds dommages de combat et être réparé rapidement et remis en service presqu’aussitôt. L’A-10 peut également opérer à partir d'aérodromes austères caractérisé par une "empreinte" relativement faible. Toutes ces caractéristiques conviennent parfaitement à l'Ukraine. Il convient également de noter que l'armée de l'air ukrainienne continue d'utiliser quotidiennement sur le front des Su-25 Gratch (code OTAN Frogfoot), un lointain homologue de l’A-10 très rudimentaire qui date de l'ère soviétique.

Les responsables américains et ukrainiens devront décider de la manière dont d'autres facteurs, tels que les exigences en matière de formation et de logistique, pourraient influencer l'aspect pratique du transfert d'un certain nombre d’A-10, ainsi que des armes dont ils disposeraient s'ils étaient fournis aux Ukrainiens. L'avion possède certains systèmes sensibles qui devraient probablement être retirés avant un tel transfert.

En ce qui concerne les besoins en formation, "grâce à des programmes d'échanges militaires antérieurs, l'Ukraine dispose déjà d'un petit nombre de pilotes formés pour piloter l'A-10", ont écrit le général de l'armée de l'air à la retraite Philip Breedlove, qui a dirigé pendant un certain temps le Commandement européen des États-Unis (EUCOM), et Kurt Volker, ancien représentant spécial des États-Unis pour les négociations avec l'Ukraine, dans une tribune publiée en mars dernier par le groupe de réflexion Center for European Policy Analysis. Une information que nous n’avons pas été en mesure de confirmer cependant.

Cela étant dit, si des A-10 finissent par apparaître dans le ciel ukrainien, cela pourrait contribuer à clore définitivement le débat sur leur capacité à opérer dans des environnements aériens très menaçant, pour le meilleur ou pour le pire. Dans le même temps, le fait d'envoyer des A-10 en Ukraine pourrait finalement donner à l'armée de l'air ukrainienne la couverture dont elle a besoin pour réduire la menace russe au sol une fois pour toutes.

FIN




SECOND ARTICLE - Décembre 2022


L’UKRAINE AVAIT DEMANDE AUX USA CENT A-10 WARTHOG QUELQUES SEMAINES SEULEMENT APRES LE DEBUT DE L’INVASION RUSSE

Le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, avait rejeté cette demande d'A-10 de l'Ukraine en disant qu'elle n'était pas pratique et que ces avions seraient trop vulnérables.

Par Joseph Trevithick, The War Zone, 23 décembre 2022



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Un “Elephant walk” de Fairchild A-10 Thunderbolt II. © USAF


Article original en Anglais


Le ministre ukrainien de la défense, M. Oleksii Reznikov (NdT – remplacé récemment), affirme avoir personnellement demandé à son homologue américain, le secrétaire à la défense Lloyd Austin, une centaine d’avions d'attaque au sol A-10 Warthog, quelques semaines seulement après que la Russie a lancé son invasion en février dernier. M. Reznikov affirme que M. Austin avait alors catégoriquement refusé, affirmant que la demande était non seulement impossible à satisfaire, mais que les avions seraient dangereusement vulnérables face à la défense aérienne russe (du moins telle qu’on l’imaginait à l’époque).

Ces commentaires de M. Reznikov ont été inclus dans un article détaillé que le Washington Post a publié aujourd'hui (NdT - le 23 décembre 2022 donc), et qui vaut la peine d'être lu dans son intégralité. Cet article du Post porte sur l'ampleur, la portée et l'évolution de l'aide militaire américaine apportée aux forces armées ukrainiennes au cours des huit derniers mois. Au cours de cette période, la position du gouvernement américain sur les systèmes d'armes et autres équipements qu'il est prêt à envoyer à l'Ukraine a considérablement évolué. C’est notamment le cas avec la décision toute récente de transférer des batteries de missiles sol-air Patriot, mais les responsables politiques américains sont restés fermement opposés à l'envoi d'avions de combat.

"Ils peuvent délivrer des bombes plus lourdes, et nous pourrions les utiliser contre les colonnes de chars [russes]", a déclaré M. Reznikov au Washington Post à propos du raisonnement qui l'a poussé à demander des A-10, qu'il a dit avoir formulé lors d'une réunion avec M. Austin fin mars. En plus de son emblématique canon rotatif General Electric GAU-8/A Avenger de 30 mm, le Warthog peut transporter un large éventail de missiles, de bombes à guidage de précision et de bombes "muettes", de roquettes et d'autres équipements sur l'un de ses huit pylônes sous les ailes ou sur les trois autres situés sous le fuselage central.


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Un avion d'attaque au sol A-10 Warthog tire avec son canon rotatif à 7 tubes General Elecric GAU-8/A Avenger de 30 mm. © USAF

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Comparaison du canon GAU-8/A et son équipement complet (poids chargé 1,83 tonnes) avec une voiture Coccinelle. La cadence de tir est réglée par le pilote de 30 à 70 coups par seconde. © USAF


En mars, l'opinion publique américaine, y compris certains membres du Congrès, s'est montrée très favorable à l'envoi d’A-10 à l'Ukraine, après qu'une importante force mécanisée russe soit restée immobilisée plusieurs jours sur 60 km d’une même route au nord-ouest de la capitale ukrainienne, Kiev. La colonne remplie de chars et d'autres blindés lourds, ainsi que d'artillerie et d'autres véhicules de soutien, semblait extrêmement vulnérable, ce qui a suscité des discussions sur la façon dont il serait possible d'aider les forces ukrainiennes à l'attaquer.

"Nous avons alors fait nos calculs", a ajouté M. Reznikov. Le gouvernement ukrainien avait conclu qu'il y avait une centaine de Warthogs excédentaires disponibles quasi immédiatement aux Etats-Unis en se basant sur des informations accessibles au public. Les informations en question pourraient bien être notamment l'inventaire officiel des avions que l’USAF a entreposé sur la base aérienne de Davis-Monthan, en Arizona. Cet inventaire est une information militaire ouverte au public.

En novembre, il y avait en effet 100 Warthogs - 49 A-10A et 51 A-10C – stockés à Davis-Monthan. Cependant, beaucoup de ces avions, en particulier les variantes A (les plus anciennes, livrées dans la seconde moitié des années 1970 il y a 50 ans), ne sont pas en état de voler immédiatement, ayant été fortement cannibalisés pour les pièces de rechange au fil des ans. L'armée de l'air américaine possède actuellement 282 A-10C en service, affectés à des escadrons de service actif et à des unités de la réserve de l'armée de l'air et de la garde nationale aérienne. Le Warthog n'est plus produit depuis 1984.


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Un exemple de l'état de certains des A-10 entreposés à Davis-Monthan. © USAF / J.M. Eddins Jr


Selon M. Reznikov interviewé par le Post, M. Austin aurait rejeté la demande ukrainienne de Warthogs en disant que c'était "impossible" et "insensé" parce que ces avions seraient une "cible bien propre" pour les moyens de défense aérienne russes. "C'était compréhensible pour moi", a déclaré M. Reznikov. "C'était raisonnable. J'ai dit d'accord, je comprends votre position."

Il s'en est suivi une série d'inquiétudes de la part de responsables politiques de divers pays concernant la possibilité de mise à disposition de l’Ukraine d'avions de combat soviétiques par des pays de l’OTAN, aucune ne s'est concrétisée. Les États-Unis et leurs alliés et partenaires ont depuis envoyé des pièces de rechange à l'armée de l'air ukrainienne pour soutenir l’entretien et la réparation des avions de combat soviétiques qu'elle possède déjà, un soutien qui a contribué à maintenir en bon état de marche l’armée de l’air ukrainienne malgré tous ces mois de combats intenses.

L'armée américaine a également contribué à l'intégration du missile antiradar à grande vitesse (HARM) AGM-88 sur les avions de combat ukrainiens MiG-29 Fulcrum et Su-27 Flanker. Cela a donné aux avions de chasse ukrainiens une capacité supplémentaire significative pour engager les défenses aériennes russes. Cette semaine, le Pentagone a annoncé de nouveaux projets de transfert de "munitions aériennes de précision" à l'armée ukrainienne. Selon les rapports, il s'agirait de bombes équipées de kits de guidage de munitions d'attaque directe conjointes (JDAM) assistées par GPS.

On ne sait pas aujourd’hui si M. Reznikov ou d'autres officiels ukrainiens ont répété leur demande d'A-10 depuis mars dernier. En juillet, en réponse à une question posée lors du forum annuel d'Aspen sur la sécurité, le secrétaire de l'US Air Force M. Frank Kendall a suggéré que l'envoi de Warthogs en Ukraine n'était pas exclu, avant de revenir sur ce commentaire en septembre.

En juillet, après les premiers commentaires de M. Kendall, M. Yuriy Sak, un conseiller de Reznikov, avait également déclaré que l'armée de l'air ukrainienne avait besoin d’avions de combat plus performants et plus polyvalents, tels que les chasseurs F-16 Viper, plutôt que des A-10. Il a explicitement déclaré que les Warthogs "ne barreront pas notre ciel aux russes, ils n'arrêteront ni les bombardiers ni les missiles" et "ils seront une belle cible pour les chasseurs à réaction et la défense anti-aérienne russes."

Des pilotes de combat ukrainiens ont ensuite fait écho à ces mêmes sentiments lorsqu’on a évoqué avec eux la livraison potentielle d’A10 ou un transfert de drones MQ-1C Gray Eagle. L'article du Washington Post d'aujourd'hui indique que les responsables américains ont également rejeté une demande ukrainienne officielle pour la livraison de drones MQ-1C.



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L’un des 183 drones de combat General Atomics MQ-1C Grey Eagle, encore appelé Sky Warrior, destiné à l’armée américaine. © US Army


En août dernier, les forces armées ukrainiennes ont mis en place un centre d'entraînement sur simulateur A-10 en utilisant des ordinateurs, des logiciels et des périphériques disponibles dans le commerce, y compris des casques de réalité virtuelle. Cependant, il n'était pas clair à l'époque dans quelle mesure cette entreprise, calquée sur une initiative d'entraînement à faible coût des pilotes de A-10 du 355ème escadron d'entraînement de l'armée de l'air américaine, était ou non officielle. Il n'y avait alors aucune indication à l'époque que la question de livrer des Warthogs à l'armée de l'air ukrainienne était revenue sur la table.

Tout compte fait, il semble que la position de longue date du gouvernement américain contre l'envoi d'avions de combat occidentaux à voilure fixe en Ukraine reste inchangée, du moins pour l'instant. À de multiples reprises dans le passé, les responsables américains ont fait valoir que de tels transferts présenteraient de sérieux risques d'escalade des tensions entre Washington et Moscou, qu'ils entraîneraient une formation importante et qu'ils imposeraient à l'armée ukrainienne des obstacles immédiats qui l'emporteraient sur tout avantage potentiel.

D'autres points épineux, comme notamment la possibilité pour ces avions de mener des frappes au cœur de la Russie, ont également été pris en compte dans la position de refus de l’administration américaine. Le président Joe Biden s'est montré particulièrement réticent à l'idée qu’il soutiendrait de telles frappes, de peur d'aggraver les frictions avec Moscou.

En plus de tout cela, l'armée de l'air américaine fait activement pression sur l’administration américaine pour réduire sa flotte d'A-10 au plus vite, dans le cadre d'un plan plus large visant à retirer complètement ce type d'avion d'ici cinq ans, en faisant valoir que ces appareils vieillissants ne sont plus adaptés aux combats conventionnels de haut niveau comme ceux qui se déroulent actuellement en Ukraine. Après les avoir bloqués pendant des décennies, du fait du retard pris dans le programme des F-35, le Congrès est maintenant favorable à ces plans.


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Un Fairchild A-10 Warthog en vol. © USAF


Il reste à voir si une éventuelle cession d'A-10 dans le futur susciterait de nouvelles discussions sur le possible transfert de ces avions soit à l'Ukraine, soit à qui que ce soit d'autre. S'il est vrai que le Warthog présente des vulnérabilités significatives face aux défenses aériennes modernes, en particulier car il ne disposerait pas pour l’instant d’une large d’accessoires informatiques tactiques pour les protéger, ils offriraient cependant une alternative plus avancée à l’armée de l’air ukrainienne que ses actuels avions d'attaque au sol Su-25 Frogfoot de l'ère. En fonction des munitions que les A-10 pourraient emporter, ils pourraient également être utilisés comme des plateformes de frappe à distance, ce qui contribuerait à les éloigner des menaces anti-aériennes.

Quoi qu'il en soit, un consensus se dégage sur le fait que le conflit actuel en Ukraine conduira finalement l'armée de l'air du pays à abandonner plus ou moins vite ses avions de combat de l'ère soviétique au profit de types occidentaux plus modernes. Le consensus aussi insiste sur le fait que ce processus devrait commencer le plus tôt possible. Cependant, d'après l'interview de M. Reznikov au Washington Post et d'autres commentaires de responsables militaires américains et ukrainiens depuis mars, la cession d’A-10 Warthogs dans une force aérienne ukrainienne rénovée semble de moins en moins probable.

FIN

#82 Actualité de l'aéronautique » [Réel] Des F-16 ukrainiens ? ... vu des USA » 13/02/2023 17:39

philouplaine
Réponses : 9

Bonjour chers amis,

Voici la traduction d’un article très récent (paru avant-hier) et assez dense sur la possibilité de former des pilotes ukrainiens aux F-16. Possibilité rejetée par le président Biden direz-vous ? Pas si sûr. En tout cas on en discute beaucoup outre-Atlantique dans le landernau militaire.
Outre les F-16, on parle aussi beaucoup d’un autre appareil. Je pense vous livrer une nouvelle traduction à ce sujet bientôt … patience !
J’ai pensé que cette traduction concernant le F-16 Falcon/Viper pourrait vous intéresser. L’article est américain et, donc, très pro-F16 comme vous pouvez vous en douter. Un appareil qui a fait son premier vol il y a près de 50 ans et qui a été construit à un peu plus de 4600 exemplaires tout de même ! L’année dernière, l’USAF a annoncé que le F-16 resterait en service actif pour encore deux décennies …
Les illustrations sont celles de l’article original.

Bonne lecture !
Philippe



COMBIEN DE TEMPS FAUDRAIT-IL REELLEMENT A DES PILOTES UKRAINIENS POUR SE CONVERTIR AU F-16 ?

Apprendre à piloter un F-16 n'est qu'un petit aspect de ce qu'il faudrait à un pilote de chasse ukrainien pour être prêt au combat sur cet avion.

Par Jamie Hunter et Tyler Rogoway, The War Zone, 8 février 2023


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Les États-Unis pourraient former les pilotes ukrainiens au pilotage des F-16 en quelques semaines. © Jamie Hunter


Article original en Anglais


Pour le moment, l'Ukraine n'a toujours pas reçu d'offre sérieuse de la part des Occidentaux pour lui fournir des avions de combat occidentaux afin d'améliorer les capacités de sa force aérienne. Cependant, parmi les types d'avions disponibles, il semble qu'un seul soit toujours mis en avant, et c'est facilement compréhensible, à savoir le General Dynamics F-16 Viper. Cela est dû principalement à la disponibilité de cet appareil, à sa facilité de soutien et à son infrastructure logistique tentaculaire, à la capacité importante de former des pilotes et à sa capacité multi-rôle hautement adaptable. Mais dans quelle mesure est-il possible de former des pilotes non seulement à voler, mais aussi à combattre sur un F-16 ?

Alors qu'une montagne d'affirmations inexactes et de déclarations audacieuses, mais creuses en fait, domine ce sujet brûlant, nous vous présentons dans cet article la réalité des choses, la dure réalité.

Le besoin de rapidité

Alors que la guerre en Ukraine dure depuis près d'un an, des appels incessants ont été lancés pour que l'armée de l'air ukrainienne reçoive des avions de combat occidentaux. Les courageux pilotes de chasse ukrainiens continuent d'opérer quotidiennement, obtenant des résultats impressionnants avec une petite flotte de chasseurs MiG-29 et Su-27, et d'avions d'attaque Su-24 et Su-25, parfois avec l'emploi inédit d'armes occidentales adaptées à la dernière minute à ces appareils russes, comme récemment le missile antiradiation à grande vitesse AGM-88 (HARM). Toutefois, la Russie conserve un avantage numérique et technique incontestable dans le domaine aérien.

Depuis mars 2022, les dirigeants ukrainiens ont demandé à plusieurs reprises et au plus haut niveau, des avions de combat occidentaux pour réapprovisionner, recapitaliser et améliorer leur flotte de chasseurs qui date de l'ère soviétique. Aujourd'hui, des dizaines d'autres armes de pointe fournies par l'Occident affluent dans le pays. Pourtant, à ce jour, aucune des options potentielles en matière de chasseurs n'a été mise en œuvre - aucun type supplémentaire russe ou occidental n'a été fourni.


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Les États-Unis pourraient rapidement intégrer les pilotes ukrainiens dans leur filière de formation sur F-16. © Jamie Hunter


Les pilotes ukrainiens et certains de nos responsables militaires ont clairement indiqué que leur préférence allait à la fourniture de F-16 d'occasion à Kiev. Le F-16 Viper est considéré comme un choix réaliste compte tenu de toutes les qualités mentionnées précédemment.

"Dans le cas du F-16, vous avez beaucoup d'options pour différents programmes de formation, différentes contre-mesures électroniques, différents moteurs, différents tout - c'est comme un Lego", a déclaré un pilote ukrainien de MiG-29. "Les capacités techniques sont très proches ; en général, je ne dis pas que le F-16 est meilleur en tant qu'avion en soi, mais c'est peut-être le choix le plus réaliste pour l'Ukraine, compte tenu des capacités, de la disponibilité, de l'accessibilité financière et surtout de la durabilité."

Le colonel Yuri Ignat, porte-parole en chef du commandement de l'armée de l'air ukrainienne, a déclaré que deux escadrons de 12 avions, plus les réserves, seraient suffisants, du moins au début, pour aider à renverser la situation face à la puissance aérienne russe.

Le 24 janvier 2023, le colonel Ignat déclarait lors d’une conversation informelle : "Le type d'avion, qui sera probablement fourni à l'Ukraine, et les conditions correspondantes de formation [du personnel] ont déjà été déterminés." Il se dit même que l'Ukraine travaille déjà à l'amélioration de certains aérodromes pour accueillir des chasseurs occidentaux.

Malgré le "non" ferme du président Biden au transfert de F-16 américains à l'Ukraine le mois dernier, cette possibilité semble prendre de l'ampleur. Si le gouvernement américain n'est peut-être pas prêt à donner lui-même des F-16, il pourrait approuver qu'un autre utilisateur, comme les Pays-Bas, le fasse. Et, bien sûr, le F-16 pourrait être offert aux côtés d'un autre type d'appareil occidental. Donc, si le gouvernement américain finit par approuver le transfert de F-16 à l'Ukraine, qu'est-ce que cela impliquerait ?

Faire un pilote de Viper

Si la décision de fournir des avions à réaction est prise, le F-16 Viper sera la solution idéale. Le Viper dispose d'une empreinte logistique bien établie en Europe, et il ne serait pas difficile de l'étendre vers l'est en direction de l'Ukraine. Il existe également un nombre croissant de cellules de F-16 d'occasion disponibles, bien que la liste des parties intéressées soit longue, y compris les compagnies aériennes adverses sous contrat. Cependant, s'il existe une volonté politique, il ne sera pas difficile de s'en procurer.

Yuri Ignat a récemment déclaré à Air Force Magazine que l'Ukraine dispose d'au moins 30 pilotes ayant des compétences suffisantes en anglais, ainsi que de techniciens de maintenance, prêts à se rendre aux États-Unis pour s'entraîner si un accord sur les F-16 peut être conclu.

"Pour apprendre la première étape du décollage et de l'atterrissage et voler d'un point A à un point B, cela nécessitera une formation de tout au plus quelques semaines, mais pour apprendre à l’utiliser en combat aérien, pour apprendre à utiliser les missiles, il faudra environ six mois", a déclaré le colonel Ignat.


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Le 149ème escadron de chasse de la base interarmées de San Antonio-Lackland, au Texas, est l’un des endroits où pourraient être formés des pilotes ukrainiens. © US Air National Guard


Le F-16 est relativement facile à utiliser en toute sécurité, ce n'est donc pas une barrière trop élevée à franchir pour l'armée de l'air ukrainienne. Un pilote de F-16 a déclaré à The War Zone : "En quelques mois, il est possible pour un aviateur non familier d'être raisonnablement sûr dans un jet comme le F-16. Les systèmes sont faciles à utiliser, le jet est facile à piloter et l'apprentissage est très intuitif. Le Viper est une transition facile pour un pilote de chasse expérimenté du point de vue du pilotage pur, quel que soit le type d'avion dont il est issu."

"Vous l'allumez, vous poussez la manette des gaz, vous y allez et vous volez. Le système de contrôle de vol neutralise les grosses erreurs, vous ne pouvez pas vraiment sursolliciter le jet, sauf si vous essayez vraiment de le faire. Vous ne pouvez pas le mettre hors de contrôle facilement - il y a beaucoup de cas où il prend soin de vous avec un niveau de sécurité tel que même un opérateur non compétent peut voler en toute sécurité, certains incluent des systèmes d'avertissement de proximité du sol améliorés (EGPWS)".

Le cours de base complet sur F-16, également connu sous le nom de cours B, est généralement un processus de neuf mois pour les pilotes qui viennent de terminer leur formation. Il se compose essentiellement de cours théoriques, de temps passé en simulateur et de sorties réelles. En plus des cours B, les unités de formation de l’USAF organisent également des cours de transition pour les pilotes ayant de l'expérience sur d'autres avions de chasse - ces cours sont généralement beaucoup plus courts que le cours B complet.

Dans le cas du cours B, une formation initiale de quatre semaines permet aux élèves de se familiariser avec les systèmes du F-16 et les procédures d'urgence. Elles sont suivies d'environ huit séances de simulateur couvrant le vol aux instruments de base et l'expérience pratique des différentes procédures d'urgence avant de passer au F-16D biplace pour quatre vols réels avant une première mission en solo.


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La formation des pilotes de F-16 s'effectue sur plusieurs sites aux États-Unis, notamment sur les bases de Luke et Holloman AFB. © Jamie Hunter


Les sorties qui suivent cette formation initiale ont pour but d'acquérir de l'expérience avant un vol de contrôle avec un instructeur, au cours duquel les élèves doivent répondre aux normes de vol aux instruments et de gestion des urgences. À ce stade, le nouveau pilote est considéré comme qualifié pour piloter le F-16 dans toutes les conditions météorologiques et peut passer au vol de nuit avec des lunettes de vision nocturne.

Les élèves passent par une phase air-air comprenant les manœuvres de base des chasseurs, les manœuvres de combat aérien et les interceptions tactiques avant de passer à la phase air-sol avec le vol à basse altitude et les tactiques d'attaque de surface. Le cours compte environ 60 sorties, réparties entre les phases de transition, air-air et air-sol.

Pour les pilotes de chasse ukrainiens expérimentés, une conversion de type vers le F-16 pourrait ressembler à un cours de conversion de transition FTU typique, connu sous le nom de Cours TX. Ce cours est traditionnellement appliqué aux équipages qui passent d'un type d'avion de combat à un autre, ou peut-être aux officiers supérieurs qui doivent piloter plusieurs types d'avions. C’est un cours de transition "sur mesure", qui intègre une initiation aux systèmes et aux procédures opérationnelles standard (SOP) occidentales. Un tel cours pourrait être le type de programme dont aura besoin un futur pilote de F-16 ukrainien venant du Fulcrum ou du Flanker.


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Un pilote de F-16 équipé du système de repérage interarmées monté sur son casque. © Jamie Hunter


"Pour un pilote ayant environ 500 heures d'expérience sur un chasseur occidental, mais qui n'a jamais piloté de F-16 auparavant, quelqu'un qui vient du F/A-18 Hornet par exemple, il lui faudra 69 jours pour apprendre tout ce qu'il faut pour utiliser le Viper en toute sécurité dans les rôles air-air et air-sol", commente un instructeur de F-16 expérimenté.

"Cela suppose qu'ils parlent bien l'anglais, car c'est la langue dans laquelle nous enseignons. Ces 69 jours comprennent six vols pour apprendre à piloter le jet et à le faire atterrir. Environ 15 vols air-air, mais s'ils ont déjà fait beaucoup de choses auparavant, vous pouvez réduire ce nombre à 10. Entre six et neuf missions air-sol, ce qui inclut l’apprentissage à l’utilisation des bombes à guidage laser et des munitions à attaque directe guidées par GPS. Cela leur donnerait une compréhension de base, au niveau de l'ailier, et cela suppose qu'ils sont déjà familiarisés avec les armes complexes telles que l'AIM-120 AMRAAM (pour Advanced Medium-Range Air-to-Air Missile)".

"Ils devront également suivre 210 heures de cours et 10 à 20 simulations. Vous ne pouvez pas faire cela rapidement - même en faisant deux simulations par jour, cela signifie 10 jours d'affilée. Ces 69 jours signifient donc que le pilote peut potentiellement utiliser le jet en toute sécurité dans un environnement d'entraînement tactique. Voler en combat est une toute autre histoire."

"Aller au combat contre un Su-35, voire un Su-27 dans un espace aérien contesté - là, vous parlez d'années d'expérience. Vous ne pouvez pas faire cela avec un tout nouveau pilote qui a tout vu une fois ! Vous pouvez disposer de toutes les capacités du jet, mais si le pilote ne sait pas comment l'utiliser correctement, cela ne sert à rien. Donc, pour un pilote venant d'un MiG-29, devoir apprendre une toute nouvelle PVI [interface pilote-avion] où tout semble différent, utiliser des armes dont il n'a jamais lu que l'existence, lui donner une formation de trois mois puis le lancer au combat - c'est vraiment un défi de taille !"

"Le passage du MiG-29 à un Viper Block 50 ou Mid-Life Upgrade n'est pas un grand pas en termes de performances, mais c'est un énorme saut technologique, tant les armes que l'avionique. Même après 69 jours d'entraînement intensif, il ne s'agit que d'une qualification d'ailier, alors qui va diriger la mission ? Qui va mener la mission ? L'envoyez-vous simplement comme un appareil solitaire pour essayer d'abattre tout ce qui bouge ? Pour être super efficace, il faut au moins quatre avions, et pour les diriger, il faut au moins un an d'entraînement intensif - ensuite, on peut littéralement écraser toute opposition."

"Au départ, la réponse devrait se baser sur la construction d'un nouveau syllabus basé sur les besoins spécifiques de l'Ukraine et le scénario de menace, et pour ensuite amener cela au combat, il faudrait entre six et douze mois d'entraînement. Ce serait toujours risqué, mais cela pourrait l'emporter sur les récompenses."


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Un F-16 affecté à la 162ème escadre de chasse, basée à Tucson en Arizona. © US Air National Guard/ Sgt H. E. Stramler


De nombreux opérateurs internationaux de F-16 choisissent d'envoyer leurs pilotes se former aux États-Unis pour la qualification initiale. Les pilotes d'Europe de l'Est, Pologne et Roumanies effectuent des entraînements F-16 avec ceux de la 162ème escadre de la Garde Nationale Aérienne sur la base de Morris à Tucson, en Arizona. Cette base pourrait constituer un lieu idéal pour la formation des aviateurs ukrainiens.

Un autre pilote de F-16 a déclaré que l'armée de l'air américaine pourrait facilement intégrer six à douze pilotes ukrainiens dans un cours de formation sur F-16 Viper en relativement peu de temps et leur donner un programme ciblé leur permettant d'acquérir les compétences spécifiques dont ils auront besoin sur leur théâtre d’opération.

Les rôles de combat envisagés pour des F-16 ukrainiens devront être soigneusement examinés. Un chasseur moderne, monoplace et multirôle peut être facile à manier du point de vue du pilotage pur, mais les nombreux ensembles de missions disponibles impliquent une charge de travail proportionnellement élevée dans le cockpit. Il peut s'écouler de nombreuses années avant qu'une armée de l'air ne mette sur pied un escadron de chasseurs multirôles pleinement opérationnel, même avec un appareil éprouvé et relativement facile comme le F-16.


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Un F-16CM de l'USAF transportant notamment un missile antiradar de grande vitesse AGM-88 HARM. © Jamie Hunter


Si l'on ajoute à l'équation un missile air-air occidental avancé comme l'AIM-120 AMRAAM, alors les pilotes ukrainiens devront aussi acquérir d’autres compétences. "Vous parlez maintenant de travail au radar, d'emploi à longue portée, de ciblage et d'identification des cibles. Tout cela est très différent sur une plate-forme occidentale de quatrième génération que sur une plate-forme un peu antique comme celles de l'ex-Union soviétique. Les écrans du cockpit sont présentés différemment, la cinématique des missiles et le mode de fonctionnement des missiles russes et occidentaux sont très différents."

L'objectif final est crucial

Une question importante concerne la manière dont l'Ukraine bénéficierait réellement de la réception d'avions de combat de quatrième génération. Quel serait le gain militaire, et que pourraient réellement réaliser les F-16 ukrainiens ?

Un ancien pilote de F-16 a déclaré : "En ce qui concerne l'emploi de chasseurs en Ukraine, nous devons nous demander ce qu'ils cherchent réellement à faire. Si l'on se réfère au partenariat historique étroit de la California Air National Guard avec les Flankers ukrainiens, même avant le début du conflit, une majorité des missions ukrainiennes étaient effectuées à basse altitude, en dessous de 1 000 pieds."

"Aujourd'hui, le vol à basse altitude en Ukraine est, de manière réaliste, tout ce que les pilotes de chasse ukrainiens peuvent exécuter sans encourir un risque énorme, quelle que soit la plate-forme non furtive qu'ils utilisent. En Ukraine, nous parlons actuellement d'opérer dans un environnement complètement différent de la norme occidentale."

Alors que les chasseurs furtifs de cinquième génération jouiraient d'une plus grande liberté d'action dans ces zones hautement contestées, tout appareil occidental de quatrième génération serait paralysé par la densité du réseau de missiles sol-air.


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Le F-16 C/D Block 50/52 est spécialisé dans les missions de suppression de la défense aérienne ennemie. © Jamie Hunter


"Je pense qu'il est de plus en plus probable que l'ensemble du théâtre ukrainien deviendra de plus en plus un environnement d'accès interdit et de zones interdites où il sera de plus en plus difficile pour les avions à voilure fixe d'obtenir des résultats. Avec des SAM à deux chiffres à la frontière de la Russie et de la Biélorussie, et l'Ukraine prête à recevoir des batteries de missiles Patriot des États-Unis, il est probable que l'emploi à basse altitude perdurera, ce qui est potentiellement mieux adapté aux appareils à voilures rotatives, bien que les hélicoptères soient toujours à la merci des MANPADS et des systèmes à très courte portée".

La Russie ne semble pas effectuer de patrouilles régulières de chasseurs ou de bombardiers au-dessus de l'Ukraine, préférant effectuer des patrouilles aériennes de combat (CAP) au-dessus du territoire russe et frapper à très longue portée en raison de l'environnement aérien au-dessus de l'Ukraine, acceptant ainsi les incertitudes de ciblage et l'imprécision de son armement. La Russie est prête à lancer des missiles de croisière à longue portée vers une zone générale, et avec de tels profils d'emploi, des dommages collatéraux importants sont inévitables.

Selon un rapport récent du groupe de réflexion du Royal United Services Institute (RUSI), les chasseurs russes, notamment les MiG-31BM et les Su-35S, assurent généralement une couverture aérienne des zones situées au-dessus de la zone opérationnelle, mais leurs CAP se situent généralement au-dessus de la Russie et de territoires ukrainiens tenu par les Russes, y compris la Crimée.


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Un MiG-31BM est chargé de missiles air-air R-33 en Crimée. © Zvezda TV


Le plan tactique qui entourerait la fourniture de nouveaux chasseurs occidentaux à l'Ukraine aura un impact majeur sur le feu vert pour la fourniture de F-16. Alors que les responsables ukrainiens affirment avoir besoin d'un avion de combat doté d'un bon radar et de missiles comme l'AMRAAM à longue portée pour tenir en échec les chasseurs et les bombardiers russes, les responsables américains devront évaluer les enjeux d'une telle décision et se demander si la puissance aérienne a encore un rôle important à jouer sur ce théâtre. Il est possible que le domaine aérien ait moins d'influence à l'avenir en Ukraine, d'autant plus que la menace anti-aérienne augmente et que les forces terrestres combattent dans des zones urbaines où la puissance aérienne à voilure fixe a peu de chances d'avoir un impact significatif.

L'Ukraine a déjà reçu des systèmes de défense aérienne Kongsberg-Raytheon National Advanced Surface-to-Air System (NASAMS), qui sont armés d'AMRAAM. Alors qu'un chasseur équipé d'AMRAAM offrirait à l'Ukraine une défense encore plus grande contre les attaques de missiles à longue portée et de drones russes, l'Ukraine a souligné que tout nouveau chasseur équipé d'AMRAAM pourrait contrer efficacement les chasseurs russes Su-35S et MiG-31BM avec leurs énormes portées radar et leurs missiles air-air à plus longue portée, tels que le puissant missile air-air à longue portée R-37M.

Les responsables ukrainiens déclarent : "Notre priorité, tout d'abord, est d'abattre leurs plates-formes d'attaque au-dessus des lignes de front, et pas seulement de chasser leurs avions de chasse, car il faut beaucoup de ressources pour cela (…) Tout d'abord, nous devons couvrir nos territoires, puis nos forces terrestres, et après cela, bien sûr, nous pouvons essayer de simplement nous amuser avec leurs avions de chasse. Ce sera un grand défi. Mais malgré tout, un nouveau matériel signifie de nouvelles tactiques, une nouvelle doctrine pour toutes les opérations, et j'espère que tout cela nous aidera à réussir et que les Russes ne se sentiront pas à l'aise, même dans leur propre espace aérien."


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Un AIM-9 Sidewinder (à gauche) et un AIM-120 AMRAAM (à droite) chargés sur un F-16. © Jamie Hunter


Une grande question se pose quant à savoir lesquels des différents armements du F-16 l'Ukraine obtiendrait réellement. L'AMRAAM et les armes intelligentes représenteraient clairement un énorme bond en avant en termes de capacités pour l'armée de l'air ukrainienne, mais s'ils sont ramenés à des missions à basse altitude et à longue distance de la menace aérienne, même l'AMRAAM pourrait être impuissant. "Je considère l'AMRAAM comme un point de friction politique potentiel, encore plus important que le transfert des missiles Patriot", déclare un pilote de F-16. "La sécurité qui l'entoure et son emploi à très longue portée signifient que la barre est politiquement très haute pour cette arme en termes de transfert. Si l'on ajoute à cela la façon dont les pilotes ukrainiens opèrent, cela pourrait signifier que l'investissement politique dans le don de cette arme ne tient tout simplement pas la route."

L'administration Biden reste méfiante à l'idée de laisser des technologies américaines sensibles tomber entre les mains des Russes sur le champ de bataille. Mais une fois de plus, l'Ukraine dispose d'AIM-120 et l'utilise d’ores et déjà activement.

Les États-Unis ont limité certains clients exportateurs de F-16 à l'AIM-7 Sparrow, le missile guidé par radar que l'AMRAAM a finalement remplacé. Bien qu'ils aient reçu des Vipers flambant neufs, les irakiens ont des appareils d’une capacité réduite qui ne comprend pas l'AMRAAM. L'Égypte, opérateur de longue date de F-16, ne dispose toujours pas d'AMRAAM sur ses Vipers. Cela est dû à un certain nombre de raisons, allant de la technologie aux préoccupations de parité dans la région.
En outre, une discussion de longue haleine porte sur la fourniture à l'Ukraine de bombes à guidage GPS JDAM (Joint Direct Attack Munition). Ce point est également susceptible de jouer un rôle important dans la conversation politiques autour du F-16, un avion qui compte des armes intelligentes air-sol de très haute précision notamment. En l'état actuel des choses, l'Ukraine reçoit déjà des JDAM pour équiper une plate-forme inconnue. Cela donnerait à l'Ukraine une capacité potentielle d'armement guidé d’une tonne lorsqu'elle est associée à un avion.

Il existe de nombreuses autres armes que le F-16 peut déployer - c'est peut-être là son plus grand avantage. Cela est particulièrement vrai pour l'Ukraine, qui pourrait se voir fournir rapidement de nouvelles capacités à mesure que ses partenaires alliés le jugent nécessaire, notamment l'introduction d'armes d'attaque au sol à distance de sécurité. L'Ukraine reçoit également déjà des bombes de petit diamètre (SDB), sous une forme rare, lancées depuis le sol. Les F-16 pourraient également les déployer de manière très souple, bien que la situation de défense aérienne dense évoquée précédemment au-dessus de l'Ukraine, qui limite les altitudes d'exploitation à proximité du front, réduise également considérablement la portée de ces bombes planantes.

On pourrait faire valoir qu'à mesure que l'Ukraine devient plus compétente avec le F-16, elle pourrait utiliser ce type d'appareil pour affaiblir le parapluie anti-aérien de la Russie dans certaines zones, au moins pour des opérations combinées ponctuelles. L'Ukraine dispose déjà du missile antiradar AGM-88 High-Speed Anti-Radiation Missile (HARM) qui est utilisé de manière improvisée sur les chasseurs MiG-29 et Su-27 du pays. Un F-16, avec sa suite avionique et ses systèmes de détection modernes, peut faire un usage bien plus dévastateur de cette arme. Mais, une fois encore, cela ne serait probablement pas dans l'avenir immédiat pour une armée de l'air ukrainienne équipée de F-16.

Quoi qu'il en soit, en gardant tout cela à l'esprit, la conversation politique est donc bien plus large que le simple fait de leur envoyer des F-16, oui ou non ? L'Ukraine se verra-t-elle livrer des F-16 équipés de bombes "muettes" Mk 82 et d'AIM-9 Sidewinders à détection de chaleur, ou des F-16 équipés d'AMRAAM et d'armes à distance de sécurité ?


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Ce F-16C porte des AIM-120 AMRAAM à ses extrémités d'aile. © Jamie Hunter

La réalité n’est pas facile

Le fait pour les ukrainiens de continuer à exploiter des MiG et des Sukhois et d'augmenter la taille de ces flottes pourrait en fait présenter des avantages par rapport à l'arrivée d'avions à réaction occidentaux. L'exploitation de types similaires à ceux de la Russie contribue à compliquer la situation aérienne pour les assaillants russes. La charge d'entraînement supplémentaire serait très faible à un moment où le rythme des opérations est élevé, et la chaîne logistique est déjà partiellement en place.

L'Ukraine a également demandé à plusieurs reprises des chasseurs supplémentaires de fabrication russe pour renforcer sa flotte en déclin. S'il n'y a pas de sources évidentes pour les Su-27, des efforts répétés ont été déployés pour obtenir des MiG-29 de Bulgarie, de Pologne ou de Slovaquie. Le transfert de ces appareils avec des capacités modernisées, comme l'ajout de l'AGM-88 HARM, comme cela a déjà été fait, ou l'ajout d'AMRAAM, a été présenté comme un moyen potentiel de renforcer l'armement aérien tactique de l'Ukraine. Mais des pilotes urkainiens ont fait remarquer que cela n'avait guère de sens : "C'est trop long, trop cher et trop compliqué d'intégrer des systèmes air-air modernes sur un vieux jet". En outre, les missiles à radar actif seront mal adaptés aux radars qui équipent leurs avions de conception soviétique, même si cela pouvait se faire.

Quoi qu'il en soit, une telle mesure clopin-clopant ne fournira pas à l'Ukraine un avion de combat pour son avenir à long terme et ne fait que retarder l'issue probablement inévitable - l'utilisation par l'Ukraine de chasseurs occidentaux. En outre, cela ne contribue en rien à dissuader les futures agressions russes sur le long terme.

Si l'Ukraine obtenait le feu vert pour des F-16 Vipers, ses pilotes pourraient en fin de compte se former assez rapidement grâce à un programme d'entraînement très condensé, spécifiquement conçu pour couvrir des utilisations basiques. Il ne serait pas dans un premier temps nécessaire de couvrir l'ensemble du spectre multi-mission d’un F-16 moderne.
Si les pilotes ukrainiens apprenaient simplement à piloter ce chasseur, en jetant un coup d'œil rapide à certaines applications air-sol de base - en utilisant probablement des armes non guidées dans un premier temps - et en se familiarisant avec le Sidewinder pour les combats air-air, ils pourraient probablement être jugés compétents en quelques semaines. Mais cela ne donnerait pas à l'Ukraine ce qu'elle demande. Cette demande prendra plus de temps et s'inscrira dans le cadre d'une transition plus large des avions de combat qui s'étalerait sur plusieurs mois, voire plusieurs années, et non sur une poignée de semaines.

Donc, pour des F-16 en Ukraine, il y a certainement une possibilité réelle. Mais y a-t-il une volonté politique ? Nous le saurons tôt ou tard et d'une manière ou d'une autre.


FIN

#85 Vos expériences et vos récits aéronautiques » [Réel] Des fantômes chez Topgun à Miramar ? » 23/12/2022 21:04

philouplaine
Réponses : 2

Bonjour chers amis,
À l’approche de Noël, voici une histoire assez curieuse, peu connue, sur des apparitions étonnantes dans le fameux Hangar One de la base de Miramar qui abrita la non moins fameuse Ecole de l’Aéronavale américaine Topgun ... Bref ce hangar serait hanté … À vous de juger.
J’ai pensé que cette histoire pourrait vous intéresser …
Bonne lecture !
Philippe




LE HANGAR HISTORIQUE DE TOPGUN A LA MARINE CORPS AIR STATION DE MIRAMAR EST CONNU POUR ETRE HANTE

Le célèbre hangar de Topgun a été le théâtre d'une horrible tragédie en 1969 et, depuis, de nombreux témoignages y font régulièrement état de manifestations de fantômes.

Par Tyler Rogoway



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Article original en Anglais


Quand il s'agit d'installations militaires, de navires et même d'avions hantés, un endroit vient à l'esprit plus que tout autre. Il s'agit de l'historique Hangar One de Miramar, construit au début des années cinquante, qui a accueilli pendant des décennies l'école d'armement de la marine, plus connue sous le nom de Topgun, et qui a également fait l'objet de deux films culte du même nom.

Il y a beaucoup d’histoires, peu connues dans le grand public, qui circulent parmi les militaires sur le Hangar 1 qui serait hanté. Je suis tombé sur cette histoire par hasard au milieu des années 1990, lorsque, adolescent, j'ai passé du temps sur la base, alors fièrement appelée "Fightertown USA" grâce à un ami de la famille. J'ai notamment passé de longs moments dans le simulateur de F-14A, ce qui a été un vrai moment fort jusqu'à aujourd'hui.

Une fois, j’étais dans les hangars de la VF-101, qui étaient situés en face du groupe de hangars qui soutenaient le programme adversaire et Topgun, avec des mécaniciens qui étaient en train de changer le moteur d'un Tomcat. Ils ont dit à d’autres mécaniciens qui passaient qu'ils seraient là jusqu'à tard dans la nuit. Un autre mécanicien leur a alors répondu sans rire quelque chose comme "Mieux vaut pour vous ici que dans le Hangar 1, les nuits là-bas peuvent être aussi effrayantes que l'enfer !". J'ai demandé à l'instructeur Tomcat de haut niveau qui m'accueillait ce qu'il en était et il m’a répondu que le Hangar 1 était réputé pour être hanté.

Au fil des ans, cette chose m'est restée en tête et j'ai été amené plus tard à interroger d'autres membres du personnel de Topgun à ce sujet. Certains m’ont alors dit leurs expériences personnelles de rencontres avec des fantômes (pas du tout rares apparemment), généralement au niveau du labyrinthe de bureaux qui sont disposés au-dessus du hangar. L'un d'entre eux a même entendu un violent crash d’un avion sur le hangar et des cris alors qu'il travaillait tard seul dans l’un des bureaux du premier étage du Hangar 1. Descendant très vite dans le hangar proprement dit, il trouva l'endroit paisible et sans aucuns dégâts visibles.

Le Hangar One a certainement connu beaucoup d'histoire. Voici comment Paul Nickell, alors pilote-élève à Topgun puis, plus tard, instructeur sur F-14 Tomcat dans les années 1980, a décrit l'endroit pour l'école d'élite de la Navy Fighter Weapons School :

"D’après ce qu’on m’a dit, ce hangar était le deuxième plus vieux hangar de la base de Miramar, mais tout le monde l’appelait de son nom officiel : Hangar 1. Il se trouvait à l'extrémité est de la piste 24 droite, juste au nord de la ligne d'attente. Très probablement construit dans les années 1950, il n'était pas là au début des années 1940 lorsque mon père était stationné ici à Camp Kearny (ancien nom de la base de Miramar) en tant que radio sur bombardier B-24 Liberator.


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Camp Kearny dans les années 1940.

Ce hangar a survécu à une terrible tragédie ayant eu lieu en décembre 1969, quand un F-8 Crusader, duquel le pilote s’était éjecté, s’est écrasé dessus à la suite d’une panne moteur au décollage. Une terrible tragédie qui coûta la vie à 14 personnes.

Sur le côté nord du hangar, face à la route, le mot "TOPGUN" était écrit en grosses lettres bleues.  À l'époque, Topgun n'était pas un mot très connu. L'Américain moyen n'avait aucune idée de ce que c'était, mais cela allait bientôt changer. Après nous être garés dans le parking d'en face, nous sommes passés devant deux grandes bennes à ordures sur le côté de l'entrée du parking, avons traversé la rue, monté quelques marches et rendu le salut du garde. À environ 15 mètres, dans le coin nord-est du hangar, se trouvait une porte métallique bleue. Au-dessus de la porte se trouvait un panneau métallique blanc vissé au revêtement métallique gris ondulé, sur lequel on pouvait lire "WELCOME TO NAVY FIGHTER WEAPONS SCHOOL" en lettres noires au pochoir. Au centre de l'enseigne se trouvait un grand autocollant de l'emblème Topgun. 
En franchissant la porte, nous nous trouvions devant un escalier qui montait jusqu'au 1er étage, puis revenait en arrière pour terminer le trajet jusqu'au deuxième niveau. Les murs de la cage d'escalier étaient peints en blanc brillant et étaient couverts de silhouettes rouges soigneusement espacées d'avions MiG abattus au Vietnam.  Sous chacune d'elles figuraient le nom de l'équipage et la date de la victoire aérienne. Les deux silhouettes peintes les plus récentes représentaient deux MiG lybiens."


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La célèbre cage d'escalier du Hangar 1 de l’école des Topgun à la NAS Miramar. L'école Topgun est maintenant située à la NAS Fallon au Névada dans des locaux bien plus modernes. © US Navy


En haut de l'escalier, nous avons tourné à gauche et commencé à longer un long couloir. Le côté droit était solide et constituait le mur extérieur du hangar. Il y avait dedans un peu plus loin dans ce couloir une ouverture sur la droite, de la taille d'une porte à deux battants, avec un dispositif métallique en accordéon en travers pour que personne ne puisse accidentellement sortir par l'ouverture et tomber de 6 mètres sur le tarmac en dessous. Le reste du mur était couvert d'un petit groupe de photos du personnel actuel de Topgun et de plaques. Il y avait plusieurs rangées de plaques sur toute la longueur du couloir, probablement 100 mètres ou plus. Chaque plaque était le cadeau d'un équipage qui avait suivi une formation à Topgun, et chacune avait une histoire unique derrière elle. Il y en avait littéralement des centaines. 

Sur le côté gauche du couloir se trouvaient les bureaux de l'escadrille. Les bureaux du commandant et du second étaient les premiers, avec celui pour leur secrétaire en face. Il y avait une petite salle de préparation où l'officier de service de l'escadrille s'installait pendant les opérations de vol. Il y avait plusieurs salles de briefing et de débriefing, ainsi que deux salles de classe relativement grandes. Au-delà, il y avait le bureau des opérations et le bureau de la formation. Nous avons été dirigés vers la salle de classe 1, dont les murs étaient élégamment décorés de panneaux de bois. Il y avait des tables et des chaises pour asseoir environ 35 étudiants, plus une rangée de chaises sans tables à l'arrière pour les invités supplémentaires.

Le côté gauche de la salle de classe était équipé d'une unité de climatisation qui rejetait la chaleur et l'humidité de la salle de classe dans le hangar.  Il y avait de grands téléviseurs dans les coins. À l'avant de la salle de classe se trouvaient un tableau blanc, un podium et un écran pour projeter des diapositives par l'arrière. À de nombreux endroits de la pièce se trouvaient des maquettes de différents types d'avions de combat américains et des potentiels agresseurs, fixées à des chevilles en bois qui pouvaient être utilisées à des fins de briefing et de débriefing. La plupart des meubles de cette pièce et des autres espaces avaient probablement été récupérés ailleurs dans la base ou échangés par le biais typique du système d'approvisionnement de la Marine. Évidemment, aucun de ces meubles ne semblait assez beau pour avoir eu des origines sur une base de l'armée de l'air".

Donc oui, en lisant ce témoignage, on se rend compte que le Hangar 1 de Miramar offrait un environnement de travail assez rustique si l'on considère que la pointe du développement des tactiques de chasse des Marines y a été développé pendant plus d’un quart de siècle.

Le terrible crash mentionné par Paul Nickell est considéré par beaucoup comme la source des phénomènes supposés. L'accident a été épouvantable, littéralement le pire des scénarios, qui a coûté la vie à de nombreuses personnes et laissé des cicatrices visibles dans le hangar. La convergence de cette tragédie historique et des phénomènes étranges qui ont persisté à l'intérieur du hangar, même après que l’US Navy ait cédé cette base au Corps des US Marines en 1997, a donné lieu à une histoire officielle de l'US Marine Corps à ce sujet. Bien que cette histoire ne soit plus accessible, elle a été publiée. On peut donc encore la lire dans son intégralité actuellement sur le website officiel du corps des US Marines.

La voici.

"STATION AÉRIENNE DES US MARINES MIRAMAR, Californie
Des fantômes dans le Hangar 1 à Miramar.
Soumis par : MCAS Miramar
Numéro d'identification de l'histoire : 200419113431
Récit du caporal Tara Dawn Smith

L'histoire fait revivre des événements et des vies du passé à des fins de réflexion ou d'examen. Cependant, il semble que dans le cas du Hangar 1 à Miramar, il semble que c’est l'histoire qui cette fois visite le présent... sous la forme de fantômes.
Selon M. Joe Glasser, représentant à Miramar de la firme Martin-Baker qui fabrique des sièges éjectables, pas mal de gens ont rencontré les habitants non-corporels du hangar. M. Glasser nous a expliqué que l'un de ces événements fantomatiques s'est produit une fin d'après-midi, à l’époque où Miramar passait au corps des US Marines.

Un officier du Marine Aircraft Group 11, qui était alors affecté à El Toro, a frappé à la porte du bureau de M. Glasser et a expliqué qu'il venait inspecter les bureaux au 1er étage du hangar. M. Glasser a acquiescé et l’officier est monté au 1er étage. Vingt minutes ont passé et l'officier a de nouveau frappé à la porte de Glasser. Cette fois-ci cependant, l'officier était tout essoufflé et extrêmement pâle.

Lorsque l'officier de marine a été en mesure de calmer son inquiétude, il a demandé s'il y avait déjà eu, auparavant, des rapports d'événements inhabituels dans les couloirs du 1er étage. M. Glasser a répondu qu'il avait déjà entendu parler en effet des rumeurs de rencontres avec des "visiteurs de l’au-delà", mais à chaque fois ces histoires lui étaient rapportées ce n’était pas des témoignages directs. Alors, l’officier qui avait entretemps repris sa contenance, lui raconta ce qu’il avait vu à l’étage.

Les longs couloirs de l'étage font qu'il est difficile pour quiconque s’y déplace de se soustraire rapidement à la vue. Ainsi, lorsque l'officier du Group 11 après être entré dans un des bureaux du 1er étage a entendu des bruits de pas et vu une ombre passer dans le couloir à travers le verre dépoli du bureau, il s'attendait ce que quelqu'un qui se promenait dans les couloirs entre dans le bureau où il était. Ce qui s’est passé ensuite est troublant. Lorsque l'officier ne voyant personne rentrer dans le bureau mais la silhouette continuer son chemin, il s’est levé et est allé ouvrir la porte pour chercher la personne qui marchait dans le couloir mais il n'a rien vu d'autre qu'un couloir totalement vide.

Ces contacts avec le surnaturel soulèvent la question suivante : quels sont les événements passés du hangar qui pourraient le faire abriter d'anciens résidents du bâtiment, aujourd'hui décédés ? M. Jim Bradbury, qui était le représentant de Martin-Baker en 1969, pourrait savoir quelque chose sur l'histoire hantée du Hangar 1.

M. Bradbury a expliqué qu'il visitait la base pour affaires le 22 décembre 1969 lorsqu'il a été témoin d'un événement tragique qui a fait 14 morts. Le pilote d'un F-8 Crusader de l'escadrille VF-191 de l’aéronavale, qui fut dissoute en 1978, s'est éjecté au-dessus de Kearny Villa Road après que le moteur de l'avion se soit grippé, mais l'avion désemparé a poursuivi sa course et, franchissant les portes ouvertes du hangar, est entré dedans et s’est écrasé contre le mur nord. Le carburant s'est immédiatement enflammé et la boule de feu a englouti plusieurs mécaniciens dans le hangar. Un des mécaniciens qui travaillait sur le système du siège éjectable d’un avion dans le hangar au moment de l'événement a été éjecté et s’est écrasé contre le toit du hangar. Six F-4 phantoms stationnés dans le hangar ont été détruits dans la collision. Les fissures encore visibles sur le mur nord du hangar sont la cicatrice du crash.

Les dommages durables subis par le hangar 1, toujours visibles, et les phénomènes surnaturels qui s’y montrent ne sont pas la seule façon dont cette tragédie et le sacrifice des militaires qui y ont payé le prix ultime y sont rappelés aux vivants. Un mémorial situé sur le terrain de golf de la base témoigne de l'événement et commémore les personnes qui ont perdu la vie dans le Hangar 1 ce 22 décembre 1969. Une plaque portant les noms de toutes les personnes décédées se trouve au sud du terrain d'entraînement, ce qui permet de perpétuer la mémoire et l'histoire de ces 14 militaires."


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Les conséquences du crash du F-8 en 1969. © US Navy

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Formation de F-8 Crusader de la VF-191. © US Navy


Il y a quelques années, je discutais avec un technicien militaire qui avait travaillé dans ce hangar dans les années 1990. Il m'a raconté quelques histoires effrayantes dont il avait entendu parler et une qu'il avait lui-même vécue, celle d'une silhouette humaine ressemblant à une ombre qui s'approchait de lui dans un des couloirs du 1er étage du hangar avant de disparaître soudainement.

Je lui avais alors demandé s'il avait entendu de nouveaux témoignages selon lesquels le hangar serait toujours hanté. Il a répondu : "Il faut croire que lorsque les fantômes de l’US Navy ont finalement réalisé que la base avait été confiée à ce putain de corps des US Marines, ils ont dégagé de là!".

Il faut aimer les vieux marins, même la tragédie et les esprits qui se manifestent ne peuvent leur enlever le sens de l'ironie et de l'humour.

FIN

#86 Vos expériences et vos récits aéronautiques » [Réel] La modernisation de notre aéronavale vue des USA » 07/12/2022 14:12

philouplaine
Réponses : 2

Bonjour chers amis,

On trouve chez nos collègues américains des informations détaillées sur ce qui se passe … en France dans notre armée !
Je vous ai traduit de l’anglais deux articles récents portant sur ce que les américains savent et pensent de la modernisation menée dans notre aéronavale. Le premier article porte sur notre futur porte-avions, le PA-NG (ou PA-Ng pour les américians), et le second porte sur la modernisation de notre flotte de Breguet-Dassault Atlantique 2, les ATL 2. La mise en service du porte-avions PA-Ng est prévue pour 2038, celle des ATL2 au nouveau standard est d’ores et déjà en cours, le service des ATL 2 est ainsi repoussé jusqu’en 2035.

Le premier article traduit porte sur notre futur porte-avion, le R92, que les américains appellent le PA-Ng et nous, le PANG … alors "g" minuscule ou "g" majuscule ? Nous disons même PANG pour porte-avions à propulsion nucléaire de nouvelle génération, c’est sûr c’est plus pratique de dire l’abréviation.

Mais que veut dire PANG en anglais et, interrogation subséquente, à quoi pense immédiatement un anglo-saxon quand il voit qu’on désigne notre futur porte-avion comme un "PANG ? En anglais, pang veut dire "douleur" et plus particulièrement, en anglais américain, c’est utilisé pour dire "pincement" très précisément dans "pincement de nerfs" … the pang of nerves … mais pang est aussi utilisé pour dire : l’angoisse de Dieu : the Divine pang. Pas trop mal finalement pour le nom d’un navire de guerre, non ?

Vous pourrez voir dans le second article ce que les américains pensent de cette modernisation concernant un équipement pas si récent (mise en service des ATL 2 dans l’Aéronavale en octobre 1989) d’un de leur proche allié dans l’OTAN. Mais, après tout, le fer de lance de leurs bombardiers n’est-il pas le Boeing B-52, mis en service en juin 1955 …
J’ai pensé que ces deux articles présentés ensemble pourraient vous intéresser.

Bonne lecture!
Philippe





Texte de Mer & Marine

A l’occasion du salon Euronaval, Naval Group et le ministère des Armées ont dévoilé hier une nouvelle maquette du porte-avions français de nouvelle génération (PA-NG), qui succèdera en 2038 au Charles de Gaulle. Son design continue d’évoluer au fil des études, en particulier au niveau de l’îlot, ce modèle n’étant cependant pas encore définitif. Il faut donc éviter de tirer des conclusions hâtives sur tous les éléments présentés sur les maquettes et les nouveaux visuels que nous publions dans cet article. Certains choix restent encore à trancher et des éléments d’architecture seront affinés au cours de la suite des études. En particulier la phase d’avant-projet détaillé (APD), qui doit débuter en mars 2023 et suivra la phase d’avant-projet sommaire (APS) débutée en mars 2021. L’APD doit pour mémoire déboucher sur la signature du dossier de lancement en réalisation (DLR) en 2025. La commande du bâtiment sera alors notifiée, le programme étant industriellement piloté par MO Porte-Avions, 65% pour Naval Group et 35% Chantiers de l’Atlantique.



PREMIER ARTICLE


VOICI A QUOI RESSEMBLERA LE FUTUR PORTE-AVIONS GEANT DE LA FRANCE

Ce porte-avions français, qui déplacera près de 82 600 tonnes, a vu son design initial mis à jour avec notamment une nouvelle configuration des superstructures en îlot.

Par Oliver Parken, The War Zone, 20 octobre 2022

Article original en Anglais


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Le futur porte-avion PA-Ng tel que représenté dans l'un des nouveaux rendus du consortium entre Naval Group et les Chantiers de l’Atlantique. © Naval Group


De nouveaux rendus et une nouvelle maquette du futur porte-avions à propulsion nucléaire français, destiné à remplacer l'actuel R91 "Charles de Gaulle", ont été révélés tout récemment par le constructeur naval français Naval Group, qui appartient en partie à l'État. Les nouvelles vues de ce qui est actuellement connu sous le nom de "porte-avions de nouvelle génération", ou PA-Ng, ont été présentées par le constructeur naval lors de la conférence EuroNaval 2022 à Paris le 18 octobre dernier.


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Programme industriel d'envergure au service de la souveraineté française, la construction du PANG est pourvoyeur d'emplois sur tout le territoire français. Il est le fruit d'une puissante alliance industrielle entre Chantiers de l'Atlantique et Naval Group qui sont tous deux maîtres d'œuvre à travers notre Joint Venture "MO Porte-Avions". © Naval Group

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Illustration du PANG R-92 présentée à EuroNaval 2022. © Naval Group


Le futur porte-avions français PA-Ng est doté d'une conception de type CATOBAR (Catapult Assisted Take-Off Barrier Arrested Recovery), d'un pont incliné et d'une superstructure en îlot relativement petite située sur le côté et à l'arrière et dotée d'antennes radar à balayage électronique actif (AESA) encastrées. En fait, il ressemble à certains égards, avec un air de petit cousin, aux porte-avions de la nouvelle classe Ford de l’US Navy. C’est en décembre 2020 que le président français Emmanuel Macron a annoncé que son gouvernement avait lancé le programme de développement d'un nouveau porte-avions à propulsion nucléaire, un navire dont les études préliminaires avaient commencé en 2018. Ce PA-Ng est destiné à remplacer l’actuel porte-avions Charles de Gaulle en 2038. 


Vidéo sur Twitter (Durée 35sec)


Plusieurs différences clés dans la conception du PA-Ng sont perceptibles lorsqu'on compare les rendus antérieurs de ce porte-avions publiés par Naval Group et par le ministère français des Armées en 2020 avec les nouveaux rendus présentés à EuroNaval 2022. Ces différences portent sur une conception retravaillée de l'îlot de commandement du navire, des modifications du pont d'envol et des changements aux différents caissons de protection placés de chaque côté du navire.

La forme et la taille de l'îlot du porte-avions passe d'une forme elliptique initiale à une configuration plus carrée. Il est également à noter que la disposition des hublots de la passerelle a été modifiée, ainsi que l'emplacement et la configuration des dômes recouvrant le château. Bien que les quatre panneaux radar SeaFire, initialement vus dans les rendus de 2020 soient toujours là, le sommet en forme de cône de l'îlot de commandement a été remplacé par une configuration différente qui met mieux en évidence les dômes de communication par satellite.


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Illustration montrant la version initiale du PA-Ng avec son ilot de commandement de forme elliptique. © Naval Group

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Vue de face du PA-Ng en 2022 avec son ilôt de commandement plus rectiligne. © Naval Group


L'évolution de l'îlot principal du navire est encore plus évidente si l'on compare le modèle de navire présenté à EuroNaval 2022 à un modèle antérieur qui avait été montré au président Macron en décembre 2020. Un nouveau point de décollage et d'atterrissage pour hélicoptères a également été ajouté à la zone du pont d’envol située derrière l'îlot de commandement, aux côtés d'une zone de maintenance des aéronefs.

Des différences peuvent également être observées dans le placement des diverses projections latérales qui fournissent une extension utilitaire pour le placement d'armes et de capteurs, entre autres utilisations. Le rendu de 2020 de Naval Group montre clairement deux caissons de protection en saillie vers la proue du navire, qui semblent supporter des systèmes d'armes rapprochées Rheinmetall Oerlikon Millennium Gun, entre autres radomes. Toutefois, dans la version actualisée de 2022, ces caissons ont été déplacés et les systèmes d'armes rapprochés ont été repoussés plus loin vers la poupe du navire.

Il faut également noter que les nouveaux rendus et la nouvelle maquette donnent une idée plus précise du nombre d'avions que le porte-avions pourrait accueillir en position de stationnement sur son pont. Dans les rendus de 2020, deux illustrations distinctes montrent le bord droit du porte-avions avec un nombre différent de places de stationnement devant le château - l'un avec 10, l'autre avec 8. Les rendus et la maquette de 2022 montrent tous deux le bord droit du porte-avions avec 8 places de stationnement, ce qui indique que, pour l'instant du moins, Naval Group s'est décidé pour un total de 8 places de stationnement de ce côté et non plus 10.


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Représentation de 2020 du PA-Ng, vue de côté, montrant 10 emplacements de stationnement pour avions sur le bord droit du porte-avions devant l'îlot de commandement. © Naval Group

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Autre représentation de 2020 du PA-Ng, vue de côté arrière cette fois, montrant 8 emplacements de stationnement pour avions sur le bord droit du porte-avions devant l'îlot de commandement. © Naval Group

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Une vue de 2022 du PA-Ng, montrant à nouveau 8 emplacements de stationnement pour avions sur le bord droit du porte-avions devant l'îlot de commandement. © Naval Group


La forme générale du pont d'envol a également été légèrement modifiée. Selon Xavier Vavasseur de Naval News, ce changement a été effectué pour permettre l'installation d'un troisième système électromagnétique de lancement d'aéronefs (EMALS) sur le porte-avions, si nécessaire. Les EMALS du PA-Ng seront fournis par General Atomics. 

Les dernières spécifications du PA-Ng, qui ont été communiquées avant le début d'EuroNaval 2022 par la Direction générale de l'armement (DGA), l'agence d'acquisition et de technologie de défense du gouvernement français, indiquent que le porte-avions aura une longueur totale de 310 m et un déplacement d'environ 82 500 tonnes. Le Charles de Gaulle, en comparaison, mesure environ 260 m et ne déplace que 42 500 tonnes métriques. Deux réacteurs nucléaires K22, livrés par TechnicAtome, alimenteront le système de propulsion du navire et le propulseront jusqu'à une vitesse de 30 nœuds (plus que le Charles de Gaulle), tout en fournissant de l'énergie électrique aux différents systèmes du navire. En outre, Naval News souligne que la DGA est toujours en train de peser un certain nombre d'options pour les systèmes d'armes et de capteurs du porte-avions, sans que rien ne soit encore "gravé dans le marbre".

Le PA-Ng devrait avoir un équipage d'environ 2 000 marins. Selon Olivier de Saint-Julien, président de MO Porte-Avions ("MO Porte-Avions" est une joint-venture entre Naval Group et les Chantiers de l'Atlantique, qui est chargée de la gestion globale du programme PA-Ng), une partie de l'équipage sera constituée d'ingénieurs avion. Christina Mackenzie, de Breaking Defense, cite de Saint-Julien, qui explique que la Marine française "veut être en mesure d'entreprendre à bord les types de réparations qui seraient normalement effectuées par le constructeur." Selon les derniers chiffres, les mécaniciens d'aéronefs du PA-Ng assureront l'entretien de la flotte du porte-avions, composée d'environ 30 chasseurs de nouvelle génération (NGF) et de chasseurs Rafale M de Dassault. Le navire transportera également des E-2D Advanced Hawkeyes et divers drones militaires.

Si l'on se fie au calendrier du programme du porte-avions, il est possible que d'autres changements soient apportés à la conception du PA-Ng au cours des prochaines années, avec la possibilité d'autres adaptations à long terme.  La phase d'études préliminaires du porte-avions ne devrait pas se terminer avant le premier trimestre 2023. En outre, selon Breaking Defense, M. de Saint-Julien affirme que le dessin final du PA-Ng ne sera pas fixé avant 2025. La décision de lancer la phase de développement et de production devrait intervenir fin 2025/début 2026 - une fois déclenchée, cette période s'étendra de 2026 à 2036.

M. de Saint-Julien indique également que la conception finale sera capable d'accueillir des technologies plus récentes à l'avenir, il a déclaré à ce propos : "Le PA-Ng sera conçu de manière à pouvoir être modernisé progressivement et le système de combat pourra évoluer (..) Nous ne savons pas aujourd'hui quel type de technologie sera disponible dans 15 ans, nous devons donc permettre aux nouvelles technologies d'être facilement adaptées dans le PA-Ng".

Le navire devrait être construit dans la cale sèche des Chantiers de l'Atlantique à Saint-Nazaire, sur la côte ouest de la France, la seule en France à pouvoir accueillir un tel mastodonte. Les premiers essais en mer du porte-avions devraient avoir lieu fin 2035 ou début 2036, pour une livraison fin 2036 / début 2037. Le PA-Ng devrait entrer en service à la fin de 2037 ou au début de 2038, date à laquelle le Charles De Gaulle sera retiré du service.

Que "MO Porte-Avions" soit ou non en mesure de respecter ce calendrier, ce n’est pas sûr. Mais ce qui sûr, c’est que le développement du PA-Ng est important pour la France et sa marine. La France et les États-Unis sont les seuls pays au monde dont les marines exploitent des porte-avions CATOBAR à propulsion nucléaire. L'anticipation du rôle futur du porte-avions dans les opérations de l'OTAN et des pays alliés indique certainement que les autorités françaises restent déterminées à faire progresser le projet et les capacités de la marine française en matière de porte-avions au cours des prochaines décennies.

FIN





SECOND ARTICLE


LES ATLANTIQUE ATL 2 AMELIORES DE LA FRANCE SONT PLUS QUE DE SIMPLES AVIONS DE PATROUILLE MARITIME
La dernière version de l'avion de patrouille maritime Atlantique 2, récemment mise en service, est désormais tout aussi compétente dans des missions terrestres.

Par Thomas Newdick, The War Zone, 15 novembre 2022



Article original en Anglais


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Un Atlantique 2 modernisé. © Dassault Aviation


La Marine française a officiellement atteint sa capacité opérationnelle optimale avec la dernière version de l'avion de patrouille maritime Atlantique 2, ou ATL 2, garantissant ainsi que ces appareils qui datent de la guerre froide resteront au sommet de leurs capacités jusque dans les années 2030. Pour la Marine française, ces avions se sont déjà avérés être des atouts remarquablement polyvalents pour de nombreuses missions au-delà de leur rôle principal traditionnel de chasse aux sous-marins.

Avec les améliorations de Standard 6 apportés aux Atlantique 2, ces élégants bimoteurs sont désormais tout aussi aptes à protéger la flotte française des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE), qu’à attaquer des navires de surface, ainsi qu'à effectuer des missions terrestres de reconnaissance et de conduite de frappe avec des armes de précision.

Dans un communiqué publié hier lundi 14 novembre, la Marine nationale française a annoncé que l'ATL 2 Standard 6 avait été déclaré pleinement opérationnel, une étape franchie le 10 novembre sur la base aéronavale de Lann-Bihoué, en Bretagne dans l’ouest de la France. L'entrée en service a été signée par l'amiral Pierre Vandier, chef d'état-major de la marine française.


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Un avion de patrouille maritime Atlantique 2 de la marine française dans sa fonction traditionnelle, la surveillance maritime. © Dassault Aviation


"Ce jalon atteste de la capacité de l'avion à mener l'ensemble du spectre des missions qui lui sont désormais assignées ", a déclaré l'amiral Vandier. Un communiqué de la Marine nationale ajoute que : "cette rénovation en profondeur de l'Atlantique 2 en fait un outil compétitif face aux menaces modernes. Jusqu'à la fin de leur durée de sa vie, estimée pour 2035, les 18 appareils modernisés au standard 6 permettront à la France de rester au niveau de ses alliés les plus performants dans ce domaine."


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Images du vol du 10 novembre de l’Atlantique 2 standard 6. © Marine nationale


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Vue du soleil levant depuis le cockpit d'un Atlantique 2 de la Marine française décollant de la base aéronavale de Lann-Bihoué, le 16 juin 2022. © Fred Tanneau, AFP


À ce jour, neuf des ATL 2 ont été mis à niveau au standard 6 et remis en service dans la marine française. Le processus d'évolution vers la capacité opérationnelle totale a débuté il y a deux ans, après la déclaration de capacité opérationnelle initiale. Aujourd'hui, la plate-forme ATL 2 est jugée apte à entreprendre tout le spectre des missions qui lui ont été assignées.

L'ATL 2 a été développé à l'origine pour la lutte anti-sous-marine (ASW) comme mission principale, le premier prototype ayant volé le 8 mai 1981 à Toulouse. Cependant, cette conception était une simple refonte du Breguet 1150 Atlantic, qui avait volé 20 ans plus tôt et qui était destiné à doter une plate-forme de lutte anti-sous-marine commune aux opérateurs européens de l'OTAN. L'Atlantic de première génération a d'abord été utilisé par les armées française, allemande, italienne et néerlandaise, puis exporté au Pakistan.


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Un Breguet 1150 Atlantic de première génération en service dans la marine française photographié en 1984. © Colin Cooke


Désormais produit par Dassault Aviation, l'ATL 2 a été acheté par la Marine française uniquement. Les 28 premiers exemplaires ont été livrés en 1989 et, par rapport à l'Atlantic, l'avion offrait des capacités de lutte anti-sous-marine nettement améliorées pour faire face à la nouvelle génération des sous-marins russes plus silencieux et plus rapides, ainsi que des capacités accrues pour opérer dans la lutte contre les navires de surface.

Avec une autonomie de près de 8000 km ou une endurance de 14 heures de vol non-stop, ainsi qu'une capacité généreuse pour l'équipement, les réserves et les postes d'équipage, l'ATL 2 s'avère une réussite. L’Atlantique est passé d'un profil de mission anti-sous-marine et de patrouille maritime assez limité avec le Breguet 1150 à un rôle accru dans le domaine des missions de renseignement, de surveillance et de reconnaissance, et même de guidage de frappe sur des cibles terrestres avec l’ATL 2 au standard 6.


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Un membre d'équipage observe alors qu'il survole la mer Noire le 21 juillet 2022 depuis un Atlantique 2. Le "Mark One Eyeball" (NdT – Mark One Eyeball est un terme du jargon militaire américain qui désigne l’observation attentive visuelle) est toujours une surveillance essentielle et la large verrière offre une excellente vue. © Louisa Goulimaki, AFP


Le programme de modernisation du Standard 6 a été lancé en 2013 et se concentre sur les améliorations avioniques, notamment un radar de surveillance Thales Searchmaster à balayage électronique actif mis à jour, une nouvelle tourelle de capteurs MX-20 avec des caméras électro-optiques et infrarouges, un nouveau système de traitement acoustique numérique et un nouvel ordinateur tactique. L'équipage type de l’ATL 2 au standard 6 est de 14 personnes (dont quatre dans le cockpit). Il dispose de nouvelles consoles pour l'affichage tactique et tous les sous-systèmes de navigation.


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La tourelle de détection MX-20 sous le fuselage arrière d'un Atlantique 2. © Dassault Aviation


En même temps, bien sûr, des capteurs de la version précédente de l’Atlantique 2 ont été conservés. Il s'agit notamment des bouées acoustiques passives et actives, d'une caméra infrarouge à balayage frontal (FLIR) située sous le nez et distincte du nouveau MX-20, qui sert principalement à détecter les cibles de surface, du détecteur d'anomalies magnétiques (MAD) situé dans la queue de l'appareil, qui permet de repérer les sous-marins immergés, et des nacelles de mesures d'appui électronique situés en bout d'aile, qui permettent d'intercepter les transmissions radio.

La mise à niveau au standard 6 sont entrepris par Dassault en collaboration avec le Service Industriel de l'Aéronautique (SIAé) du ministère de la défense, qui assure la maintenance et la modernisation pour le compte des forces armées françaises.

La version Standard 6 de l'ATL 2 a déjà été exposée à des environnements opérationnels en mer Baltique, en Méditerranée centrale et orientale, dans l'océan Indien ou dans le golfe de Guinée, ainsi que dans les eaux territoriales françaises et leur approche, y compris la protection de sa flotte de sous-marins et du porte-avions R91 Charles de Gaulle.

Le changement le plus remarquable dans le profil de mission de l'ATL 2 a sans doute été l'adoption d'opérations terrestres, notamment la participation à des campagnes anti-insurrectionnelles au Moyen-Orient et en Afrique de l'Ouest. L'ensemble électro-optique MX-20, qui a commencé à être monté dans une "boule" sous le fuselage arrière de certains ATL 2 avant le standard 6, a été un élément essentiel du succès de ces opérations. La tourelle gyroscopique MX-20 contient quatre caméras différentes, toutes avec une définition relativement élevée pour identifier les points d'intérêt. Le système est principalement employé lors de missions terrestres.


Vidéo YouTube sur un vol à bord de l’Atlantique 2 (Durée 1min35)


"Nous sommes les seuls avions français équipés d'autant d’appareils d'imagerie et de surveillance électromagnétique et capables de rester aussi longtemps dans la zone - jusqu'à 14 heures en mission", a déclaré le commandant de l'un des deux escadrons ATL 2 à AirForces Monthly en 2019. "Cela nous permet d'évaluer les informations, de les renforcer, de nous assurer qu'il s'agit d'une cible à traiter et de libérer des armes."

La même tourelle est également utilisée pour le guidage laser, ce qui permet à l'ATL 2 de larguer jusqu'à quatre bombes à guidage laser de la série Paveway fabriquées aux États-Unis, notamment des types GBU-12/B de 250 kg ou GBU-58/B de 125 kg. Avant l'ajout de la tourelle MX-20, l'ATL 2 pouvait larguer ces bombes, mais il fallait pour cela qu'un autre avion assure le guidage sur la cible.


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Un avion de patrouille maritime ATL 2 avec 4 bombes à guidage laser GBU-12 Paveway II dans sa soute ouverte. © Laki_Demonios


Avec deux GBU-12/B dans la soute, la durée de vol maximale de l'ATL 2 n'est réduite que de 15 minutes, ce qui lui permet de rester en patrouille pendant une durée impressionnante, par exemple pour recueillir des images et d'autres données de renseignement et les transmettre à d'autres ressources via des communications par satellite, tout en attendant une cible d'opportunité qui pourrait se présenter. Ces armes font désormais partie de l'arsenal de l'ATL 2 au même titre que les torpilles anti-sous-marines MU90 (jusqu'à huit) et les missiles antinavires AM.39 Exocet (transportés par paires).


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Capture d'écran d'une vidéo d'un tir de missile AM-39 Exocet par un ATL 2. © Amiral Vandier


Un autre aspect peu connu de l'ensemble des missions terrestres de l'ATL 2 est sa capacité à transporter des commandos de marine. Pour ce faire, une trappe située à l'arrière du fuselage a été transformée en toboggan pour leur parachutage.

Le fait que l'ATL 2 se soit avéré si bien adapté à des missions terrestres de lutte contre le terrorisme signifie qu'il a été beaucoup plus actif dans ce rôle que dans des spécialités plus traditionnelles comme la lutte anti-sous-marine au cours des deux dernières décennies. Au cours de ce processus, l'avion a également pris part à certains incidents très médiatisés. Par exemple, un ATL 2 déployé dans le pays ouest-africain du Niger a été utilisé pour aider à retrouver des otages français en janvier 2011 sur un site proche de la frontière avec le Mali voisin. Il s'en est suivi un effort de sauvetage impliquant les forces spéciales françaises et trois hélicoptères Cougar, bien que les deux jeunes otages aient malheureusement été tués dans le processus.


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Banc des opérateurs tactique bord d'un Atlantique 2 de la Marine française. © Fred Tanneau, AFP


Malgré l'importance des ATL 2 pour les opérations françaises ces dernières années, le processus de déclaration de la pleine capacité opérationnelle du Standard 6 amélioré ne s’est pas fait sans retard. La Marine française a commencé à évaluer l'aptitude de ce nouveau standard en décembre 2020, après une campagne d'évaluation opérationnelle menée par son centre d'essais en vol. À ce moment-là, la capacité opérationnelle totale devait être atteinte et mise en service à la fin de 2021. La mise à niveau de la flotte des Atlantiques 2 est désormais à mi-parcours, les neuf appareils restants à moderniser devraient être redélivrés d'ici 2024.


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Un Atlantique 2 au standard 6. © Anthony Pecchi


Il existe actuellement un point d'interrogation quant au successeur à long terme de l'ATL 2. Auparavant, la France et l'Allemagne devaient remplacer leurs flottes respectives de patrouilleurs maritimes par une plateforme commune, mais l’Allemagne s’est entre temps tournée en 2006 vers le Lockheed P-3C Orion en achetant 8 pour sa Marineflieger.

Ce nouvel avion franco-allemand aurait été développé dans le cadre du système de guerre aérienne maritime, il aurait ainsi inclus une suite complète de capteurs, d'armes et même de drones d’accompagnement. Cependant, la décision très récente de Berlin d'acquérir cinq avions P-8A Poseidon a jeté le doute sur ce plan. Alors que le P-8 a été officiellement décrit comme une solution provisoire pour la marine américaine, il est très plausible que l'Allemagne s'en tienne simplement au Poseidon à long terme.

Cela pourrait laisser la France faire cavalier seul avec le développement d'un remplaçant de l'ATL 2, qui devrait entrer en service à partir de 2035. Dassault a déjà proposé une version de patrouille maritime de son bizjet Falcon 10X, mais la marine française pourrait bien préférer les performances et la capacité supplémentaires offertes par une plate-forme basée sur le biréacteur de ligne Airbus A320neo, déjà proposé comme candidat à la lutte aéromaritime par Airbus.


Vidéo YouTube d’Airbus Defence and Space sur une version multi-mission de l'A320neo (Durée 3 min)


Il sera intéressant de voir si le successeur désigné pour l'ATL 2 incorpore certaines des capacités multimission qu'il offre actuellement avec son standard 6. Quoi qu'il en soit, il semble que la France perdra finalement sa capacité de patrouille maritime à turbopropulseurs au profit d'avions équipés de réacteurs. Mais comme il reste encore beaucoup à décider, il est possible que l'ATL 2 doive rester en service au-delà de la date prévue de sa mise à la retraite.

FIN

#87 Re : Vos expériences et vos récits aéronautiques » [Réel] Photos du bureau - A220 » 03/12/2022 16:51

Merci aussi Quentin ... l'approche de Zurich avec les Alpes blanchies derrière, c'ets quelque chose .... tu en 'lauras pas en 384x2160 pixels par hasard ???
Philippe

#88 Re : Actualité de l'aéronautique » [Réel] Du nouveau sur le X-59 de la NASA » 18/11/2022 09:09

Cher Mercure,
Tu sais combien j'aime vous donner les choses "telles quelles"  solv_gif mais moi aussi j'ai cru rêver quand la NASA annonce que le réacteur sera placé par la main de l'homme dans son logement blink ... bon peut-être aussi je n'ai pas très correctement rendu l'idée originale en anglais ... tradutore traidtore, c'est bien connu. Mais quand même : beaucoup de com en effet. C'est quelque chose que la NASA maitrise depuis bien longtemps.
Portez vous bien tous,
Philippe

#89 Actualité de l'aéronautique » [Réel] Du nouveau sur le X-59 de la NASA » 16/11/2022 15:31

philouplaine
Réponses : 2

Bonjour chers amis,

Je vous ai traduit un article récent sur l’avion supersonique expérimental Lockheed X-59 de la NASA.
Le prototype est toujours en construction mais il vient (enfin) de recevoir son réacteur, un General Electric F414-GE100 dérivé du F414 qui équipe les F/A-18 Super Hornet.
Le Lockheed Martin X-59 est un QueSST (Pour Quiet SuperSonic Transport = Transport SuperSonique Silencieux). Il est développé et construit par les Skunk Works de Lockheed Martin pour le programme Low-Boom Flight Demonstrator (NdT – Low-Boom Flight Demonstrator = Démonstrateur d’un vol avec un bang supersonique faible) de la NASA. Le but de cet avion est de mener des expériences afin de réduire le bruit du bang supersonique perçu au sol.
Cet avion expérimental a pris pas mal de retard. Son développement en bureau d’étude Lockheed Martin a commencé en 2016 pour un premier vol qui était prévu en 2021 … mais qui aura lieu l’année prochaine. Cependant, l’article que je vous ai traduit montre bien que la construction du prototype s’est considérablement accélérée ces derniers mois.
J’ai pensé que cet article pourrait vous intéresser … surtout après les récents posts sur la fusée SLS de la NASA !

Bonne lecture !
Philippe



L'APPAREIL EXPERIMENTAL X-59 DE LA NASA DESTINE AUX ESSAIS SUPERSONIQUES SILENCIEUX A RECU SON REACTEUR

Le X-59, qui pourrait contribuer à transformer le vol supersonique, continue de prendre forme avant son premier vol prévu l'année prochaine

Par Joseph Trevithick, The War Zone, 14 novembre 2022


Article original en Anglais


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Vue arrière du X-59 en construction. © Carla Thomas, NASA


L'avion X-59A de la NASA, baptisé Quiet Supersonic Technology, ou QueSST (NdT – Quiet Supersonic Technology = Technologie supersonique silencieuse), a désormais son réacteur à turbosoufflante General Electric F414-GE-100 de 10 tonnes de poussée. C’est une nouvelle étape importante vers son premier vol, qui est actuellement prévu l'année prochaine. Le réacteur F414-GE-F100 est dérivé du F414 de série équipe les F-18 Super Hornet.

La division des projets avancés Skunk Works de Lockheed Martin construit cet appareil expérimental X-59A, qui sera utilisé pour explorer les technologies d'atténuation du bang supersonique qui pourraient avoir un impact significatif sur l'avenir des vols supersoniques, notamment dans le domaine commercial.

Selon un communiqué de presse de la NASA publié aujourd'hui (ce 14 novembre), le personnel de des Skunk Works à l'US Air Force Plant 42 à Palmdale, en Californie, vient d’installer le réacteur F414 sur le X-59A (NdT – L’US Air Force Plant 42 ou AFP42 est un aéroport militaire aérospatial de l’USAF situé à Palmdale et composé de plusieurs pistes, de tarmacs et de huit sites de production de prototypes pour les programmes technologiques avancés de l’USAF. Les utilisateurs les plus connus de l’AFP42 sont Boeing, Northrop Grumman et Lockheed Martin). Le réacteur est conçu pour produire environ 10 tonnes de poussée à pleine postcombustion et servira à propulser le X-59A à des vitesses allant jusqu'à Mach 1,4 (1510 km/h) à une altitude de 55 000 pieds. Le X-59 servira à étudier la réduction du bang supersonique à 75 décibels de niveau perçu au sol pour évaluer l'acceptabilité du transport supersonique aux États-Unis.


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Une vue depuis l’avant du prototype du X-59A en construction, il y a quelques mois. © Lauren Hughes, NASA


"L'installation du réacteur est l'aboutissement d'années de conception et de planification par les équipes de la NASA, de Lockheed Martin et de General Electric Aviation", a déclaré Ray Castner, responsable des performances de propulsion de la NASA pour le projet X-59A. "Je suis à la fois impressionné et fier de cette équipe combinée qui a passé les derniers mois à développer les procédures clés, ce qui a permis une installation du réacteur sans accroc."

General Electric a livré le F414-GE-100, qu'elle développe spécifiquement pour le programme QueSST de la NASA depuis 2020. Le moteur est un dérivé personnalisé du F414-GE-39E utilisé dans les variantes E/F de l'avion de combat Saab Gripen, un réacteur de la série F414 qui a été optimisé pour une utilisation dans des avions monoréacteur. La série F414 est actuellement utilisée principalement pour équiper les avions de combat biréacteur F/A-18E/F Super Hornet de Boeing et les avions de guerre électronique EA-18G Growler.

"Les entrailles du réacteurs F414-GE-100, toutes les turbomachines, sont identiques ou très similaires à celles du F414-GE-39E", a déclaré Anthony Hazlett, ingénieur du modèle de démonstration du X-59 chez General Electric, qui a dirigé l'équipe chargée de concevoir le nouveau réacteur destiné au X-59A. "Mais la conception extérieure du moteur et son mode de fonctionnement ont été fortement améliorés".

Selon la NASA, les changements qui ont donné naissance au F414-GE-100 comprennent un nouveau logiciel pour les systèmes de contrôle du moteur et un algorithme complexe supplémentaire qui permet au réacteur de "parler en temps réel" avec le X-59A, ainsi qu’un approvisionnement en carburant modifié. 


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Le réacteur F414-GE-100 de 98 kN de poussée avec post-combustion destiné au X-59. © General Electric Aviation


En outre, "pour économiser du poids et de l'espace, la version du F414 du X-59 n'a pas de systèmes de guidage prémonté pour son installation dans son logement dans l’avion expérimental, de sorte que le réacteur sera d’abord placé sous l'avion et soulevé à la main et son installation dans son logement à l’arrière du fuselage dépendra uniquement des yeux et des mains de l'homme, selon la NASA. "Une fois que le moteur aura été mis en place, les lignes électriques, de carburant et autres seront connectées et l'ensemble réacteur/avion sera alors testé. Cela aboutira à la première mise à feu du moteur à l'intérieur de l'avion, qui restera en place avec notamment les câbles de retenue fixés."

Le calendrier exact des essais du X-59A n'est pas tout à fait clair. En janvier de cette année, on pensait alors que l'avion effectuerait son premier vol avant la fin de l'année. La date prévue du premier vol a maintenant été repoussée à 2023 pour des raisons peu claires, bien qu'il ait terminé les principaux tests structurels au sol en avril.


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Illustrations montrant à quoi ressemblera le X-59A une fois terminé. © Lockheed Martin


Ces retards, quelle qu'en soit la cause, signifient également que la NASA ne prévoit pas de commencer les vols de collecte de données au-dessus de certaines régions des États-Unis avant 2025, et non 2024 comme prévu précédemment. L'espoir est que la silhouette distincte du X-59A, notamment son nez très long et relativement mince qui bloque toute visibilité vers l'avant pour le pilote et nécessite un système spécial de vision à distance, contribuera, avec d’autres caractéristiques de l’avion, à atténuer l'impact de ses bangs supersoniques sur les gens au sol. La NASA et Skunk Works ont toutes deux déclaré par le passé que l'objectif était de faire en sorte que les bangs entendus au sol soient ressentis au même titre que le tonnerre ou une porte de voiture qui claque un peu fort.


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Une vue latérale du X-59A avec son nez très allongé distinctif. © NASA


La Federal Aviation Administration restreint actuellement fortement les vols supersoniques aux États-Unis, les seuls effectués actuellement sont presque exclusivement ceux de l'armée américaine. D'autres agences d'aviation civile font de même dans de nombreux autres pays en raison du bruit que ces vols génèrent et des dégâts potentiels au sol dûs au bang.
Ces dernières années, on a assisté à une sorte de renaissance de l'intérêt pour les vols supersoniques commerciaux et l'on espère que le X-59A contribuera à ouvrir une nouvelle ère dans ce domaine. Un vol supersonique plus silencieux pourrait également intéresser l'armée américaine et d'autres forces armées pour diverses raisons opérationnelles. Le X-59A pourrait également être utilisé à diverses autres fins de recherche sur l’aérodynamique supersonique après l'achèvement du projet QueSST, quels qu'en soient les résultats.

Bien qu'il reste à voir vraiment quand le X-59A prendra réellement son envol pour la première fois, cet avion d'essai supersonique unique en son genre continue de prendre forme, encore plus depuis l'ajout de son réacteur F414-GE-100.


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Plan 3-vue du supersonique expérimental Lockheed Martin X-59

#90 Vos expériences et vos récits aéronautiques » [Réel] Un pigeon clandestin surpris par le poli de l'aile » 16/11/2022 15:11

philouplaine
Réponses : 4

Bonjour chers amis,
Une très courte vidéo d'un pigeon-passager clandestin, qui pensait faire un bon vol sans se fatiguer ... mais le dessus des ailes est très glissant comme chacun sait.
Bonne visio,
Philippe


Vidéo YouTube très courte (Durée 20sec) du pauvre pigeon

#91 Re : Actualité de l'aéronautique » [Réel]Dallas : Deux avions entrent en collision en meeting » 15/11/2022 11:01

Bonjour chers amis,
Voici quelques infos sur les noms et photos des six personnes qui étaient à bord de ces deux avions. Je les ai obtenues de deux articles, l’un américain et le second anglais, tous deux assez succincts.
J’ai pensé que ces infos pourraient vous intéresser.
Terry Barker, Len Root, Curtis Rowe, Kevin Michels, et Dan Ragan, à bord du B-17, Craig Hutain, à bord du P-63. RIP. Craig Hutain, commandant de bord à United sur 777, totalisait à lui seul 34 500 heures de vol !
Bonne lecture !
Philippe


Les six aviateurs qui sont morts pendant le spectacle "Wings over Dallas" organisé le Jour des Vétérans.
Par Melissa Koenig et James Gordon, The Daily Mail, 14 novembre 2022

Un Boeing B-17 est entré en collision en plein vol avec un Bell P-63 Kingcobra samedi dernier en début d’après-midi, sous le regard horrifié des spectateurs. Les deux pilotes très expérimentés étaient des commandants d'American Airlines et de United.

Voici les 6 aviateurs qui ont trouvé la mort lors de cette catastrophe.

Monsieur Terry Barker, pilote du B-17, commandant à la retraite d’American Airlines,
Monsieur Len Root, copilote du B-17, commandant à la retraite d’American Airlines,
le major Curtis Rowe, un vétéran de l’US Air Force, et de la Civil Air Patrol,
Monsieur Kevin Michels,
et Monsieur Dan Ragan,
étaient à bord du B-17
Tandis que Monsieur Craig Hutain, commandant à la retraite d’United Airlines, pilotait le P-63 Kingcobra.



Terry Barker,un vétéran de l’US Air Force, pilotait le B-17 qui s’est crashé. Il était commandant de bord récemment retraité d’American Airlines. Il était instructeur sur A320.

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Len Root, pilotait le B-17 qui s’est crashé. Il était également commandant de bord récemment retraité d’American Airlines.

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Le major Curtis Rowe, vétéran de plus de 30 ans de la Civil Air Patrol de l’Ohio, était à bord du B-17 qui s'est écrasé.

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La major Rowe est au premier rang à droite devant le B-17 qui s'est écrasé.



Kevin Michels volait souvent sur les B-17 de la Commemorative Air Force.

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Dan Ragan était aussi à bord du B-17 qui s’est écrasé. Il volait également souvent sur les appareils de la Commemorative Air Force dont il était un membre important.

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Dan Ragan à gauche avec Kevin Michels à droite.



Craig Hutain, commandant de bord retraité et instructeur sur Boeing 777 à United Airlines, pilotait le P-63 Kingcobra. Il avait obtenu sa licence en 1975 et totalisait près de 34 500 heures de pilotage ! Il était également le directeur général de l'association Tora-Tora-Tora.

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#92 Re : Actualité de l'aéronautique » [Réel]Dallas : Deux avions entrent en collision en meeting » 13/11/2022 16:47

C'est tragique en effet !!
Le Kingcobra est connu pour avoir une très mauvaise visibilité de son cockpit ... cette tragédie a fait six morts, le pilote du P-63 et cinq personnes à bord du B-17. C'est ce que le juge Clay Jenkins vient de rendre publique.
Une forte pensée pour ces six personnes et leur famille.
Philippe

#93 Actualité de l'aéronautique » [Réel] Premier vol de l’AW609 de série un appareil à rotor basculant » 01/11/2022 16:54

philouplaine
Réponses : 2

Bonjour chers amis,

Une actualité un tantinet réchauffée mais que j’ai néanmoins trouvée informative.
Premier appareil dit "de série", après plusieurs prototypes plus ou moins ratés ...
Un appareil à rotor basculant pour des emplois civils ? Y aura-t-il une demande ?
J’ai pensé que ce texte pourrait vous intéresser.

Bonne lecture !
Philippe




Le premier AW609 à rotor basculant de série a enfin effectué son premier vol après des décennies de développement

Nous sommes enfin sur le point de découvrir si l'"ancien nouveau" AW609 ne sera qu’un avion de niche ou s'il trouvera une demande plus large

Par Thomas Newdick, The War Zone, 20 octobre 2022


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L’appareil à rotor basculant AW-629. © Leonardo


Article original en Anglais



Le vol inaugural du premier Leonardo AW609 de série est un pas de plus vers la mise en service d'un nouvel avion à rotors basculants, qui rejoindrait le V-22 Osprey de Bell Boeing, unique jusqu'à présent, et deviendrait le premier avion commercial de sa catégorie.

NdT- La société italienne LEONARDO, issue de Finmeccanica, travaille dans l'aérospatial, la défense et la sécurité aéroportée. La société Leonardo est issue du rachat par Finmeccanica de l’italien Aermacchi en 2002, puis de l’italo-britannique Agusta-Westland en 2015. C’est l’un des premiers constructeurs au monde d'hélicoptères civils et l'un des principaux groupes internationaux du secteur aéronautique et spatial. Il est spécialisé dans l’armement, les hélicoptères, l'aéronautique, l'industrie spatiale et l'énergie. La société est installée dans plus de cent pays et notamment en Italie, au Royaume-Uni et aux États-Unis, où le groupe a racheté de nombreuses entreprises de défense. Il emploie un peu plus de 50 000 salariés et a réalisé un chiffre d'affaires de plus de 14 milliards d'euros, avec un carnet de commande bien rempli pour 35 milliards d’euros. La société a changé son nom en Leonardo le 1er janvier 2017.

Après des années de développement depuis le premier vol du prototype le 6 mars 2003, il y a près de vingt ans, et de retards ponctués par un accident mortel en 2015, l'AW609 semble enfin prêt à entrer en service, l'entreprise italienne espérant qu'il pourra un jour effectuer des missions militaires et voler pour des clients civils.

Le premier AW609 de production, connu sous le nom d'AC5, a effectué son vol inaugural sur le site de Leonardo à l’aéroport de Northeast Philadelphie (KPNE), en Pennsylvanie, le 13 octobre dernier, bien que la société ne l'ait publiquement annoncé qu'hier. Ce vol d'essai a permis de tester les systèmes de l'appareil. Ensuite, l'AC5 sera utilisé pour soutenir "l'évaluation et l'expansion des capacités de mission" dans le but d'obtenir la certification de la Federal Aviation Administration (FAA), ce qui lui permettra d'entreprendre des missions réelles aux mains d'opérateurs civils. On pense généralement que l’appareil pourrait entrer en service commercial dans le courant de l'année prochaine.


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L’AC5 avec son équipe de développement, le premier AW609 de série, de retour au sol après son vol inaugural le 13 octobre 2022 à l’aéroport de Northeast Philadelphie, USA. © Leonardo


Dans le même temps, Leonardo confirme que trois appareils supplémentaires sont sur la chaîne d'assemblage final à Philadelphie. Le client de lancement aux États-Unis est le Bristow Group, qui exploite des hélicoptères dans le monde entier pour divers clients gouvernementaux et commerciaux, et qui est surtout connu pour ses activités de recherche et de sauvetage (SAR), ainsi que pour ses services de transport offshore et d'ambulance aérienne. Déjà actif dans le programme de développement, Bristow Group devrait recevoir l'appareil AC6, ce qui laissera l'AC5 à la disposition de Leonardo pour la poursuite des travaux sur le programme de certification des essais en vol, ainsi que pour les démonstrations aux clients.

Le nombre exact d'AW609 commandés est actuellement un secret bien gardé. En 2015, Leonardo avait annoncé que le carnet de commandes comprenait "près de 60 appareils", bien que l'on ne sache pas exactement combien d'entre eux ont été confirmés et comment ce chiffre a pu évoluer au cours des années qui ont suivi.

Les autres AW609 produits à ce jour sont tous des avions d'essai. L'AC1, dont le premier vol remonte à 2003, est actuellement utilisé pour des essais au sol en Italie. L'AC2 a été perdu dans un accident mortel lors d'un essai en vol en Italie en 2015. L'AC3 a été utilisé pour des études sur les performances de manipulation des moteurs et le niveau de charge, aux États-Unis. Enfin, l'AC4 est également utilisé pour des essais en vol en Italie, il a également pris part à des tournées de démonstration pour des clients potentiels dans le monde entier. La flotte d'essai des AW609 totalise jusqu'à présent environ 1 900 heures de vol.

L'avion a commencé sa vie sous le nom de BA609, sa désignation reflétant le fait qu'il s'agissait initialement d'un programme conjoint Bell/Agusta, lancé en 1998. En 2011, il est devenu AW609 dans le groupe Agusta-Westland, cette société ayant été rebaptisée Leonardo en 2015 après sa reprise par l’italien Finmeccanica.

L'AW609 incarne les principaux avantages - et inconvénients - du concept de rotor basculant. D'une part, les rotors situés aux extrémités de ses ailes et propulsés par des turbopropulseurs PT6C-67A de Pratt & Whitney assurent la capacité de décollage et d'atterrissage vertical d'un hélicoptère. Une fois que ces mêmes nacelles moteur tournent, l'AW609 bénéficie de performances beaucoup plus proches de celles d'un avion à turbopropulseur conventionnel à voilure fixe, notamment en termes de vitesse et de portée.
Ces avantages ont un coût important et imposent également des pénalités en termes de complexité technologique. Ce n'est pas une coïncidence si le chemin du Boeing V-22 vers la mise en service a été aussi tortueux que celui de l'AW609. Même une fois en service, le V-22 a des chiffres de disponibilité moins qu'exceptionnels à cause de différents problèmes techniques.

Si le pari de Leonardo sur un appareil commercial à rotors basculants s'avère payant, il pourrait bien révolutionner au moins une partie des services commerciaux et publics actuellement assurés par des hélicoptères conventionnels. Dans le même temps, comme l'a montré le Boeing V-22, le concept des rotors basculants présente un intérêt considérable pour les opérateurs militaires, notamment dans les domaines de la recherche et du sauvetage au combat (CSAR), des opérations spéciales, des assauts amphibies, ainsi que des secours humanitaires lors des catastrophes.
Le Leonardo AW609 est considérablement plus petit que le Boeing V-22, avec une masse maximale de 7 ¼ tonnes contre 27 ½ tonnes pour l'Osprey (en mode VTOL). Il peut accueillir jusqu'à 9 passagers dans une configuration à haute densité, alors que le V-22 en transporte jusqu’à 32. Le Boeing Osprey est également équipé d'une rampe arrière, d'une sonde de ravitaillement en vol et de la capacité de transporter des charges suspendues, toutes choses absentes de l’AW609.

Néanmoins, la combinaison de la vitesse (la vitesse de croisière est de 510 km/h) et de l'autonomie (jusqu'à 1 850 km avec du carburant auxiliaire) de l'AW609, la capacité de transporter une charge utile de 2 ½ tonnes, plus un treuil pour charge suspendue de 270 kg, le rendent attrayant pour certaines missions militaires et paramilitaires. La cabine pressurisée de l'AW609 est également une différence majeure par rapport au V-22 et lui permet de voler au-dessus du mauvais temps et d'offrir un vol plus confortable que n'importe quel hélicoptère. Ce serait un avantage particulier pour les opérations de recherche et de sauvetage et d'évacuation médicale, ainsi que pour des vols VIP d’aviation privée.


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Maquette grandeur nature de la cabine du modèle d’évacuation sanitaire du AW609. © Leonardo


La version militaire de l’AW609 a déjà suscité un intérêt, le Joint Aviation Command (JAC) des Émirats Arabes Unis (EAU) est le client de lancement de la variante d’évacuation sanitaire de l'AW609. En novembre 2015, les Emirats Arabes Unis ont signé un protocole d'accord portant sur trois commandes fermes et trois options. Le commandement Emirati a déclaré : "Les caractéristiques uniques de vitesse et de rayon d'action de l'AW609, combinées à sa capacité de vol stationnaire, augmenteront considérablement les capacités des missions d’évacuation sanitaire du commandement aérien Emirati. Nous sommes impatients d'exploiter l'AW609 et d'utiliser l'avantage de vitesse qu'il apporte."

Le déploiement du prototype AC4 de l'AW609 depuis son aéroport italien jusqu’au salon aéronautique de Dubaï, aux Émirats Arabes Unis, en novembre 2021, a illustré de manière spectaculaire les capacités à long rayon d'action de l’AW609.


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L'AW609 fait ses débuts au salon aéronautique de Dubaï, en novembre 2021. © Giuseppe Cacace / AFP and Getty Images


Peu de détails sont disponibles sur cet accord entre Leonardo et les Émirats arabes unis, bien que le premier vol d'un avion de série semble être une bonne nouvelle pour les Emiratis et pour d'autres clients militaires potentiels. Cependant, initialement, le premier AW609 sanitaire aurait dû être livré aux Emiratis en 2019.

Le cas Emirati constitue un cas intéressant pour les opérateurs militaires qui pourraient se tourner retenir l'AW609 pour leurs besoins plus spécialisés. Formé en 2012, le Joint Aviation Command Emirati a absorbé la plupart des moyens militaires à voilure tournante des Emirats, notamment des AH-64 Apaches et des UH-60 Black Hawks. Le JAC émirati exploite également plusieurs aéronefs à voilure fixe, notamment des avions IOMAX Archangel de lutte contre l'insurrection (COIN) et des Cessna AC-208 Grand Caravans armés. En tant que tel, le JAC englobe un éventail de missions allant de l’évacuation sanitaire à la frappe en opération spéciale. La polyvalence de l'AW609 suggère qu'il pourrait convenir au commandement, bien qu'il y ait un point d'interrogation quant à sa capacité à être adapté à des configurations armées.


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Un hélicoptère UH-60M du JAC Emirati atterrit sur le pont de la base mobile expéditionnaire USS Lewis Puller (ESB-3). © US Navy


En Italie également, les perspectives d'obtention de commandes militaires pour l'AW609 semblent assez bonnes. Fait rare parmi les armées de l'air européennes, l'armée de l'air italienne a beaucoup investi dans ses capacités CSAR (Combat Search And Rescue) d’évacuation sanitaire, avec une escadre dédiée, la 15ème Stormo, qui exploite des hélicoptères Leonardo HH-101 spécialement adaptés et des hélicoptères Leonardo HH-139 plus petits, également pour des missions de soutien aux forces spéciales.

Une fois que l'AW609 sera disponible, il sera très probablement un ajout intéressant à l'inventaire. Si Boeing n'a jusqu'à présent enregistré qu’une seule commande de V-22 Osprey par un opérateur non-américain (le Japon pour une commande de 17 appareils), d'autres pays, dont l’Inde, Israël et l'Indonésie, ont manifesté leur intérêt pour l'Osprey. En fait, le département d'État américain a déjà approuvé la vente militaire à l'étranger de huit MV-22 à l'Indonésie, pour une valeur d'environ 2 milliards de dollars, ainsi que les équipements et le soutien associés, bien que Djakarta n'ait pas encore pris d'engagement ferme d'achat.


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Un Boeing V-22 Osprey des Force d'Autodéfense du Japon basé au Camp Kisarazu se prépare à quitter la Marine Corps Air Station (MCAS) d’Iwakuni, au Japon, le 6 juillet 2020. © US Marines


Si l'AW609 n'offre pas le même niveau de capacités, du moins à certains égards, que l’Osprey qui est plus grand, il est aussi nettement moins cher. Un V-22 coûte environ 75 millions de dollars au prix catalogue, tandis que Leonardo propose l'AW609 entre 20 et 30 millions de dollars, bien qu'il s'agisse là du prix pour probablement un modèle civil de base sans modifications militaires. Bien qu'il soit encore considérablement plus cher qu'un hélicoptère conventionnel de taille similaire, il bat l'Osprey en termes de prix et pourrait du coup être attrayant pour créer une flotte d’appareils à rotor basculant en vue des mêmes missions que l’Osprey à un coût bien moindre.

Il existe également d’autres missions pour lesquelles l'AW609 semble mieux adapté que le V-22, notamment le transport rapide de fantassins, un rôle pour lequel l'Osprey a également été proposé dans le passé. Là encore, la pressurisation de la cabine de l’AW609 est un gros avantage.

Comme nous l'avons dit dans le passé, un genre de V-22 en configuration VIP serait comme un jouet ultime, capable de voler d'un point à un autre, d'un palace à un yacht, mais tout cela dans un avion éprouvé au combat et équipé des dernières communications et contre-mesures défensives. En particulier dans les pays où la frontière entre le domaine privé et le gouvernement sont floues, comme dans le Golfe, Leonardo espère probablement que son AW609 aura de bonnes chances d'obtenir de telles commandes.

Les opérations de type garde-côtes constituent un autre type de mission dont Leonardo a parlé pour l'AW609. La combinaison du long rayon d’action, de la vitesse élevée et de la capacité d’emport de charges des appareils à rotors basculants les rend d'autant plus efficace - après tout, chaque minute peut faire la différence entre la vie et la mort en matière d’évacuation de blessés dans une zone de combat. La performance du Leonardo AW609 signifie également qu'il peut couvrir une zone d’action large, ce qui signifie qu'il faut moins d'avions et de bases. Selon Leonardo, les qualités uniques de l’AW609 lui permettraient également de remplacer pour ces missions d’évacuations militaires les flottes traditionnelles d’appareils à voilure fixe et à voilure tournante, ce qui entraînerait de grandes économies.

Cependant, c'est un autre produit de Bell qui pourrait finalement contrecarrer les ambitions militaires de Leonardo avec l'AW609. Actuellement en cours de développement, le Bell V-280 Valor utilise la technologie du rotor basculant de deuxième génération. Cet appareil est plus petit et potentiellement moins onéreux à l’achat que le V-22, tout en offrant des capacités de base similaires à bien des égards. Cela pourrait en faire une véritable menace pour l'AW609, du moins sur le marché militaire.


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Prototype de Bell V-280 Valor en vol lors du salon aéronautique de Fort Worth en 2019. © Bell


D'un autre côté, l'avenir du V-280 dépendra probablement en grande partie de la décision de l'armée américaine de sélectionner ce type d'appareil dans le cadre de son initiative FVL (Future Vertical Lift) ou d'opter pour une solution un peu moins radicale (des hélicoptères traditionnels).

En fin de compte, le fait que l'AW609 soit conçu principalement pour des clients civils pourrait bien finir par porter ses fruits, même s'il est difficile d'imaginer que le projet puisse encore être un succès financier désormais. Il est clair que les exigences liées à l'obtention de la certification civile pour un appareil à rotor basculant constituent un obstacle majeur. D'un autre côté, si le projet parvient à établir une base de clients civils plus large, cela devrait contribuer à réduire les coûts et à atténuer les problèmes de maintenance (qui ont jusqu’à présent particulièrement handicapé le V-22).

Avec la première machine de série maintenant en vol, l'AW609 est plus près de commencer à réaliser son potentiel incontestable, bien qu'il y ait encore pas mal de chemin à parcourir. Après 20 ans de développement, considérant les avancées technologiques ajoutées entre-temps au programme initial, cela pourrait finir par faire de l’AW609 un produit de niche … s'il réussit à se vendre. Mais, compte tenu de la pénurie d'avions disponibles capables d'égaler ses performances, le modèle de Leonardo pourrait même réussir là où l'Osprey a échoué jusqu'à présent, et même générer de multiples ventes internationales à des clients gouvernementaux.


FIN

#94 Actualité de l'aéronautique » [Réel] GéopAéro - L'escadron Agresseur Russe se modernise » 21/10/2022 10:16

philouplaine
Réponses : 3

Géop’Aéro … Qu’est-ce donc ? Dénicher (et traduire pour vous) dans les revues internationales, surtout américaines, des articles qui montrent bien l’importance de l’élément aéronautique dans les grands problèmes de géopolitique actuels, pour dénicher des choses intéressantes (j'espère) à raconter ...

Bonjour chers amis,

Le seul escadron Agresseur des forces aériennes russes, basé près d’Astrakhan, était équipé de MiG-29. Ce genre d’escadron d’entraînement des autres pilotes n’avait pas, jusqu’à très récemment, la même importance chez les Russes que son alter ego américain n’en a pour l’USAF.
Mais voilà, les développements récents de la guerre en Ukraine ont poussé les forces aériennes russes à moderniser dans l’urgence cet escadron. Cet article américain présente la toute récente dotation (en septembre dernier) de cet escadron Agresseur en Su-35S des plus modernes. Voyons cela …

Bonne lecture !
Philippe



ARTICLE

L’escadron russe "aggresseur" reçoit ses premiers avions de chasse Su-35S

La Russie a commencé à réorganiser ses capacités limitées d'entraînement au combat de ses pilotes de chasse avec le chasseur multirôle haut de gamme Su-35S Flanker.

Par Piotr Butowski et Thomas Newdick, The War Zone, 4 octobre 2022



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Avion multirôle Soukhoi Su-35S "O1" bleu. Le Soukhoï Su-35S est actuellement le chasseur opérationnel le plus avancé de l'inventaire russe. © Gouvernorat de l’Oblast d’Astrakhan


Article original en Anglais.


Alors que la puissance aérienne russe est encore très impliquée dans la guerre en Ukraine où elle est mise à rude épreuve, l'escadron russe "agresseur", peu connu du pays, a récemment pris livraison de ses tout premiers Su-35S Flanker. Ces avions sont les plus avancés en service avec les forces aérospatiales russes, ou VKS pour Vozdushno Kosmicheskiye Sily. Le conflit actuel en Ukraine a montré qu’améliorer les capacités d'entraînement au combat aérien des pilotes russes était absolument nécessaire. Ces nouveaux Su-35S pourraient maintenant contribuer à mieux atteindre cet objectif qu’auparavant.

Les trois Su-35S flambants neufs ont quitté l'aérodrome de l'usine Soukhoï de Komsomolsk-sur-l’Amour, dans l'Extrême-Orient russe, le 9 septembre dernier. Le lendemain, après trois escales, ils ont atterri à la base aérienne de Privolzhsky dans l’oblast d'Astrakhan, dans le sud de la Russie, après avoir parcouru une distance de plus de 6000 km.


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Deux des trois chasseurs Su-35S se préparent à quitter l'usine Soukhoï de Komsomolsk-on-Amour en direction de l'ouest, le 9 septembre dernier. © United Aircraft Corporation (OAK en Russe)


La United Aircraft Corporation (OAK en Russe pour Obyedinonnaya Aviastroitelnaya Korporatsiya), un consortium aéronautique russe créé en février 2006 qui regroupe les principaux avionneurs civils et militaires de Russie dont Soukhoï, a officiellement annoncé la livraison de trois avions Su-35S au ministère russe de la défense, déclarant qu'elle "achève la mise en œuvre du troisième contrat pour ces chasseurs". Avant la fin de cette année, l'usine livrera également les premiers Su-35S du quatrième contrat avec le ministère de la défense", a ajouté le porte-parole de l’UAC.

La base aérienne de Privolzhsky, près de la ville d'Astrakhan, est le siège du 185ème Centre d'Entraînement et d'Application au combat des forces aérospatiales russes. Il s'agit de la seule formation de ce type en Russie, et elle a pour mission de tout mettre en œuvre pour entraîner les pilotes de combat aux conditions de combat afin de fournir une formation réaliste aux tactiques de combat pour les pilotes et pour le personnel d’autres unités de défense aérienne. La composante aérienne du 185ème Centre de Privolzhsky est le 116ème escadron d'entraînement aux applications de combat de l'aviation de chasse, parfois appelé l’escadron "agresseurs" russe.

Les escadrons d'agression, ou "agresseurs", sont conçus pour exposer les pilotes à un entraînement de haut niveau et comprennent généralement des avions, des systèmes et des opérateurs qui offrent des présentations aériennes réalistes de l'équipement, des tactiques et des techniques de l'ennemi potentiel. L'objectif est de préparer les aviateurs de première ligne aux types d'engagements qu'ils pourraient rencontrer lors de combats aériens réels.


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Une vue satellite du tarmac de la base aérienne de Privolzhsky de l’Oblast d’Astrakhan en avril 2022 montrant 11 MiG-29 sur le côté est de la base. Les deux jets armés sur la gauche semblent faire partie d'une unité d'alerte rapide.  © Google Earth


Jusqu'à présent, le 116ème Escadron n’était équipé que de chasseurs MiG-29SMT Fulcrum. Le MiG-29SMT est un Fulcrum modernisé, dont les premiers exemplaires sont arrivés entre les mains des pilotes Russes après qu'une commande de ces appareils ait été rejeté à l'exportation par l'Algérie. Ces MiG-29SMT ont ensuite été complétés par une autre livraison d’appareils construits selon les spécifications russes. Toutefois, la seule escadrille opérationnelle russe de première ligne à être équipée de ces avions, le 14ème Régiment de Chasse, localisé à Koursk, a depuis mis de côté tous ses MiG-29SMT. Pour quelle raison ? Probablement pour être équipé de Su-35.


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Un chasseur MiG-29SMT du 116ème escadron russe, l’escadron des "agresseurs", sur la base aérienne d'Astrakhan. © Ministère Russe de la Défense


Outre ses avions "agresseurs", le 185ème Centre est aussi responsable du 67ème champ de tir d'Ashuluk (Tambovka) à 150 km au nord d'Astrakhan, ainsi que d'un certain nombre d'autres unités qui s'y trouvent : le 42ème Centre d'Entraînement, qui lui est équipé de lanceurs de missiles sol-air, et de diverses unités radar et radio, des sites de lancement et des stations de contrôle des cibles aériennes, entre autres.

En 2016, un incident de tir impliquant le lancement raté d’un missile sol-air par un système de défense aérienne S-300P, que l'on voit sur la vidéo suivante, a eu lieu sur le champ de tir d'Ashuluk. Deux autres terrains d'entraînement, celui de Mukhor-Konduy et celui de Telemba, tous deux situés près de Tchita, à plus de 4600 km d'Astrakhan, sont également subordonnés au 185ème Centre d’Entrainement.


Vidéo Youtube de l’incident de tir d’un missile S300P en 2016 (Durée : 1min)



L'aérodrome de Privolzhsky héberge deux escadrons équipés tous deux d’anciens chasseurs MiG-29SMT ; les premiers MiG-29 de la série Fulcrum y sont arrivés dès 1989. Il ne semble pas que des avions et des équipages de la base de Privolzhsky aient participé à la guerre avec l'Ukraine, mais cela ne peut être exclu. À l'automne 2017, des MiG de cette base avaient été déployés en Syrie pour participer à l'opération russe dans ce pays. Les trois chasseurs Su-35S qui sont arrivés le 10 septembre dernier au 180ème Centre sont les premiers Flanker livrés à cette unité.


<a href="https://www.casimages.com/i/lpOLOb-Small-Image-F.jpg.html" target="_blank" title="Mon image"><img src="https://nsm09.casimages.com/img/2022/10/21//lpOLOb-Small-Image-F.jpg" border="0" alt="Mon image" /></a>
Un MiG-29SMT qui encore tout récemment était le seul équipement du 116ème escadron du Centre d'entraînement aux applications de combat de l'aviation de chasse russe. On distingue nettement le réservoir dorsal juste derrière la verrière, ce qui caractérise cette version du MiG-29. © Ministère russe de la Défense


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Après avoir parcouru plus de 6000 km, le premier Su-35S est arrivé à Astrakhan où il a été accueilli par le commandant du 185ème Centre, le général Alexei Radko, et le gouverneur local Igor Babushkin. © Gouvernorat de la région d'Astrakhan


Pour rappel, la première commande de Su-35S a été passée par le ministère russe de la Défense en août 2009, il y a déjà plus de 10 ans, et elle portait sur 48 chasseurs. Elle a été suivie d'un deuxième contrat portant sur 50 chasseurs en décembre 2015. Le 12 février 2014, le premier escadron de 12 Su-35S a été officiellement intronisé dans sa première unité opérationnelle, le 23ème régiment de chasse sur la base aérienne de Dzyomgi, près de Komsomolsk-sur-l’Amour. Les derniers chasseurs de ces deux contrats ont été livrés en novembre 2020.

On ne sait pas quand la troisième commande a été passée, mais c'était probablement en 2020. Quoi qu'il en soit, elle était petite, ne portant que sur six appareils. Les trois premiers, portant les numéros de code rouges " 58 ", " 59 " et " 60 ", ont été remis au Centre de formation des équipages de Lipetsk en décembre 2021. Les trois autres, portant les numéros de code bleus "01", "02" et "03", sont les appareils récemment arrivés à Astrakhan.

NdT – Le système russe des indicatifs Bort est le suivant : il date de l’époque soviétique. C'était leur système pour cacher la force de leur armée de l'air. Depuis le début des années 1950, les Soviétiques n'utilisaient que des numéros tactiques à deux chiffres. Chaque avion d'un régiment avait un numéro. Le premier avion du premier escadron recevait le numéro 01, le second le numéro 02 ... le 13ème le numéro 14, car jamais d’avion 13 dans l’armée russe, et le dernier le numéro 17 (16 avions par escadron). Le premier avion du deuxième escadron recevait le n° 21, et le premier du 3ème escadron du régiment recevait le No 31 et le dernier avion du régiment avait le No 49. Vous voyez qu'il n'y a jamais de No 00 et No 13 dans le système soviétique. La couleur du numéro Bort est généralement le rouge. S'il y a plus d'un régiment placé sur une base aérienne, le premier régiment a des numéros rouges, le second des numéros bleus, le troisième des numéros jaunes, etc. La raison est que si tous les régiments avaient des numéros rouges, il y aurait deux ou plusieurs avions avec le même numéro tactique. Bort est un mot russe pour dire le bord en français : bord du navire ou bord du fuselage d’un avion.


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Sur les photos officielles des Su-35S livrés à Astrakhan, les chiffres bleus Bort sont floutés pour une raison totalement inconnue mais propre à la logique russe actuelle (héritée de la logique soviétique), mais sur les vidéos réalisées par le constructeur sur leur site de montage, les indicatifs Bort sont bien visibles, comme le montre cette capture d'écran. © United Aircraft Corporation


La quatrième commande de 20 chasseurs a été passée à l'UAC par le ministère de la défense fin 2020. Elle prévoit la livraison d'avions entre 2022 et 2024. Par conséquent, dans le cadre de ces quatre commandes, l'usine Soukhoï de Komsomolsk-sur-l’Amour devrait finalement livrer un total de 124 chasseurs Su-35S aux VKS.

Les Forces Aérospatiales Russes exploitent actuellement des chasseurs Su-35S au sein de deux régiments du district militaire oriental (le 22 IAP à Tsentralnaya Uglovaya et le 23 IAP à Dzyomgi) et de deux régiments du district militaire occidental (159 IAP à Besovets et 790 IAP à Khotilovo). Certains appareils se trouvent également au centre d'essais militaires d'Akhtubinsk, au centre d'entraînement des équipages de Lipetsk, et désormais à l'escadron d'agression d'Astrakhan.

Des exemplaires du Su-35S ont également été remis à l'équipe de voltige des Chevaliers Russes (ou Russkiye Vityazi) à la base aérienne de Kubinka, près de Moscou. Les quatre premiers chasseurs destinés à l'équipe sont arrivés à Kubinka le 12 novembre 2019, suivis des quatre autres en juin 2020. Le Su-35S, avec ses capacités de vecteur de poussée 3D, est depuis longtemps connu pour sa maniabilité grâce à de multiples démonstrations accrocheuses, dont certaines sont d'une utilité réelle au combat plutôt discutable.


Vidéo YouTube des Su-335S équipant l’escadrille de voltige des Forces Aériennes Russes : les Chevaliers Russes (Durée 8min12)


Le Su-35S dans la guerre en Ukraine

Depuis l'invasion de l'Ukraine par le Kremlin le 24 février 2022, le Su-35S a joué un rôle de premier plan, étant utilisé à la fois pour des missions de défense aérienne et des missions offensives air-sol. Ces dernières comprennent des sorties de suppression des défenses aériennes ennemies avec des missiles antiradar de la série Kh-31P (AS-17 Krypton). Les missions air-sol ont également utilisé des armes lourdes à distance de sécurité telles que la bombe planante guidée UPAB-1500B.
Dans leur rôle air-air, les chasseurs Su-35S impliqués dans la guerre en Ukraine ont été remarqués transportant toute une gamme d'armements, notamment des missiles R-27 (AA-10 Alamo) à moyenne portée à guidage radar/infrarouge, des missiles R-77-1 (AA-12 Adder) à guidage radar actif et des missiles R-73/74 (AA-11 Archer) à courte portée à guidage infrarouge. En d'autres occasions, les chasseurs Su-35S ont été configurés simultanément pour des missions antiradar et air-air.

Un autre élément important utilisé par le Su-35S dans le conflit est la paire de pods d'extrémité d'aile associée à la suite de guerre électronique Khibiny-M. Alors qu'une capacité de brouillage électronique du type de celle offerte par le Khibiny serait d'une grande utilité pour un escadron d'agresseurs, les photos des chasseurs utilisés en Ukraine les montrent jusqu'à présent plutôt équipés de missiles que de ces pods de guerre électronique.

Bien que le succès du Su-35S dans les combats au-dessus de l'Ukraine ne soit pas clair, il a été confirmé qu'au moins un exemplaire a été abattu le 3 avril près d'Izyoum, au sud-est de Kharkiv. La cause de la perte n'est pas confirmée, mais l’avion aurait été abattu par les défenses aériennes au sol, le pilote s'étant éjecté et ayant été capturé.


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Un chasseur russe Su-35S abattu près d’Izyoum. © Illia Ponomarenko, @KyivIndependent


Jusqu'à présent, il n'y a pas eu d'autres pertes de Su-35S confirmées de manière indépendante, bien que, compte tenu notamment de la forte attrition à laquelle ont été confrontés les autres avions russes, cela semble plus que probable.
Entre-temps, les témoignages du personnel de l'armée de l'air ukrainienne, du moins, dressent le tableau d'une utilisation généralement très prudente des ruses de leurs Su-35S.

Un pilote ukrainien de MiG-29, très connu sur les réseaux sociaux sous le nom de "Juice", a fait remarquer que le Su-35S était la menace la plus dangereuse à laquelle lui et ses collègues aviateurs étaient confrontés, en raison de la combinaison d'un radar puissant, avec une longue portée effective, et de missiles air-air actifs guidés par radar, qui font défaut dans l'arsenal ukrainien. Un autre facteur clé dans les attaques réussies des Su-335S russes est la disponibilité d'avions d'alerte avancée A-50 Mainstay (NdT - Avion quadriréacteur AWACS russes dérivés de l’Ilyoushin Il-76) pour surveiller l'activité aérienne au-dessus de l'Ukraine depuis leur base avancée en Biélorussie et fournir des données sur les cibles aux avions de chasse.

Ce qui est notable, cependant, selon le récit de Juice, c'est la réticence des pilotes de Su-35S à s'engager dans un combat aérien à moins de bénéficier d'un avantage numérique considérable. Juice disait récemment :  "Vous savez, deux ou quatre Su-30 sont bien suffisants pour contrer en vol nos pauvres MiG-29 ou nos Su-27. Mais, nous voyons régulièrement lors de nos missions, les russes tenter de nous contrer avec un groupe de 12 de leurs chasseurs, parfois même 24 d’un coup."
Cela semble certainement exagéré, non seulement en raison de l'avance technologique du Su-35S, mais aussi parce que les pilotes russes devraient bien connaître les points forts et les points faibles des MiG-29 et les Su-27 ukrainiens et savoir comment les vaincre au mieux.


Vidéo YouTube de Su-335S en mission de guerre au-dessus de l’Ukraine en mars dernier – Vidéo de l’armée de l’air russe (Durée 1min35)


Il convient également de noter que l'armée de l'air ukrainienne s'était déjà fortement entraînée contre les Su-35S et les Su-30SM avant le conflit actuel. Un élément important des exercices avec l'US Air Force, en particulier la série d'exercices Clear Sky, impliquait des F-15C de la California Air National Guard qui reproduisaient face aux pilotes ukrainiens les tactiques et les performances de ces chasseurs russes haut de gamme. Juice a expliqué que, malgré le décalage technologique, dans les combats simulés contre les F-15, les Ukrainiens ont "parfois bien réussi, en utilisant simplement des décisions non standard".

Ce type de pensée créative et de capacité à utiliser des méthodes peu orthodoxes pour obtenir un avantage est quelque chose qui, traditionnellement, a été nettement moins évident dans la doctrine de la puissance aérienne russe (et avant cela soviétique). Pour les chasseurs de la défense aérienne, de nombreux scénarios d'entraînement reposent sur des tactiques d'interception contrôlée au sol (ICS), impliquant des capteurs et des postes de commandement au sol, ce qui n'est pas du tout disponible au même degré sur un théâtre de combat.

Cette question a été soulevée dans le cadre des discussions intenses sur les raisons potentilles des graves échecs des forces aériennes russes au-dessus de l'Ukraine et, en particulier, sur son incapacité à établir un niveau significatif de supériorité aérienne face à la résistance obstinée de l'armée de l'air ukrainienne et des défenses aériennes au sol.


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La formation des trois chasseurs Su-35S arrivant à Astrakhan le 10 septembre dernier. © Gouvernorat de la région d'Astrakhan


"Gérer des zones d'engagement dans lesquelles des avions de combat et des systèmes SAM sol-air peuvent engager simultanément des forces ennemies dans un environnement complexe sans incidents liés aux tirs amis est difficile", a observé Justin Bronk, chargé de recherche sur la puissance aérienne au Royal United Services Institute (RUSI), dans les premiers jours de la guerre. "Il faut une étroite coopération interservices, d'excellentes communications et un entraînement régulier pour maîtriser cette difficulté opérationnelle."

Le conflit en Ukraine a probablement mis davantage en évidence la nécessité de disposer d'appareils haut de gamme comme le Su-35S dans tout escadron "agresseur", tout en apportant la preuve d'un besoin de modernisation des programmes de formation, de manière plus générale.

Les lacunes de la formation russe

Il est juste de dire que si les forces aériennes russes ont introduit quelques avions tactiques très performants dans leur inventaire ces dernières années, la formation des pilotes en revanche n'a généralement pas réussi à suivre le rythme de l'évolution générale du combat aérien. Dans l'ensemble, le régime de formation semble moins avancé que dans les principales forces aériennes occidentales.

Selon de multiples témoignages, les pilotes de chasse russes enregistrent probablement une moyenne de moins de 100 heures de vol par an, soit le tiers de ce que font la plupart de leurs homologues américains ou britanniques. Il existe également des disparités dans les heures de vol entre les différents districts militaires russes, bien que les pilotes de Privolzhsky soient réputés avoir le plus grand nombre d'heures de vol de toute l'aviation tactique, avec plus de 120 heures par an.


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Une équipe au sol prépare des missiles air-air pendant l'exercice de tir Ladoga-2019 à la base aérienne de Besovets, dans le district militaire de Carélie près de la frontière avec la Finlande. © Ministère russe de la Défense


Dans le même temps, les pilotes occidentaux ont accès à des simulateurs haute-fidélité et à des aides à l'entraînement supplémentaires qui sont beaucoup plus difficiles à trouver en Russie ; ils bénéficient également d'une meilleure ergonomie du cockpit et d'armes bien plus faciles à utiliser.

Parallèlement, les exercices auxquels les équipages des forces aériennes russes peuvent s'attendre à participer sont loin d'être aussi complexes et rigoureux que leurs équivalents occidentaux. Alors que les pilotes de chasse doivent s'entraîner à toutes les manœuvres de combat aérien et aux exercices de tir réel, ces derniers pour les pilotes russes se résument généralement à tirer sur des cibles larguées par avion. Les exercices "multinationaux" se caractérisent par une participation étrangère limitée et, comme la série Aviadarts, se concentrent souvent sur l'utilisation d'armes air-air non guidées, ce qui n'est que rarement vu dans les exercices occidentaux équivalents, et encore moins en combat.


Vidéo YouTube des exercices Aviadarts 2018 Su-335S , notamment des jets Su-35S armés de simples roquettes air-air non – Vidéo de l’armée de l’air russe (Durée 0min45)


D'autres entraînements ont été ponctués de mésaventures embarrassantes, notamment un Su-35S qui a abattu un Su-30M lors d'un entraînement simulant un combat aérien rapproché en 2020, et un intercepteur MiG-31 Foxhound qui a fait exploser son ailier lors d'une mission à balles réelles en 2017. Dans les deux cas, il a été suggéré qu'une erreur de pilotage était à l'origine de ces tirs accidentels.

Grâce à la longue campagne aérienne russe en Syrie, plus de 90 % des équipages des forces aériennes russes auraient été exposés à des opérations réelles de combat, certains des pilotes les plus expérimentés ayant alors accumulé plus de 400 sorties de combat avant la guerre en Ukraine, selon le ministre russe de la Défense Sergei Shoigu. Toutefois, ces sorties ont été effectuées sans véritable menace dans les airs et contre un adversaire qui n’était alors au mieux qu’équipé de roquette sol-air lancée à l’épaule. Par conséquent, bien que les pilotes russes ne manquent pas d'expérience de combat, leur valeur dans une guerre de haute intensité est très discutable.


Vidéo YouTube sur une mission typique des Su-35S lors de la campagne syrienne en 2019 : l'escorte de l’avion transportant le ministre russe de la Défense Sergei Shoigu – Vidéo de l’armée de l’air russe (Durée 0min25)


En gardant cela à l'esprit, il est clair qu'il y a une place pour l'entraînement des pilotes russes confrontés à des pilotes agresseurs afin de fournir un plus haut degré de réalisme dans l'entraînement air-air. Bien que les MiG-29SMT exploités par le 185ème Centre soient relativement puissants, ils n'ont pas les performances et les capacités d'armement du Su-35S. Ils sont également gênés par une résistance assez faible. Combinés aux pilotes plus expérimentés qui sont sans aucun doute disponibles pour l'unité, les nouveaux agresseurs Su-35S seront beaucoup plus aptes à défier les pilotes russes à l’entraînement. Cependant, ceux qui pilotent le Su-35S sur la ligne de front n'en tireront pas le même bénéfice, sans le défi supplémentaire que représente un agresseur volant sur un appareil différent de leur propre avion.

Dans les programmes aériens des escadrons "agresseurs" du monde entier, il y a actuellement une énorme demande non seulement de plateformes avion-équipements avancées pour pousser les pilotes et les avions à leurs limites, mais aussi d'un nombre significatif d'avions simultanément impliqués pour générer suffisamment de sorties et offrir une opposition numériquement supérieure aux pilotes formés. L'ajout de seulement trois jets Su-35S sur la ligne de vol de la base aérienne de Privolzhsky peut représenter un bond en avant dans les capacités par rapport au MiG-29SMT, mais de facto ce nombre très petit reflète également les ambitions limitées des forces aériennes russes dans l'effort de formation de ses pilotes de chasse.


FIN

#95 Vos expériences et vos récits aéronautiques » [Réel] Une bombe-WC accrochée sous l’aile d’un avion de l’US Navy » 04/10/2022 12:34

philouplaine
Réponses : 3

Bonjour chers amis,

Vous savez que j’aime les histoires un peu folles qui courent dans le milieu de l’aérien.
En voici une, bien étonnante. Au-delà du côté surprenant du fait relaté, il faut bien garder en tête que les Américains ont un rapport à l’humour autour des WC et de ce qu’on y fait qui leur est vraiment propre (si j’ose dire) …
Je vous ai traduit l’article de l’anglais. J’ai pensé que cette histoire de bombes-toilettes pourrait vous intéresser.

Bonne lecture
Philippe




ARTICLE

Voici pourquoi un siège de toilette est accroché sous l’aile d’un F/A-18 Super Hornet de l’US Navy

Ce n'est pas la première fois qu'une "toilette tueuse" se retrouve sur un avion de l'escadrille "Fist Of The Fleet", le Strike Fighter Squadron VFA-25.

Par Tyler Rogoway, The War Zone, 18 septembre 2022


Source : Article original en Anglais.



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Insigne du VFA-25 - Escadrille Aéronavale "The Fist of the FLeet".


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L'objet du déli. © Courtesy of Wayne Toth



Le US Navy Strike Fighter Squadron 25, plus connu sous le nom de VFA-25 "Fist Of The Fleet" (NdT – Le poing de la Flotte), a présenté l'un de ses tout nouveaux F/A-18E Super Hornet avec un objet très particulier accroché sous l’une des ailes : des toilettes avec un empennage rouge ressemblant à une bombe air-sol.

Il doit y avoir une bonne histoire derrière cette installation à la Vil Coyote, non ? Bien sûr qu'il y en a une, la voici !
L'unité VFA-25, basée à la Naval Air Station Lemoore (KNLC) près de Fresno en Californie, a une histoire riche qui remonte à la Seconde Guerre mondiale, lorsque les hommes de la VA-25 de l'époque (l’ancêtre de la VFA-25) pilotaient des bombardiers-torpilleurs Grumann Avenger dans le Pacifique. L'illustre palmarès de l'unité s’est renforcé en Corée, puis au Vietnam, où son équipement était le fabuleux avion d'appui aérien rapproché Douglas A-1 Skyraider à moteur à piston. C'est à ce moment-là que la fameuse bombe-toilette a vu le jour. Voyons comment.


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Une des bombes « à la Vil Coyote » dont parle cet article. Le caractère du dessin animé Bip Bip et le Coyote créé par Chuck Jones est connu pour ses inventions délirantes afin de lui faire gagner la vitesse nécessaire pour rattraper Bip Bip. En anglais, le Vil Coyote s’appelle Will E. Coyote (pour faire rimer Will E se prononce "Wili" et Coyote se prononce "Coyoti").


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Le gros Skyraider et son anachronique moteur à piston a partagé les ponts des porte-avions avec des jets rapides à la pointe de la technologie pendant la guerre du Vietnam. On voit ici un Douglas A-1J Skyraider de la VA-25 sur le porte-avions USS Coral Sea (CVA-43) en 1967. © US Navy


Le 4 novembre 1965, le capitaine de frégate Clarence W. Stoddard, Jr, commandant en second du VA-25 "Fist of the Fleet", aux commandes du A-1H Skyraider 135297, de la Carrier Air Wing 2 à bord de l'USS Midway, transporta une bombe spéciale vers les Nord-Vietnamiens pour commémorer la 3 millième tonne de munitions larguées sur le Nord-Vietnam. Cette bombe était vraiment unique et spéciale car c'était des toilettes ! Autre particularité de cette mission, l'avion avait été baptisé "Paper Tiger II" juste avant de partir pour cette mission très particulière (un nom temporaire utilisé pour ce seul vol).


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Capitaine Clarence W. Stoddard (1927-1966). © US Navy


Voici le récit de cet événement, avec l'aimable autorisation du capitaine à la retraite Clint Johnson, de l’US Navy Reserve, qui était l'un des deux pilotes de VA-25 A-1 Skyraider qui avaient le mérite d'avoir abattu un MiG-17 Viet le 20 juin 1965.
"J'étais pilote à la VA-25 au Vietnam en 1965. Le Skyraider 572 était piloté par le Commander Clarence W. Stoddard, qu’on appelait tous Bill. Son ailier, qui lui volait sur le 577 (mon avion d'affectation), était le Lieutenant Commander Robin Bacon. Le Skyraider 577 avait une caméra montée dans l'aile, la seule qui restait dans toute la flotte des Skyraider depuis la Seconde Guerre mondiale.

La mission assignée à ces deux appareils était une frappe de la station Dixie (au Sud-Vietnam) en direction du Delta du Mékkong. Lorsqu'ils sont arrivés dans la zone cible et que le CDR Stoddard commença, selon la procédure, à lire la liste des munitions à bord de son avion à l’officier FAC (le Forward Air Controller) qui était à bord de son Cessna O-1 dans les parages pour commander et guider la mission d’attaque des deux Skyraider à bord, il termina en disant : "et une dernière munition dont le nom de code est Sani-Flush". L’officier FAC ne pouvait pas le croire et décida de rejoindre les deux Skyraider pour le voir. La Sani-Flush fut larguée par le Skyraider 572 en piqué, et son ailier sur le Skyraider 577 volait en formation serrée juste derrière pour filmer le largage. Une fois larguée, la bombe-toilette a tourné dans le sens du vent et a presque heurté le 577, tellement la formation était serrée. Le film, une fois, eut beaucoup de succès en salle de préparation des missions du porte-avion Midway.

Comment ces toilettes arrivèrent-elles là ? Ces toilettes étaient endommagées et devaient être jetées par-dessus bord. Un de nos pilotes la récupéra et nos hommes de l'équipe technique fabriquèrent rapidement un rack spécial qui pouvait la maintenir et s’attacher sous l’aile d’un Skyraider, ils ajoutèrent à l’arrière des toilettes un empennage pour stabiliser un minimum son vol et à l’avant un gros détonateur. Les contrôleurs à bord de l’USS Midway ont placé le Skyraider équipé de cette bombe-toilette dans un endroit du pont d’envol éloigné de la vue du pacha et du commandant des vols. Puis ils autorisèrent son roulage pendant que les patrons discutaient sans regarder le pont. Au moment même où l’avion décollait, le boss de la passerelle passa un message par l’intercom général (NdT – un message 1MC comme on dit dans la marine américaine) : « Bon sang ! Qu’est-ce qu’il y avait sous l’aile droite du 572 qui vient de décoller ? » … Mais c’était trop tard pour le rappeler.

Après cette mission Sani-Flush, il y eut beaucoup de blagues avec les gars du service de renseignement, avec des remarques comme quoi c’était un nouveau type de guerre bactériologique, etc. Je regrette que nous n'ayons pas conservé le film enregistré par la caméra d’aile du le 577. Malheureusement, le Commander Stoddard fut tué quelques mois plus tard tué en pilotant le même 572 en octobre 1966. Trois missiles SAM nord-vietnamiens l’abattirent au-dessus de Vinh."


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Le Skyraider 572 équipé de ses WC largagbles en mer de Chine. © US Navy


Outre l’insigne de la VFA-25, la lettre "E" figurant sur la bombe-toilettes indique que l'unité a reçu le prix de l'efficacité au combat (NdT - Le concours "Battle E" est organisé pour évaluer l'état de préparation au combat du commandement et de l'ensemble de la force, et pour reconnaître les performances exceptionnelles. Le critère pour l'attribution du prix Battle "E" est l'état de préparation général d'un navire -équipages et commandement- pour l'exécution de la mission de combat, généralement extrêmement difficile, retenue pour l’épreuve. La concurrence pour l'attribution des prix Battle "E" est extrêmement rude parmi les équipages de l’US Navy. Les navires recevant le "E award "sont considérés comme les plus prêts au combat tout au long de l'année).


Vidéo très courte (1min10) montrant le départ du Skyraider avec sa bombe-toilette originale (très mauvaise qualité et pas de son)


Maintenant que nous en avons terminé avec la leçon d'histoire sur d’où viennent ces bombes-WC, quelles sont les circonstances qui ont ramené ces toilettes largables dans l’escadrille "Fist of the Fleet". Le Chief Warrant Officer Wayne Toth, membre de la VFA-25, qui a partagé ses photos avec nous pour cet article, nous a également donné un petit aperçu sur les bombe-toilettes : "Je suis officier responsable de l’armement à l’actuelle VFA-25. Nous avons eu récemment un changement de commandement et nous avons donc décidé d’accueillir le nouveau pacha en répétant ce qui avait été fait lors de la guerre du Vietnam. Mais, cette fois sur un Super Hornet BLOCK III flambant neuf. Un de mes hommes (Meagan Rickets) a récupéré des toilettes sur un marché, puis j'ai découpé l'acier de pattes Mk76, fabriqué l'empennage à partir de plusieurs tuyaux d'échappement de séchoir, et les autocollants ont été réalisé dans nos ateliers à bord du porte-avions par les hommes du contrôle des corrosions.


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La dernière bombe-WC installée sous l’aile d’un Super Hornet. © Wayne Toth


La cérémonie de passation de commandement s'est déroulée le 16 septembre à la Naval Air Station Lemoore, où la bombe-toilette historique était fièrement exposée. Au cours de la cérémonie, le commandant Mark Tedrow, un ancien Blue Angel, a succédé au commandant Kristen Hansen à la tête de la VFA-25. C'était le moment idéal pour un rappel amusant de la fière histoire de notre escadrille.

Et c'est ainsi que la fameuse bombe-WC est réapparue sous l’aile d’un appareil de l’US Navy. Un grand bravo à Wayne Toth et à ses camarades d'escadrille pour avoir remis le fameux siège de toilette sous l'aile d'un avion du "Fist Of The Fleet" après toutes ces années et nous félicitons ses hommes pour leur réalisation.

FIN


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Le commandant Mark Tedrow (à gauche) remplace la commandante Kristen Hansen à la tête de la VFA-25 "Le Poing de la Flotte". © US Navy

#96 Actualité de l'aéronautique » [Réel] Premier vol du bipropulseur électrique ALICE » 04/10/2022 12:16

philouplaine
Réponses : 6

Bonjour chers amis,

Je vous ai traduit un article US paru récemment sur le premier vol d’un avion à propulsion électrique. Bon ce n’est pas le premier, mais celui-là est destiné au transport de fret et de passagers … jusqu’à neuf passagers. J’ai pensé que ce sujet pourrait vous intéresser.

Bonne lecture !
Philippe



ARTICLE

L'avion à propulsion électrique "Alice" a volé pour la première fois

Après des mois de retard, le premier vol de l’avion Alice de la start-up Eviation pourrait être une étape majeure vers les futurs voyages aériens à propulsion électrique.

Par Oliver Parken, The War Zone, 27 septembre 2022


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Le "Alice" de la société Eviation effectue son premier vol. © Eviation Aircrafts


Source : Article original en Anglais.


L'élégant avion "Alice" de la société israëlienne Eviation Aircrafts, un avion entièrement électrique, a volé pour la première fois aujourd'hui, mardi 27 septembre. Ce premier vol marque une étape importante pour la startup israélienne, après des mois d'essais au sol et de retards dans le programme. Le premier vol de l’Alice était très attendu par les acteurs de l'industrie aéronautique, Eviation Aircrafts le qualifiant de "premier avion de transport régional entièrement électrique au monde".

Ce premier vol s’est déroulé à l'aéroport international de Grant County (KMWH) à Moses Lake, Washington. L’Alice a décollé vers 7 h 10 PST du matin (NdT – PST = Pacific Standard Time, soit 16h10 Heure de Paris hier mardi) et a volé pendant environ 9 minutes et 3 secondes à une altitude d'environ 3 500 pieds. La compagnie Eviation travaille depuis un certain temps avec la société d'ingénierie aérospatiale AeroTEC pour livrer l'avion, les tests étant effectués dans les installations d'AeroTEC à Moses Lake.

Dans une déclaration officielle, Gregory Davis, PDG d'Eviation, a déclaré : "Aujourd'hui, nous entrons dans une nouvelle ère de l'aviation. Nous avons réussi à électrifier les cieux avec le premier vol inoubliable d'Alice. Les gens savent maintenant à quoi ressemblera une aviation abordable, propre et durable, pour la première fois dans un avion de transport à aile fixe entièrement électrique. Cette étape est une innovation révolutionnaire dans le domaine du transport aérien durable, et façonnera le transport de passagers et du fret à l'avenir."

Depuis plusieurs semaines, des signes avant-coureurs s’amoncelaient indiquant qu'Eviation était proche du premier vol pour son avion Alice. Le 18 septembre dernier on avait pu voir l’Alice effectuer des tests de roulage à grande vitesse à l’aéroport de Moses Lake.


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L’Alice sur le tarmac de l’aéroport de Moses Lake le 27 septembre. © JDL Multimedia


Ce bimoteur, nommé ainsi d'après l'Alice de Lewis Carrol dans Alice aux Pays des Merveilles, est conçu pour accueillir neuf passagers et deux pilotes. Après qu'une maquette ait été dévoilée au Salon du Bourget en 2019, la cellule a été affinée depuis avec désormais une dérive en T, des ailes droites à fort allongement équipées de winglets, et deux moteurs électriques à hélices montés à l'arrière et orientées vers l'avant.


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Première maquette grandeur nature de l'Alice en 2019 au Salon du Bourget. © Eviation Aircrafts


Selon Eviation, l'Alice est conçu pour voler sur une distance maximale de 450 km à une vitesse de croisière de près de 500 km/h. Une configuration "affaires", avec six sièges, serait également en préparation. Cet avion bimoteur entièrement électrique est alimenté par des batteries à haute densité énergétique qui alimentent deux moteurs Magni650, construit par le motoriste MagniX, de 640 kilowatts (860 ch) équipés d’hélices à cinq pales.


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Le moteur électrique Magni650 qui équipe l'Alice. © MagniX


Omer Bar-Yohay, l'ancien PDG d'Eviation qui siège toujours au conseil d'administration de la société, a déclaré à flyingmag.com que l'avion utilise : "le même type de cellules de batterie 21700 [Lithium-ion] que l'on trouve dans une Tesla ou dans de nombreuses autres voitures électriques actuelles. Si vous regardez les fiches techniques, nous obtenons environ 270 à 260 wattheures par kilogramme au niveau des cellules. (La batterie elle-même) fonctionne comme un élément structurel de l'avion, ce qui signifie que l'avion ne peut pas voler sans la batterie, du point de vue de la charge." M. Bar-Yohay a également dit qu'il espérait que l'avion obtienne sa certification FAA à temps pour entrer en service commercial en 2025.

Le voyage vers ce premier vol d'Alice n'a pas été de tout repos. Le vol inaugural d'Alice devait avoir lieu fin 2021, mais plusieurs facteurs l'ont repoussé à 2022 selon la société. Il s'agit notamment de mauvaises conditions météorologiques, de l'impact de la pandémie COVID-19 et de changements à la tête d'Eviation avec le départ de M. Bar-Yohay qui ont pas mal bousculé la jeune start-up. Les défis technologiques d'une conception aussi ambitieuse sont également omniprésents.

En décembre 2021, l'avion a subi des essais moteurs sur l'aéroport municipal d'Arlington (KAWO) au nord de Seattle, et des essais de roulage ont également été effectués. En janvier 2022, Bar-Yohay prévoyait que l'avion était sur la bonne voie pour prendre son envol dans les semaines qui suivraient l'achèvement d'autres tests au sol. Ceux-ci n'ont pas été tout à fait concluants. Lors d'un essai de roulage le 28 janvier 2022, l'avion a subi une sortie de piste sur quelques centaines de mètres.

Lee Human, PDG d'AeroTEC, a déclaré au Seattle Times en juillet 2022 : "Nous avons finalisé le travail de conception [pour l’Alice] il y a un an déjà. De nombreuses nouvelles technologies sont appliquées à cet avion. Et oui, il y a eu de sérieuses difficultés à intégrer ces technologies pour les faire fonctionner ensemble."

Le potentiel de l'avion à révolutionner l'industrie aéronautique à court terme se reflète dans le tout récent succès commercial remporté par Eviation. La compagnie aérienne charter Global Crossing Airlines (GlobalX), basée à Miami, a récemment signé une lettre d'intention avec Eviation pour 50 avions Alice, dont les livraisons devraient, si tout va bien, commencer en 2027. Le PDG de GlobalX, Ed Wegel, a déclaré : "L'avion Alice d'Eviation établit une nouvelle norme en matière d'aviation durable, et nous prévoyons d'utiliser cet avion sur lignes pour les croisiéristes, aux tour-opérateurs, aux fournisseurs de voyages de loisirs et aux clients d'affaires ayant besoin de vols charter court-courriers à travers toute la Floride et les Caraïbes."

En avril 2022, le géant Cape Air, la compagnie aérienne basée dans le Massachussetts, a également signé une lettre d'intention avec Eviation pour 75 avions Alice, dans le but de promouvoir "la durabilité, la croissance et l'innovation."

Mais le chemin est encore long. L’Alice a encore beaucoup à prouver, mais le simple fait qu'il ait volé est un jalon important dans l'histoire de l'aviation.


* * *


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#97 Re : Vos expériences et vos récits aéronautiques » [Réel] Photos du bureau - A220 » 22/08/2022 20:07

AH cher Quentin, merci beaucoup pour ce partage et ces magnifiques photos ... j'aime la vue sur Paris depuis le FL trucmuche (300 et des brouettes non?) .. et comme el dit oualigator .. ton MSFS est réglé au top :))))
Sinon, Quentin54 et tu parles de Riga ... mais je ne vois aucun Riga en Meurthe et Moselle (département 54) ?????
Philippe

#98 Re : Actualité de l'aéronautique » 3 de plus cette année » 21/08/2022 13:48

Merci Churchill, cher Winston, pour cette très importante info ... un vraiment beau triplet !!
Bravo à eux!
Philippe

#99 Actualité de l'aéronautique » [Réel] GéopAéro - Explosions en Crimée : accident ou attaque ? » 11/08/2022 12:45

philouplaine
Réponses : 0

GéopAéro (et pas GéopApéro) … Qu’est-ce donc ? Dénicher (et traduire pour vous) dans les revues internationales, surtout américaines, des articles qui montrent bien l’importance de l’élément aéronautique dans les grands problèmes de géopolitique actuels, pour dénicher des choses intéressantes (j'espère) à raconter ...

Bonjour chers amis,

Nous avons tous entendu parler des explosions qui ont eu lieu avant-hier, le 9 août, sur une base aérienne russe en Crimée, la base de Saki de l’aéronavale russe … de nombreuses vidéos ont été postées qui semblent toutes montrer qu’il n’y a pas eu une explosion mais de multiples. Alors accident (comme déclaré par les officiels russes) ou attaque (comme beaucoup le suggère).
J’ai pensé que vous aimeriez peut-être lire la traduction d’un article paru dès hier avec des analyses de photographies satellite pises par les satellites de la société privée américaine Plante Labs. Ces photos sont sans appel et montrent bien des cratères et des bâtiments, des abris et des avions détruits. Il y aussi dans ce post des liens pour plusieurs vidéos prises pour certaines sur place. À vous de voir (et de lire) !

Bonne lecture !
Philippe




DESTRUCTIONS MASSIVES APRES LES EXPLOSIONS SUR LA BASE AERIENNE RUSSE EN CRIMEE

Ce qui s'est passé à la base aérienne de Saki le 9 août dernier reste flou, mais les images satellite montrent de nombreux avions et structures endommagés ou détruits, ainsi que des cratères.

Par Joseph Trevithick, The War Zone, 10 août 2022


Article original en Anglais


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Image satellite montrant les conséquences des explosions qui ont secoué la base aérienne russe de Saki, dans la péninsule de Crimée, le 9 août 2022. © Planet Labs 10 août 2022

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Vue d’un des tarmacs de la base aérienne russe de Saki-Novofedorivka avant les explosions d’avant-hier. © Russian Air Force


Nous avons, à The War Zone, obtenu des images satellites de la société Planet Labs de la base aérienne russe de Saki, dans la péninsule de Crimée occupée, après les explosions toujours inexpliquées d'hier (NdT – le 9 août). Les avions semblent avoir été les plus durement touchés et spécifiquement ciblés, avec au moins 10 appareils sérieusement endommagés ou détruits. Un certain nombre de revêtements de piste et de tarmac et d'autres structures en dur ont également subi des dommages visibles, mais les principales infrastructures semblent indemnes. L'incertitude continue d'entourer les circonstances exactes de ce qui s'est passé hier en Crimée.

Ce qui ressort clairement de l'imagerie satellite, c'est que la base aérienne de Saki a subi d'importants dégâts à la suite de ce qui s'est passé. La majeure partie des dommages semble s'être produite sur et autour d'une grande aire de trafic à l'extrémité sud-ouest de la base et d'un ensemble d’abris d'avions à proximité.


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Une image satellite de la totalité de la base aérienne de Saki prise le 10 août 2022, le lendemain d'une série d'explosions qui ont ravagé la base. © Planet Labs 10 août 2022


Comparées aux images de la base prises hier, il semble que trois avions de combat Su-24 Fencer, ainsi qu'un avion de chasse Su-30 Flanker, aient été détruits sur le tarmac. Une vidéo a été diffusée hier montrant au moins un Fencer brûlé sur le tarmac de la base. Un certain nombre de structures adjacentes semblent avoir subi des dommages plus ou moins importants.


Vidéo Twitter des restes d’un bombardier russe Su-24 après les explosions.


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Gros plan de la rampe à l'extrémité sud-ouest de la base aérienne de Saki montrant les restes de plusieurs avions. On peut également voir des camions de pompiers et d'autres véhicules. Les structures situées au sud et à l'est sont également endommagées. © Planet Labs 10 août 2022


Les photographies satellite de Planet Labs montrent au moins quatre cratères relativement grands, tous de taille similaire, au milieu des abris et du tarmac. Toujours en se basant sur les comparaisons avec les images d'hier, au moins trois Su-30 Flanker et trois autres Su-24 Fencer qui étaient parqués dans les abris individuels ont très probablement été détruits. Un autre Su-24 et une structure adjacente, ainsi qu'une autre structure séparée, tous dans cette même partie de la base ont également été totalement détruites. Un cinquième Su-24 semble également endommagé.


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Un gros plan des dommages causés à la zone des abris individuels. L'une des structures détruites était située dans le virage de la voie de circulation, où se trouve maintenant un cratère visible sur cette image, tandis que ce qui reste de l'autre structure, ainsi qu'un Su-24 calciné à proximité, est visible dans le coin supérieur droit. © Planet Labs 10 août 2022


L'armée de l'air ukrainienne a affirmé plus tôt aujourd’hui qu'au moins 10 avions russes avaient été détruits. L'imagerie satellite indique clairement que le décompte total est plus élevé. Le nombre total de personnes décédées ou blessées lors de l'incident n'est pas non plus confirmé. D'autres avions semblent avoir été déplacés de l'aire de trafic vers d'autres parties de la base, y compris l'extrémité nord-est de la voie de circulation, à la suite de l'incident. Il s'agit notamment d'un biréacteur Tupolev Tu-134, dont certains exemplaires sont utilisés en Russie comme appareils d'entraînement à la navigation et aux radars pour les équipages de bombardiers, ainsi que pour le transport des personnalités.


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Divers avions parqués à l'extrémité nord-est de la base aérienne de Saki, dont le Tu-134 à l'extrême droite, qui semblent tous, au moins superficiellement, ne pas avoir été endommagés. On peut également voir un tremplin utilisé dans le passé pour l'entraînement et les essais à terre liés à l’entraînement des pilotes opérant à partir du porte-avions russe, Amiral Kuznetsov. © Planet Labs 10 août 2022

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D'autres Su-30 Flanker dispersés sur une voie de roulage à l'extrémité nord-est de la base. © Planet Labs 10 août 2022


Bien que ces avions, et d'autres répartis dans diverses autres parties de la base, semblent superficiellement en bon état, ils peuvent avoir subi des dommages importants qui ne sont pas visibles sur les images satellites. Un clip vidéo a été diffusé hier sur les médias sociaux. Il montre une grande poutre métallique qui a traversé une voiture civile, ce qui indique qu'au moins certaines des explosions étaient extrêmement puissantes, ce que montrent d’autres vidéos prises à proximité.


Vidéo Twitter prise sur les abords immédiats de la base de Saki.

Vidéo Twitter des explosions multiples prise à proximité de la base.


L'imagerie satellite montre également ce qui semble être le résultat d'un énorme incendie qui a fait rage dans les espaces herbeux au nord-est de la zone des abris individuels pour les chasseurs et au sud de l'aire de trafic. Des photos et des vidéos prises hier à proximité ont montré d'importantes quantités de fumée noire s'élevant de la base après les premières explosions. Ce qui semble être le principal complexe de stockage de munitions de la base, situé à l'intérieur d'une double rangée de clôtures, ainsi qu'un dépôt de carburant, apparaissent, eux, indemnes.


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Vue en gros plan de la zone brûlée sur la base aérienne de Saki, qui montre l'ampleur de l'incendie initial. © Planet Labs 10 août 2022

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Principal entrepôt de munitions de la base aérienne de Saki, apparemment épargné par les explosions. Planet Labs 10 août 2022

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Dépôt de carburant sur la base aérienne de Saki, également intact. © Planet Labs 10 août 2022

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Stock de munitions d'avion et d'équipements empilés à l'extrémité nord de la base également intact. © Planet Labs 10 août 2022


Bien que l'on ne sache toujours pas exactement ce qui a provoqué les explosions d'hier à la base aérienne de Saki, la concentration des dégâts sur les zones où étaient regroupés les avions de combat, ainsi que les cratères qui semblent être des points d'impact, ne font que confirmer l'hypothèse d'une attaque ou d'une frappe aérienne délibérée. Les responsables ukrainiens qui se sont exprimés officiellement et officieusement au cours de la journée écoulée ont déclaré à plusieurs reprises que des partisans locaux, travaillant peut-être avec des forces d'opérations spéciales, avaient attaqué la base, ou qu'elle avait été frappée à l'aide d'une sorte d'arme à distance développée par les Ukrainiens.

D'après ce que nous pouvons voir sur les images satellites, les dégâts, du moins dans certains cas, semblent être très localisés. Cela pourrait donner du crédit à la possibilité que des drones porteurs de munitions improvisées et pilotés par des individus relativement proches, aient été ici employés.


Vidéo Twitter d’un drone ukrainien capable d’emporter 6 bombes.


Néanmoins, à moins que les munitions ne soient importantes, cela n'expliquerait pas nécessairement la présence manifeste de grands cratères. La question se pose toujours de savoir si les forces ukrainiennes ont pu utiliser une capacité de frappe à distance qu'on ne leur connaissait pas auparavant, y compris un petit stock potentiel de missiles balistiques à courte portée de fabrication nationale.

Quoi qu'il en soit, il semble peu probable que les dégâts que nous constatons aient été infligés au cours d'une sorte de raid terrestre d'opérations spéciales - le fait que cela se soit produit pendant la journée rend cette hypothèse encore moins plausible. Les cratères, en particulier, ne sont pas ceux que l'on s'attendrait à voir dans des charges explosives placées par des équipes au sol.

Si la base aérienne de Saki a effectivement fait l'objet d'une frappe aérienne ou de missiles, cela soulignerait la décision très claire de l'armée russe de ne pas prendre de mesures plus proactives pour abriter les avions de combat à cet endroit. Et ce, bien que la Russie ait une connaissance approfondie de la menace que représentent les attaques de petits drones après des années de combat en Syrie, ce qui a conduit à la construction d'une rangée d'abris plus protégés dans la base de Saki.

Quoi qu'il en soit, le 43ème régiment d'aviation d'attaque navale de la marine russe semble avoir subi hier des pertes importantes, ce qui aura un impact certain sur sa capacité à contribuer aux combats en cours en Ukraine. Cet épisode ne peut qu'être très embarrassant pour la Russie, qu'il s'agisse ou non d'un accident, comme les autorités du pays l'ont affirmé avec insistance et comme cela semble désormais pratiquement impossible, ou d'une action ennemie qui a réussi à franchir les importantes défenses qu'elle a mises en place dans la péninsule.

Il reste à voir si de plus amples informations sur l'étendue des dommages causés à la base aérienne de Saki et sur leurs causes seront publiées. Quoi qu'il en soit, il est désormais clair, sans l'ombre d'un doute, que l'affirmation initiale du ministère russe de la Défense, selon laquelle aucun "équipement d'aviation" n'a été endommagé dans ce qui, selon lui, était un accident, était faux pour ne pas dire un mensonge.


* * *

#100 Actualité de l'aéronautique » [Réel] Le A-10 Thunderbolt est maintenu et sera upgradé » 10/08/2022 13:45

philouplaine
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Bonjour chers amis,

Une bonne nouvelle pour tous les amateurs de ce petit biréacteur de soutien des forces au sol, le fameux A-10 Foudre (Thunderbolt II), plus communément appelé par ses pilotes le Warthog (le Phacochère).

Cet avion, construit par Fairchild, avec son très fameux canon Gatling qui tire des projectiles de 30 mm à raison de 3900 coups par min et qui en même temps peut transporter toute une cargaison impressionnante de bombes et d’armes air-sol, a été introduit dans l’USAF en 1975, il y a donc près de 50 ans ! 715 A-10 furent livrés à l’USAF.

Déjà, dès 2013, il y a 10 ans, les dirigeants de l’USAF voulaient le retirer du service actif le trouvant dépassé. Il y avait alors au sein de l’USAF une forte tendance à privilégier seulement les chasseurs de 4ème et 5ème génération, et une mafia interne qui voulait se débarrasser des missions d’appui au sol pour les laisser à la branche aérienne des forces terrestres et ses hélicoptères d’attaque Cobra et Apache. Curieusement, le Congrès des Etats-Unis en décida autrement et les A-10 restèrent en service actif au sein de l’USAF.

Avec la nomination du général Charles Brown en 2020 à la tête de l’USAF, tout changea et les nouvelles directions qu’il a données à l’USAF ont, entre autres, conduit à ce que les A-10 Thunderbolt soient non seulement maintenus mais upgradé pour répondre aux nouvelles réalités des futurs théâtres de combat.

Je vous ai traduit un article américain paru hier et qui présente où en est l’USAF dans ce projet de nouvel A-10 et quel sera son nouvel armement et ses nouveaux équipements autour de la cellule conservée telle quelle. J’ai pensé que cette traduction pourrait vous intéresser.

Bonne lecture
Philippe
J’aime la sale gueule du A-10 Thunderbolt




Le A10 voit son armement défensif être adapté aux combats futurs de haut niveau

De nouvelles armes, des réservoirs de carburant, des écrans et bien d'autres choses encore sont ajoutés à l'A-10 sur la base de Nellis pour en faire un acteur clé dans un conflit futur de haut niveau.

Par Jamie Hunter, The War Zone, 9 août 2022


Article original en Anglais.


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Un des A-10C Thunderbolt de la 422ème TES (Test and Evaluation Squadron ou escadrille d’essais et d'évaluation de l’USAF). © Jamie Hunter


Les plus grands esprits de l'armée de l'air américaine au sein de la communauté A-10 Thunderbolt II combinent leurs efforts afin de maintenir la pertinence de cette icône, le briseur de chars, le plus fameux avion d’attaque au sol de l’USAF, pour les futurs conflits de grande envergure. Le travail actuel implique un certain nombre d'efforts différents, notamment l'intégration de nouveaux magasins d’armement et de nouvelles armes, ainsi que le développement de tactiques pour permettre à l'A-10 de soutenir les chasseurs modernes de cinquième génération tels que le F-35 lors des combats dans des situations de menace air-sol élevée.

"Le gros effort que nous faisons aujourd'hui pour l'A-10 est une modernisation rapide et simple pour aider l'armée de l'air à mieux se positionner pour les combats de demain", déclare le major Kyle "Metric" Adkison, commandant de la division A-10 à la 422ème escadrille de test et d'évaluation, à la base aérienne de Nellis dans le Nevada. "Aussi longtemps que l'A-10 sera en service, nous voulons le développer pour aider l'US Air Force à combattre avec succès de toutes les manières possibles. Aujourd'hui, cela signifie soutenir les chasseurs de cinquième génération." Les partisans du A-10 comme Kyle Adkison tiennent à souligner que l'A-10 est bien plus qu'une simple cellule avec un gros canon de 30 mm à tir ultra-rapide. "Il dispose de 10 postes d'armes, d'un très long temps de vol et d'une capacité unique et robuste pour opérer à partir d'autoroutes et de pistes en terre, sans compter qu'il n'a pas besoin de beaucoup d'infrastructures de soutien, de sorte que les frais généraux pour l’affecter à des espaces de combat changeants sont faibles. En résumé, nos A-10 peuvent transporter beaucoup de choses qui aideront les autres à obtenir les effets désirés".

"Tout a commencé lorsque le général Charles "CQ" Brown Jr. est devenu le chef d'état-major de l'USAF et qu'il a publié son mémo "Accélérer, changer ou perdre" (NdT – Memo intitulé Accelerate, Change, or Lose : la nouvelle stratégie ACOL de l’USAF développée en aout 2020) selon nous devons tous commencer à envisager les problèmes dans une optique différente", explique le major Mason "Pinch" Vincent, pilote instructeur d'A-10 au sein de la 66ème escadrille de l'USAF.


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Le général Charles "CQ" Brown, nouveau chef d'état-major de l'USAF nommé en mars 2020. © USAF


"Beaucoup de gens à l’USAF pensaient que le A-10 n’était pas fait pour les futures missions ACOL. Nous étions constamment déployés, les gars étaient toujours en Irak, en Syrie ou en Afghanistan, ou en train de voler à partir de la Turquie, faisant tout cela, donc nous n'avions pas vraiment le temps de regarder à l'intérieur de l’USAF et de réfléchir à comment nous pourrions contribuer à ce combat haut de gamme, en dehors du monde des missions CAS air-sol de soutien aérien rapproché (CAS pour Close Air Support) pour lesquelles nous sommes typiquement entraînés."


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Un A-10C de la 66ème escadrille à la base aérienne de Nellis. © Jamie Hunter


"Nous avons eu un peu de répit, nous avons réuni les bonnes personnes dans la même pièce et nous avons commencé à réfléchir à ce que cela pourrait donner. Nous avons la chance d'être à Nellis où nous pouvons simplement traverser la rue et parler à toutes les personnes des différentes plateformes qui vont exécuter ces missions, et demander ce dont vous avez besoin pour vous aider. L'une des choses que nous avons trouvées, c'est que vous aurez toujours besoin de plus d'armes à la bonne distance de combats au sol très changeants. Et l'A-10 s'avère être un bon candidat pour les fournir parce que cet avion peut emporter un grand nombre d'armes différentes et si vous combinez cela avec les opérations de combat agiles près du sol auxquelles tous les pilotes d’A-10 sont entraînés [...] cela fait vraiment sens".

Au cœur de cet effort d'amélioration de l'A-10 se trouve un plan d'intégration du leurre miniature ADM-160 (MALD) et de la bombe guidée de petit diamètre GBU-39/B (SDB), une bombe guidée de précision de 110 kg qui peut planer sur des dizaines de kilomètres pour atteindre sa cible. Les testeurs envisagent également d'ajouter le missile AGM-158 Joint Air-to-Surface Standoff Missile (JASSM) plus tard. "Personne ne veut dépenser des milliards de dollars pour l'A-10", explique Vincent, "mais si nous pouvons trouver des moyens d'ajouter des capacités d’armement aux A-10 et de rendre ces avions plus aptes à la survie et plus efficaces au combat rapproché, alors nous allons faire cela du mieux que nous pouvons car on ne manque pas d’idées."


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Un A-10C affecté à la 40ème escadrille d'essais en vol et d’évaluation transportant 16 bombes de petit diamètre GBU-39 lors d'un essai sur la base aérienne d'Eglin, le 9 février 2022. © Sergent John Raven, USAF


"Nous ne voulions pas chercher quelque chose de tout nouveau ou qui allait nécessiter que les gens dépensent de l'argent, du temps ou des efforts pour quelque chose de spécifique aux A-10, et nous ne voulions pas regarder quelque chose à très long terme non plus, parce que nous ne savons pas à quoi ressemblera le futur A-10. En tout cas, ce futur A-10 sera un appareil bon marché, facilement intégrable, avec un impact immédiat."

"Le missile leurre MALD (NdT – MALD pour Miniature Air-Lauched Decoy ou Leurre Miniature Lancé par Avion) était la solution la plus facile et la plus immédiate. Un armement MALD ne nécessite aucune intégration logicielle avec l’ordinateur de bord du A-10, nous pouvons l'accrocher sous l’aile directement, la laisser tomber, et elle fonctionne parfaitement. Pour l'amener au combat, vous avez juste besoin de beaucoup de postes d’attache sur chaque avion – c’est déjà le cas du A-10 - nous ne sommes pas limités par le poids car c'est une arme légère (un missile MALD ADM-160 pèse 45 kg seulement) et nous avons 10 pylônes sur lesquels nous pouvons accrocher le missile MALD."

L'A-10 pourra transporter jusqu'à 16 MALD, soit autant qu’un B-52, alors qu’un F-16 ne peut en emporter que quatre. Le missile est conçu pour tromper, saturer et stimuler de façon chaotique le système intégré de défense aérienne (IADS) de l’ennemi. "Nous pouvons lancer le MALD pour qu'il effectue des manœuvres préplanifiées. Cela signifie que la force adverse doit trier les cibles du MALD et essayer de déterminer si leur présence est une tromperie ou un leurre - ce qui, en fin de compte, rend plus difficile l’ensemble du ciblage que doit réaliser l'ennemi et aide donc nos autres avions de la force de frappe de première vague".


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Vérification de l’aptitude de missiles MALD ADM-160 à être monté sur un pylone d’A-10C. © Michigan Air National Guard


"Nous avons d'abord présenté le projet à la communauté A-10 pour essayer de la convaincre de ce changement de mentalité", explique M. Vincent. "Nous ne nous éloignions pas des missions principales de l'A-10, à savoir le CAS et la recherche et le sauvetage au combat (missions CSAR pour Combat Search and Rescue), mais c'est quelque chose que nous pouvons mettre en œuvre très rapidement pour aider les pilotes des avions de quatrième et cinquième génération à mener leurs missions efficacement. Tout le monde comprend la nature de cette compétition entre pairs. Quand vous partez en guerre, vous faites avec ce que vous avez et ce que vous avez doit être aussi performant que possible. C'est l'une des cartes que l'A-10 peut jouer, une fois upgradé intelligemment".

Bien que l'idée d'ajouter des missiles MALD au Warthog soit née à Nellis, c’est la 107ème Escadrille de Chasse de l'Air National Guard basée à Selfridge dans le Michigan qui a mené les premiers essais d'intégration de ces missiles sur la cellule de l’A-10, avec l'approbation du System Program Office (SPO) des A-10 basé sur la base Hill de l’USAF dans l'Utah. Le major Adkison affirme que le plan MALD a "beaucoup d'adhésion" parmi les dirigeants de l'USAF et que l'on espère qu'il entrera dans les essais en vol dans un avenir proche.


Vidéo YouTube sur le A-10 à Nellis – Durée 9min30


L’utilisation des bombes guidées de type SDB par des A-10 modifiés est plus avancée et des premiers essais ont déjà été effectués (NdT – SDB pour Small Diameter Bomb. Les deux principales de ces bombes de 110 kg sont la GBU-39, qui est équipée d'une centrale de navigation par inertie couplée à un GPS pour attaquer des cibles fixes comme des dépôts de carburant, des abris bétonnés, et la GBU-40 qui est équipée d’un système de recherche thermique avec reconnaissance automatique de cible pour frapper des cibles mobiles telles que des chars ou des postes de commandement mobiles. Le diamètre de chacune de ces bombes dites de petit diamètre est inférieur à 20 cm).

La 422ème TES (Test and Evaluation Squadron) de Nellis devrait commencer à larguer des bombes SDB réelles dès la fin de cet été. Le major Vincent déclare : "Nous pouvons charger quatre bombes SDB sur chaque pylône, et un A-10 est équipé entre quatre et six de ces pylones (BRU) - ce qui fait entre 16 et 24 bombes SDB chargées sur chaque A-10." Une flotte de quatre A-10 serait donc capable de transporter 64 bombes SDB en une seule mission ! Selon le major Adkison, les bombes SDB devraient être déployés dans la flotte des A-10 dès 2023.

En plus des missiles MALD et des bombes SDB, la 422ème TES travaille sur une multitude d'autres projets pour l'A-10. "Nous venons de terminer une évaluation de la signature nocturne desvA-10 pour évaluer leur facilité de détection la nuit", explique Adkison. "Nous avons également terminé certains travaux sur le système d'armement avancé de précision AGR-20 (des roquettes guidées par laser) avec l'aide de BAE Systems pour les intégrer complètement dans le futur A-10" (NdT - L'AGR-20 est une roquette de destruction de précision ou APKWS pour Advanced Precision Kill Weapon System qui convertit les roquettes non guidées Hydra 70 en munitions guidées de précision (MGP) à l'aide d'un kit de guidage laser. L'APKWS coûte environ un tiers du coût et un tiers du poids de l'inventaire actuel des armes guidées par laser, a un rendement plus faible qui convient mieux pour éviter les dommages collatéraux et prend un quart du temps de chargement et de déchargement pour le personnel au sol par rapport aux missiles plus conventionnels).

Le major Vincent continue : "Au départ, nous les utilisions de façon empirique, mais avec l'intégration complète en cours sur l’A-10, nous obtenons beaucoup plus d'informations sur les spécificités de la roquette et nous avons pu augmenter notre portée effective de plus de 50 %. Nous avons également développé de nouvelles tactiques, par exemple l'utilisation de ces roquettes contre des bateaux en mouvement.


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Un des A-10C du 422ème TES à Nellis. © Jamie Hunter


Les "Green Bats" (NdT – La Green Bat, ou la chauve-souris verte, est l’insigne de la 422ème escadrille d’essais et d’évaluation de l’USAF), en collaboration avec leurs homologues de la garde nationale et de la réserve du centre d'essai du commandement de la garde nationale aérienne et de la réserve de Davis-Monthan, en Arizona, gèrent également un certain nombre d'autres initiatives, notamment l'intégration complète de la liaison de données Link 16 plutôt que de la liaison plus ancienne SADL (Situational Awareness Data Link), ainsi que de nouvelles radios de type ARC-210 Gen6 et un nouveau GPS, tous les deux beaucoup plus résistants à différents types de brouillages.


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L’insigne, une chauve-souris verte et belliqueuse, de la 422ème TES de l’AFAB Nellis.


Le futur réservoir de carburant des A-10 modifiés est une modification du grand réservoir existant de l'A-10 qui, actuellement, ne peut pas être placé sur un A-10 lors des missions de combat mais seulement pour des vols de convoyage. Le futur réservoir résistera notamment à des charges en g plus élevées, ce qui signifie qu'il pourra être transporté lors des missions de combat. Cela augmentera le temps de vol et réduira les besoins de ravitaillement en vol, tout en augmentant ce qui fait de l’A-10 un avion de combat rustique et robuste très apprécié des troupes au sol. En outre, le système d'affichage haute résolution (HRDS) fournira aux pilotes du futur A-10 un environnement du cockpit plus moderne. Les écrans multifonctions actuels de l'avion limitent l'efficacité du pod de ciblage Litening en termes de taille d'image et de nombre de pixels. Le HRDS présentera au pilote une image beaucoup plus grande.

Le HRDS permettra également de modifier dynamiquement les cartes numériques en vol, y compris l'utilisation du tracé de la ligne de visée. "Nos planifications de mission nous permettent de tracer les systèmes de menace présents sur le parcours de vol et sur le lieu du soutien et d'évaluer comment le pilote pourra utiliser au mieux les caractéristiques du terrain pour atténuer ces menaces", explique Adkison. "Cela signifie que nous pouvons déterminer l'altitude à laquelle nous devons voler pour les éviter. Avec les cartes HRDS, nous pourrons faire cela en temps réel pendant le combat. Il sera très utile de pouvoir déterminer des choses comme l'endroit où l'on peut se tenir en toute sécurité lorsque l'on travaille soit avec du personnel isolé soit avec un contrôleur d'attaque terminal conjoint (JTAC)." (NdT – Un contrôleur d'attaque terminale interarmées (JTAC pour Joint Terminal Attack Controller) est le terme utilisé depuis septembre 2003 dans les forces armées des États-Unis et dans certaines autres forces militaires pour désigner un militaire qualifié qui dirige l'action des avions de combat engagés dans des opérations d'appui aérien rapproché et d'autres opérations aériennes offensives depuis une position avancée au sol).


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Un A-10C chargé de bombes SDB GBU-39 à petit diamètre (19 cm). © Sergent John Raven, USAF


Pourtant, la menace la plus répandue à laquelle est confrontée la communauté A-10 est l'USAF elle-même, qui a tenté à plusieurs reprises de retirer le Warthog de son inventaire. En effet, en 2013, la force d'essai opérationnelle a été presque complètement fermée, ce qui a ensuite été inversé lorsque le Congrès a voté l’annulation des plans de retrait de l'A-10 présentés par l’USAF.

Au moins pour les quelques années à venir, l'existence de l'A-10 semble être assurée, bien qu'en nombre potentiellement décroissant. Pendant ce temps, les proches du populaire Warthog travaillent de toutes les manières possibles pour maintenir l'héritage et l'état d'esprit de ce magnifique avion d'appui aérien rapproché tout en le préparant aux futurs combats de haut niveau.



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