Il est 8 heures du matin, en cette belle journée d'automne, le vent frais girondais embrasse mes joues alors que je me dirige, fenêtres ouvertes vers les locaux dédiés aux pilotes en campagne de tir, à côté du CEV après un petit déjeuner vite avalé au mess mixte.

Après une bonne nuit de sommeil (le vol de nuit depuis Dijon n'ayant pas été de tout repos) je me sens en forme. Au programme ce matin, un exercice de tir canon en config de guerre sur le champ de tir de Calamar a l'extrémité de la base. Malgré que le vol soit court, je le prépare avec le plus grand soin. Je partirai donc en config 3 Jules et le plein d’obus. La section prévision météo signale 5kts de vent venant du 070 et un ciel dégagé. Le temps est donc favorable à la mission de ce matin ; j'ai révisé les paramètres de tir dans ma tête : verticale la cible à 10.000 pieds, je passe sur le dos et ajuste mon placement, déclenche le tir à 1500fts QNH et ressource dans la foulée avec dégagement par la gauche pour éviter les ricochets ...

Une fois mon briefing avec mon moniteur terminé, j'enfile ma Mae West et mon anti-g et je vais voir mes amis mécanos du bureau de piste pour signer la forme 11 (Document qui transfert la responsabilité de la machine des mécaniciens au pilote). A l'issue je steppe vers l'avion avec à ma droite le pistard.

On fait le tour avion et le mécanicien retire une à une les flammes déverrouillant les sécurités.
Je grimpe l'échelle et me glisse dans le cockpit de mon -5 comme une chaussette, c'est exigu mais on s'y plait.
Le pistard me brèle, je ferme la verrière et me voici dans ma bulle.
Je pousse l'interrupteur de batterie et ma machine prend vie et s'illumine comme un sapin de noël, le dialogue avec mon 2000 commence : je contacte Cazaux tour sur 118.4 et la ‘troleuse me répond d'une voix féminine et agréable, je demande la mise en route qu'elle m'accorde sur le champ.

Je vérifie le statut d’alignement de la centrale inertielle et déroule la checklist mentalement : le frein de parc, les coupe feu, les pompes BP et j'appuie sur le joli bouton rouge. Le moteur siffle et c'est l'emballement T4, les tours montent et se stabilisent au régime nominal, le 2000 semble maintenant respirer et moi aussi.

Je demande donc le roulage que l'on m'accorde, je teste les freins avec l'aide du pistard et effectue les dernières vérifs' cabines; on est bon, je salue ce dernier et entame le roulage.
Je décollerai ce matin de la piste 24 et effectuerai donc mon roulage via le taxiway Echo.
J’aperçois sur ma droite le bâtiment singapourien qui accueille les pilotes d'A4SU et TA4SU, sur ma droite les installations du CEV et leurs Falcon ainsi que les Pilatus de l'EPNER. Au point d'arrêt de la 24, je peux voir à ma gauche les hangars de maintenance du Pyrénées et leurs EC725 Rutilants. Si jamais la mécanique me trahissait (ou si je merdais), ce sera sans doute eux qui auraient la tâche de venir me récupérer si éjection il y avait, ce n'est pas au programme d'aujourd'hui !

La clearance est donnée par la tour, et après les tests moteurs et l’armement des canons, je m'aligne sur la piste 24. On respire un dernier grand coup je serre les freins et avance la manette jusqu'à PC mini, je lâche les freins et enclenche la PC max et c’est parti, je ressens le coup de pied au cul habituel, le 2000 est lancé et sa vitesse croît 50...100. 150 kts, rotation souple, je m'arrache du sol, le 2000 grimpe franchement.
Je compte deux patates bouillies et relève la palette de train, il y a tout de suite moins de frottement, ça vole mieux on est bon. je passe sous le contrôle de calamar après avoir remercié Cazaux tour de son contrôle.

J'effectue un large virage par la gauche pour revenir me placer dans l'axe du champ de tir et contacte le directeur de tir. On m'autorise à me mettre en position.
J’atteins aisément 10.000 pieds dans l'axe du champ, j'ai le visuel sur la cible au sol, 4000 mètres en dessous de moi (En même temps difficile de la rater).
J'attends le signal du directeur de tir et c'est le signal ! D'un coup de manche je bascule mon 2000 sur le dos et tire sur le manche, ca tire mais l'anti-g fait son boulot, je me remets en ligne de vol et stabilise ma visée.

L’alti s'affole, je fonce vers le sol à toute vitesse ! 2000 pieds le réticule est sur la cible, je soulève et presse la queue de détente! Mon 2000-5F s'ébranle et les obus filent vers leur cible à toute vitesse en laissant des lignées de traçantes!

Manche au ventre j'effectue une ressource, la force centrifuge me plaque au siège je comprime tous mes muscles et serre les dents! La machine souffre et moi aussi, je dégage par la gauche pour éviter les  éventuels ricochets.

"Tir au but !" m'annonce le directeur de tir.
Ce matin j'effectuerais donc 3 passages avec au total trois tirs au but.

Pas mal ! Je rentre à la maison, mais depuis le début de l'exercice, le vent à changé, j'intégrerais donc en piste 06. Je fais mon passage au break, et réintègre le circuit. Je me place en vent arrière, je sors les éléments, pour me ramener à 210 kts. Dernier virage, contact PAPI, deux rouge, deux blanches, on est bon. 170 kts à la VI Je touche sur le seuil et maintien le manche en butée arrière pour m'aider du freinage aérodynamique, les AF sont sortis, la vitesse est contrôlée et je dégage par la prochaine bretelle. Résultat de la mission 3 tirs au but sur 3 ! Aujourd'hui je peux enfin le dire, j’ai dompté mes DEFA554 !

Dernière modification par Rooster (22-09-2011 18:49:52)